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Les Nus et les Morts

Titel: Les Nus et les Morts Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Norman Mailer
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une machine », dit-il. Il enleva ses lunettes, essuya avec un coin de son mouchoir les verres embués. « Je me rappelle qu’y avait une fois un type chez nous avec une bécane anglaise. Les bécanes américaines c’était pas assez bon pour lui. Il a perdu un roulement à billes et y avait rien pour le remplacer, alors j’ai pris un roulement américain et je l’ai ajusté à sa machine. » Il pointa un de ses gros doigts sur Gallagher. « Quand ç’a été fait, la bécane roulait aussi bien qu’avant.
    – Très malin, grommela Gallagher. A Boston t’aurais trouvé tous les roulements à billes qu’on veut.
    – Y a des fois qu’il faut mieux se débrouiller, dit Wilson.
    – Je vois pas comment tu te débrouillerais sans ta queue », intervint Red. Ils rirent tous trois. « C’est quelque chose qu’on devrait toujours avoir sous la main », admit Wilson. Il frotta pensivement sa main sur le mur de la niche. « A Boston, dit Gallagher, quand un gars tombe une fille, il le fait savoir aux copains. » Mais, ayant dit, il eut honte tout à coup. Il se promit de se rappeler ce qu’il venait de dire, pour en faire l’aveu au fière Hogan quand il irait se confesser. Cette résolution lui fit du bien. Il oubliait toujours ses mauvaises actions quand il allait à confesse. Il avait beau faire l’effort de rassembler ses vilaines pensées avant de voir le père Hogan, il ne réussissait pas à s’en souvenir ; tout ce qu’il pouvait dire c’était : « Mon père, j’ai blasphémé. »
    Mary le connaissait si peu, pensait-il. Elle ne savait même "pas comment il jurait. Mais, ça, c’était une mauvaise habitude qu’il devait à l’armée. Avant, quand il était avec sa bande, il jurait aussi, mais cela ne comptait pas. Il n’était qu’un gosse alors. Et il ne jurait-jamais en présence des femmes.
    Il se mit à penser à sa bande. Quel bon tas de gars ils faisaient tous, se dit-il avec fierté. Il se rappelait comment ils avaient distribué des tracts pour les élections de McCarthy, à Roxbury. McCarthy avait même fait un discours plus tard, disant qu’il devait sa victoire à ses loyales cohortes. Et comment une autre fois ils avaient fait une descente à Dorchester, pour donner une leçon aux Yids. Ils s’étaient emparés d’un merdeux de onze ans, qui rentrait de l’école ; ils l’avaient encerclé, et Whitey Lydon avait dit : « Qu’est-ce que t’es, toi ? » Le merdeux avait dit en tremblant qu’il ne savait pas. « T’es un youpin », lui avait dit Whitey. « Voilà ce que t’es : un foutu youpin. » Il l’avait empoigné par la chemise, disant : « Alors, qu’est-ce que t’es, toi ?
    – Je suis un youpin, avait dit le môme sur le point de pleurer.
    – C’est ça, avait dit Lydon. Epelle ça. Epelle : youpin.
    – I-o-u-p-a-i-n », avait bégayé le môme.
    « Quel éclat de rire ç’a été" », pensait Gallagher. –
    I-o-u-p-a-i-n. Le merdeux avait eu tellement peur qu’il avait sans doute sali sa culotte. Ces sacrés Yids ! II se souvenait aussi comment Lydon était devenu policier. Cette veine qu’il avait, Lydon. Avec un peu de chance lui aussi aurait pu être de la police. Mais, lui, de tout le travail qu’il avait fait pour le Club Démocratique, il n’avait retiré aucun profit. Qu’est-ce donc qui clochait avec lui ? Il voulait pourtant faire de grandes choses. Il aurait même pu décrocher un boulot aux P. T. T., sans ce conseiller municipal Shapiro et son foutu neveu Abie ou Jakie. Il éprouva un profond ressentiment à ce souvenir. Il y avait toujours quelque chose pour lui tirer dans les pattes. Il jouissait de sentir sa muette colère qui allait croissant, et parce que cela lui valait une riche, satisfaction, il éclata soudainement : « Je vois qu’on a deux de ces enculés d’Yids dans la section.
    – Oui », dit Red. Il savait que Gallagher était sur le point de se lancer dans une de ses longues diatribes, et cela l’ennuyait. « Oui, reprit-il avec un soupir. C’est des fils de garce tout comme nous tous. »
    Gallagher se tourna vers lui. « Y a qu’une semaine qu’ils sont arrivés, et voilà déjà qu’on est tous infestés de poux.
    – Je sais pas moi, dit Wilson. Ce Roth il vaut pas grand-chose, mais l’autre gars, ce Goldstein, ou Goldberg, ou le diable sait quoi, il est pas un mauvais type. J’ai été en corvée avec lui aujourd’hui, et on a parlé de la meilleure façon de fixer

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