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Les noces de fer

Les noces de fer

Titel: Les noces de fer Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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couvraient, dissimulant sans doute un plastron, des mailles et jambières de fer ; et si la croix noire en était absente, Ogier fut certain d’avoir affaire aux hôtes de l’évêque Fort d’Aux. D’ailleurs, malgré la coule dissimulant leur cervelière, ils demeuraient reconnaissables ; il les avait suffisamment observés, lors des joutes de Chauvigny, pour savoir que celui qui menait son cheval jusqu’à lui se nommait Cottbus, et l’autre, Prenzlau. Regardant à l’entour, il vit sortir d’un fourré six arbalétriers, l’arme bandée, tandis qu’à l’arrière, la voix de Gardic s’élevait, d’une raucité méconnaissable :
    — Messire, nous avons six archers au cul !
    — Vous oubliez ceux qui sont à vos flancs, dit Cottbus.
    Il avait un visage maigre, gris et mat, et dans l’ombre de la coule, ses yeux lourds et sévères exprimaient à la fois le plaisir et la menace. Ogier posa sa dextre sur la cuisse de Blandine afin de la rassurer, puis, s’adressant au Teutonique :
    — Ce royaume n’est pas vôtre. En revanche, j’y suis chez moi et vous requiers de me céder le passage.
    Prenzlau rejoignit son compagnon et leva son épée pour un salut auquel Ogier fut indifférent. L’expression hautaine et chagrine du moine-chevalier devint soudain aimable, confortante. « Il se croit chez lui ! » L’homme contourna le charreton et revint se placer devant :
    — Messire, nous ne sommes ni des routiers ni des malandrins, et vous le savez !… Dieu nous a enjoint de vous faire obstacle.
    — Dieu n’est pour rien dans vos agissements !
    — Vous êtes sept hommes et nous vingt-quatre… Un mouvement de trop et vous seriez tous percés de sagettes et de carreaux, la belle dame également… Méditez sur la vanité et l’inanité de certains efforts, même noblement accomplis, et vous vivrez tous !
    — Vous parlez bien la langue d’oïl, messires, pour des gens venus des Allemagnes.
    Un peu de blanc apparut entre les lèvres de Cottbus :
    — Vous ne souhaitez nullement, messire Argouges ou Fenouillet, que votre épouse devienne veuve… au cas où nous l’épargnerions. J’ajoute que nous pourrions l’emmener aux Allemagnes…
    — Qui vous a dit mon nom ?
    Prenzlau sourit. Il avait une face plate, rougeâtre, comme s’il avait passé presque toute sa vie à l’écraser contre un vitrail, pour guetter ses ennemis.
    — Vous savez qui nous sommes. N’est-il pas juste que nous sachions qui vous êtes ?
    Un mouvement intentionnel du poignet fit luire la lame de l’épée longue, massive, à deux tranchants fuyant vers la pointe effilée, et dont la garde n’était qu’une simple croisette avec des quillons surbaissés. Ogier pensa à celle que son oncle lui avait offerte et qui, selon ses dires, avait appartenu à Hermann von Salza, Grand Maître de l’Ordre teutonique [124] . « Dommage que je l’aie laissée à Gratot. En la leur donnant, ils m’auraient peut-être cédé le passage. » La voix de Cottbus devint impérieuse :
    — Votre mire se tait, mais certain clerc qui vous connaît, et vous a diligemment mariés tous deux, a parlé…
    — Frère Isambert !
    — Il est pour vous plein d’admiration… Quelque temps après le grand tournoi de Chauvigny, alors qu’on s’étonnait de votre disparition, il nous a fait ses confidences. À nous seuls… Vous l’avez vu en parfaite santé… C’est un saint homme qui s’épanche devant un hanap de bon vin… Dois-je dire que je sais que vous savez pourquoi nous sommes là ?… Dois-je dire que votre… pèlerinage à la commanderie de Montgaugier, en compagnie du vieux mire, a excité notre curiosité tout en nous confirmant dans le fait qu’il possédait ce que nos devanciers et frères ont longuement cherché ?
    Penchée, lissant sa robe contre sa cuisse qu’Ogier venait de lâcher, Blandine chuchota, baissant la tête :
    — Je ne comprends rien à ce que dit cet homme.
    D’un froncement des sourcils, Ogier lui enjoignit de se taire puis, regardant les deux chevaliers avec une autorité froide et hautaine qu’il était loin d’éprouver, il s’exprima lentement, haussant le ton pour dominer le tremblement de sa voix :
    — Messires, je suis certain que le malheur fondra sur vous et vos compagnons si vous vous appropriez ce qui ne vous revient en rien…
    Il ne put achever : abrochant son destrier, Prenzlau l’amenait près de lui. Il vit Marchegai, inquiet, prêt à se ruer sur

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