Les pièges du désir

poursuivre. 
    Elle tenta en vain de se dégager. 
    – C’est absurde ! Je ne peux imaginer un seul instant… 
    Il resserra son étreinte et porta l’une de ses mains à ses lèvres humides. 
    – Je suis tombé amoureux fou de vous… 
    – Amoureux ? 
    C’était ridicule ! Il était presque aussi âgé que Tranville. 
    – Je n’aurai pas de repos tant que vous ne m’aurez pas assuré que vous serez mienne. Il n’est rien que je désire davantage. 
    Nancy bondit sur ses pieds. 
    – Taisez-vous ! Je… je suis trop jeune pour cela. 
    Elle ne pouvait croire que sa mère ait cautionné cette choquante proposition. 
    – J’espère me marier un jour, monsieur. Je n’ai pas l’âge d’avoir une liaison. C’est hors de question. 
    Il eut un rire épais et pressa de nouveau sa main contre ses lèvres. 
    – Chère petite sotte ! Jamais je ne vous déshonorerais par une demande pareille. C’est le mariage que je vous propose. 
    Il se laissa tomber à ses genoux. 
    – Miss Vernon, consentez-vous à devenir ma femme ? 
    La panique serra la gorge de Nancy. 
    – Votre femme ? 
    Elle se rassit, atterrée. Ullman se releva et reprit sa place auprès d’elle, en rapprochant encore son siège. 
    – J’ai l’approbation de votre mère et de lord Tranville. C’est Lionel qui a engagé l’affaire et votre chère maman est d’accord. Il ne manque plus que votre consentement. 
    Engagé l’affaire ? Qu’est-ce que cela signifiait ? Tranville l’avait-il vendue, par hasard ? Et sa mère avait accepté une transaction pareille ! 
    – Non ! cria-t–elle. 
    Les pensées se bousculaient dans sa tête. Elle ne voulait pas de cet homme. Mais sa mère ne serait-elle pas fâchée si elle le refusait de but en blanc ? 
    – Je… je ne peux pas vous donner de réponse maintenant. S’il vous plaît, ne me pressez pas. C’est trop inattendu pour moi. 
    Il s’écarta enfin, lui laissant un peu d’espace pour respirer. 
    – Je comprends. Vous me connaissez si peu… 
    Il eut un sourire condescendant. 
    – Je suis un homme riche, vous savez. Mon titre est fort ancien et ma situation financière aussi solide que la Banque d’Angleterre ! Je suis veuf, j’ai deux charmants enfants qui ont grand besoin d’une maman… et je suis fort comme un taureau. 
    Il se tapota la poitrine. 
    – Bref, j’ai tout ce qu’il faut pour satisfaire une jeune épouse, si je peux me permettre de dire cela de moi-même. 
    La satisfaire ? Elle eut un mouvement de recul. Dieu savait qu’il ne ressemblait pas aux amoureux de ses rêves, ni aux personnages des romans dont elle charmait ses loisirs. D’abord, il était gros. Et vieux, et presque chauve… 
    Elle eut l’impression que la respiration allait lui manquer. 
    – Je vous en prie… 
    Il se leva et lui saisit le menton entre deux doigts. 
    – Très bien, ma chère. Je vous laisse pour aujourd’hui. Votre mère et lord Tranville sauront apaiser vos petites appréhensions de jeune fille, j’en suis certain. 
    Il se pencha vers elle et, pour le plus grand dégoût de Nancy, posa les lèvres sur les siennes. 
    – Ah, j’ai une autre assurance à vous donner, ajouta-t–il en se redressant. Bien entendu, je ne m’attends pas à recevoir une dot. En fait, Lionel et moi avons conclu un arrangement. Non seulement je subviendrai à vos besoins, mais à ceux de votre mère. Et je suis un homme généreux, croyez-moi. Vous ne manquerez de rien, ni l’une ni l’autre. 
    Ainsi, Tranville avait aussi négocié l’entretien de sa mère ? Mais pourquoi ? L’esprit de Nancy fonctionnait à toute allure. 
    Lord Ullman lui fit une profonde courbette, puis tourna les talons et sortit. 
    Nancy s’essuya les lèvres du revers de la main puis porta celle-ci à sa gorge, presque sur le point de se trouver mal. 
    Elle avait à peine retrouvé sa respiration quand sa mère et Tranville se précipitèrent dans la pièce. 
    – Nancy, tu ne lui as pas dit oui ? s’écria sa mère. Je suis si surprise, ma chérie. 
    Tranville avait la mine sévère. 
    – Il vous a fait une offre décente. Plus que vous n’êtes en droit d’espérer. 
    Ignorant son intervention, Nancy regarda sa mère dans les yeux. 
    – Voulez-vous vraiment que j’épouse cet homme, maman ? 
    Mary Vernon cilla. 
    – Eh bien… Oui, bien sûr. Tu serais définitivement casée, vois-tu. 
    – Et vous aussi, commença Nancy, les joues