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Les Piliers de la Terre

Les Piliers de la Terre

Titel: Les Piliers de la Terre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ken Follett
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dresser sur une extrémité. Ils s’arrêtèrent un moment. Philip s’aperçut
qu’ils avaient soulevé le pied de la caisse, si bien que le saint était
maintenant la tête en bas. Il lui adressa de silencieuses excuses. Des tisons
enflammés ne cessaient de pleuvoir autour d’eux. Chaque fois que des étincelles
atteignaient la robe de Remigius, celui-ci les tapotait avec frénésie tout en
ne cessant de jeter des coups d’œil affolés sur le toit en flammes. Philip
comprit que le courage du sous-prieur s’épuisait rapidement.
    Sur un
dernier effort des deux hommes le cercueil commença à glisser sur le bord du
tombeau ; puis l’autre extrémité toucha enfin le sol. Après quoi les
moines le remirent à l’endroit pour que le corps soit enfin dans le bon sens.
Les saints ossements devaient s’agiter à l’intérieur comme des dés dans un
cornet, songea Philip. Jamais je n’aurai approché autant du sacrilège, mais
tant pis.
    Tenant
chacun une poignée, Philip et Remigius tirèrent de nouveau le cercueil pour
l’apporter à l’abri relatif du bas-côté, laissant derrière de petits sillons
creusés par les coins de fer dans la terre battue. Les moines étaient presque
parvenus au but quand une portion du toit, des madriers en flammes et du plomb
brûlant, vint s’effondrer en plein sur le tombeau maintenant vide du saint. Le
fracas fut assourdissant, le sol trembla sous le choc et le caveau vola en
éclats. Une grosse poutre rebondit sur le cercueil, manquant de peu Philip et
Remigius et leur arrachant leur fardeau des mains. Remigius n’y tint
plus : « C’est l’œuvre du diable ! » hurla-t-il, et il
détala en courant.
    Philip
faillit bien le suivre. Si le diable était réellement à l’œuvre ici ce soir,
qui savait ce qui risquait d’arriver ? Philip n’avait jamais vu de démon,
mais il avait entendu de nombreux récits de victimes de ce genre de rencontre.
Cependant les moines sont faits pour s’opposer à Satan, et non pour le fuir, se
dit sévèrement Philip. Il jeta un long regard sur l’endroit à atteindre, puis
banda ses muscles, saisit les poignées du cercueil et poussa.
    Il parvint
à dégager la caisse de la poutre. Chose étonnante, le bois du cercueil, quoique
entamé, tenait encore bon. Il le tira un peu plus loin tandis qu’une pluie de
petites braises brûlantes se déversait sur lui. Il leva la tête. Était-ce une
silhouette qui dansait là-haut dans les flammes en se moquant, ou seulement un
tourbillon de fumée ? Il baissa les yeux et s’aperçut que le bas de sa
robe avait pris feu. Il s’agenouilla, étouffa les flammes de ses mains, puis entendit
un bruit : soit le grincement du bois torturé, soit le rire dément d’un
diable. « Saint Adolphe, protégez-moi », murmura-t-il, et il reprit
les poignées du cercueil.
    Il
avançait pouce par pouce, refusant de lever à nouveau les yeux : mieux
valait ne pas regarder le diable. Il atteignit enfin le bas-côté et se sentit
un peu plus en sûreté. Son dos moulu l’obligea à s’arrêter et à se redresser un
moment.
    Le trajet
était encore long jusqu’à la porte la plus proche, dans le transept sud, et
Philip ne savait pas s’il pouvait traîner le cercueil jusque-là avant que le
toit tout entier ne s’effondre. Voilà peut-être sur quoi comptait le diable.
Philip ne put s’empêcher de lever la tête vers le brasier. Juste au moment où
il l’apercevait dans la fumée, la silhouette à deux jambes bondit derrière une
poutre noircie. Il sait que je ne peux pas y arriver, se dit Philip, tenté
d’abandonner le saint et de s’enfuir à toutes jambes. C’est alors qu’il vit
frère Milius, Cuthbert le Chenu et Tom le bâtisseur, trois formes très solides,
accourir à sa rencontre. Son cœur bondit de joie et il fut soudain moins
convaincu d’une présence satanique dans les combles.
    « Dieu
soit loué ! s’écria-t-il. Aidez-moi. »
    Tom le
bâtisseur jeta un rapide coup d’œil au toit en flammes. Il ne parut voir aucun
démon là-haut, mais déclara : « Faisons vite. »
    Ils
prirent chacun un coin et hissèrent le cercueil sur leurs épaules. Même à
quatre, c’était un effort. « En avant ! » cria Philip. Courbés
sous le poids, ils se dirigèrent aussi vite qu’ils le pouvaient vers la porte.
    « Attendez ! »
lança Tom alors qu’ils atteignaient le transept sud. Le sol était une course
d’obstacles entre de petits feux sur lesquels ne cessaient de

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