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Les noces de fer

Les noces de fer

Titel: Les noces de fer Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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batailler pour venir vous chercher.
    D’elle-même, Blandine reprit leur étreinte, et c’était une sensation prodigieuse, en pleine action guerrière et grand danger de mort, que ce nouveau baiser prompt, presque sévère, qui scellait leurs retrouvailles. Sans mot dire Ogier berça, rassura la pucelle, et cet enlacement menaçant de durer, Tinchebraye y mit un terme.
    — Messire ! Messire !… Et vous, damoiselle !… Vous aurez tout le temps de vous mignoter dans les jours à venir si nous parvenons à nous embler [48]  !
    Ogier libéra Blandine et lui baisant le bout du nez :
    — Il a raison.
    — J’avais peur… J’ai prié, prié… Dieu est bon !
    — M’amie, j’en conviendrai si nous quittons la ville !
    Teinté par l’émeraude de la robe, le long écheveau de la coiffure couleur d’automne s’imprégnait du reflet des flammes, et l’émoi qui privait les joues de tout leur rose avivait le vermeil de la bouche entre-close sur des dents dont l’éclat eût fait ternir les perles. Et ce regard de confiance éperdue entre les cils battants ! Il était à la fois récompense et promesse. Jamais regard plus sincèrement aimant ne s’était arrêté sur lui, Ogier !
    Tout aussi merveillé que lors de leur première rencontre, il se dit que cette jouvencelle était trop belle, d’un charme tellement achevé joint à une qualité d’esprit si parfaite qu’il ne la méritait peut-être pas. « Nous nous aimons ! » Malgré cette évidence, il se sentait l’âme en peine.
    — Je n’ai pas taché votre robe de mes mains, mais il y avait du sang sur ma cuirasse… Et je vous ai serrée très fort : voilà un vêtement qu’il vous faut changer…
    — Qu’importe !… Quand nous avons appris l’approche des Anglais, je leur ai demandé à tous de partir pour Chauvigny… Ils ont refusé.
    — Fuir, ma douce, n’était pourtant pas couardise mais sagesse… Vos parents auraient dû le comprendre !… Fuir maintenant est une nécessité, bien que je ne sache comment !… Nous serons en sauvement à Chauvigny.
    Tourné vers dame Berland, Ogier retint malaisément un sourire : la peur qui n’avait cessé de se développer en elle semblait avoir aminci son orgueil et sa défiance à son égard.
    — Dame, venez aussi… Je me tourmenterais de vous savoir en cet hôtel tandis que nous serons à l’abri.
    Prompte et douce, Blandine jeta ses bras autour du cou ceint d’acier. Son étreinte fut cette fois si serrée que ses cheveux se répandirent sur l’épaule d’Ogier dont la saye d’armes avait été lacérée par un taillant qui sans doute, à l’acuité de la brûlure, avait ouvert profondément la chair.
    — Vous êtes bon… Il a raison, mère… Vous savez combien j’ai foi en lui.
    Blandine avait dénoué son étreinte. Ainsi, bras ballants, elle semblait se livrer aux volontés maternelles, mais son front haut, ses yeux fixes et brillants révélaient un défi plutôt qu’une soumission filiale. Pareille contenance dut paraître la suprême injure faite à cette femme de nouveau tout aussi acerbe et maussade dans la détresse qu’elle l’avait été dans la quiétude des jours de paix :
    — Cet effronté qui te mignote et que tu mignotes avec une répugnante outrance !
    — Répugnante, non, dit Joubert.
    — Seriez-vous jalouse ? demanda Tinchebraye. Vous feriez mieux, l’une et l’autre, d’emplir chacune un bissac avec ce que vous avez de plus cher… Faut pas s’attarder ! Ou vous suivez, dame, votre pucelle, nous-mêmes et le chevalier…
    — Chevalier ! ricana dame Berland les bras croisés, le menton haut, la bouche un peu tordue, frémissante. Chevalier ! Après tout ce qu’on nous a rapporté sur lui !
    Indignée par cette malveillance inattendue, Blandine saisit sa mère aux épaules et la secoua sans respect ni mesure :
    — Vous le savez : Isabelle Dary a porté sur Ogier des accusations monstrueuses ! Qui donc allez-vous croire ? Cette folle qu’on a retrouvée occise d’un coup au cœur dans les eaux de l’Anglin ou moi, qui m’en suis et en demeure enamourée !
    La fureur et l’impatience enténébraient le regard de la pucelle. Ce ton coupant, autoritaire, lui seyait mal, mais Ogier l’admira : « Comme elle m’aime ! » se réjouit-il, tandis que dame Berland, courroucée, levait la main sur sa fille – une main que Tinchebraye arrêta :
    — Dame, apaisez-vous !… Vous parolez comme au marché, et

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