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Les Nus et les Morts

Titel: Les Nus et les Morts Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Norman Mailer
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Minetta. Le cours ambigu, incertain, de ses pensées le troublait. Il se sentait sur le point de friser quelque chose de profond. « Parfois je me mets à penser, tu sais, de quoi est-ce qu’il retourne dans tout ça ? Y avait un gars à l’hôpital, qu’est mort au milieu de ia nuit. J’y pense parfois.
    – Oh ! c’est terrible, dit Goldstein. Mort comme ça, sans personne autour de lui. » Il fit entendre un gloussement de sympathie et, tout soudain, insolitement, des larmes lui montèrent aux yeux.
    Minetta le regarda avec ahurissement. « Jésus, qu’est-ce qu’y a ?
    – Je ne sais pas, c’est si triste. Il avait probablement une femme, des parents. »
    Minetta branla du chef. « C’est drôle avec vous autres juifs. Tu sais, vous avez plus pitié de vous-mêmes et de tout le monde que la plupart des gens. »
    Roth, qui reposait non loin de là sans mot dire, se souleva sur son coude. « J’aimerais en être excepté », dit-il. La généralisation de Minetta l’incommodait, comme si un ivrogne l’avait couvert d’injures.
    « Qu’est-ce que tu veux dire ? » aboya Minetta. Roth l’irritait ; il lui rappelait que dans quelques minutes il leur faudrait reprendre le collier, et cette perspective éveilla sa crainte inavouée de se voir le point de mire de Croft. « Qui foutre te demande quelque chose ? ajouta-t-il.
    – Je pense que ton affirmation est sans fondement. » La rebuffade qu’il venait d’essuyer le confirmait dans sa défiance. « Un gosse de vingt ans, se disait-il, et même lui croit tout savoir. » Il secoua la tête et dit de sa lente, pompeuse voix : « C’est un gros problème. Une affirmation comme celle-là… » Il agita la main avec lenteur, en signe de mépris.
    Minetta avait été heureux de sa sentence, et l’intervention de Roth ne fit qu’alimenter son animosité à l’égard de celui-ci. c Qui est-ce que tu penses qu’a raison, Goldstein ? Moi, ou ce croque-mort-là ? »
    Malgré lui Goldstein partit d’un rire. Il éprouvait de la compassion pour Roth quand il ne l’avait pas sous ses yeux, mais Roth était toujours si lent, si solennel dans tout ce qu’il disait. On bâillait d’ennui en attendant qu’il finît une phrase, De plus, l’analyse de Minetta n’avait pas déplu à Goldstein. « Je ne sais pas, je crois que ce que tu as dit ne manquait pas de sens. »
    Roth sourit aigrement. « J’en ai l’habitude », se dit-il. Tout le monde, toujours, prenait parti contre lui. Tout à l’heure, au travail, il en avait voulu à Goldstein de se montrer si entreprenant à la tâche ; c’était, en quelque sorte, une trahison. Que Goldstein se mît maintenant d’accord avec Minetta ne lui causait pas de surprise. « Absolument sans fondement, répéta-t-il.
    – C’est tout ce que tu peux dire ? ricana Minetta. Ab-so-lu-ment sans fon-de-ment !… le singea-t-il.
    – – Très bien alors, prenez mon cas par exemple, dit Roth, ignorant le sarcasme. Je suis juif, mais je n’ai pas de religion. J’en sais probablement moins quant aux juifs que toi, Minetta. Qui ès-tu pour dire ce que je sens ? Je n’ai jamais rien constaté qui rende les Juifs tous identiques les uns aux autres. Je me considère Américain. »
    Goldstein haussa les épaules. « Aurais-tu honte ? » de manda-t-il doucement.
    Roth expira son souffle avec ennui. « Je n’aime pas cette espèce de questions. » Discuter face à ces deux visages vides et froids accélérait les battements de son cœur. Une puissante et irrationnelle angoisse faisait venir la sueur sur la paume de ses mains. « Est-ce là la seule réponse que tu trouves à me donner ? » fit-il d’une voix de tête.
    « Aaah, les cobayes et les juifs c’est du pareil au même, se dit Minetta. S’excitent toujours à propos de balles. » Il se sentait au-dessus de la discussion.
    « Ecoute, Roth, dit Goldstein. Pourquoi, penses tu, Croft et Brown ne t’aiment pas ? Non pas parce que c’est toi mais à cause de ta religion, à cause de quelque chose que tu prétends ne pas connaître. » Mais il n était pas très sûr de son argument. Roth l’embarrassait. Il était toujours un peu chagriné que Roth fût juif, à cause de la mauvaise impression qu’il faisait sur les chrétiens.
    Roth éprouva un coup au cœur. Il savait que Croft et Brown ne l’aimaient pas, et pourtant, de se l’entendre dire, lui faisait mal. « Je ne le vois pas ainsi, protesta-t-il. Ça

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