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Les porteuses d'espoir

Les porteuses d'espoir

Titel: Les porteuses d'espoir Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Anne Tremblay
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des records de température. Henry était encore à Québec
     pour voir à ses affaires et François-Xavier travaillait à la fromagerie. Elle ne
     s’ennuyait pas de son mari et cela l’attristait. Avant, elle se serait morfondue
     en comptant les jours qui la séparaient de lui. Maintenant, le visage de l’homme
     qui venait la tourmenter lorsqu’elle se couchait, seule dans le lit du chalet,
     était celui d’Yves Boivin, son patron. Elle avait si honte de ces pensées. Yves
     la troublait. Avec lui, elle se sentait belle, intelligente, unique... Plus le
     temps passait, plus cela devenait difficile de résister au charme de son patron.
     Parfois, elle se demandait ce qu’un baiser, un seul baiser, aurait comme
     conséquence. Que lui arrivait-il ? Il fallait qu’elle trouve un moyen de ne plus
     penser au propriétaire du journal. Elle tourna son attention vers Isabelle.
     Assise à ses côtés, elle tricotait un charmant petit cache-cœur pour son futur
     bébé. Isabelle rayonnait. Julianna se trouva vieille et grosse. Elle pencha sa
     tête sur son corps. Vêtue d’un maillot de bain, son ventre flasque et ses
     bourrelets étaient apparents. La jupette du maillot dévoilait ses cuisses où des
     varices et des vergetures avaient gravé le passage du temps. Elle soupira. Où
     étaient passées ces années ? Il faudrait qu’elle se prive un peu pour perdre du
     poids.
    — Ce modèle de tricot est très joli, dit Julianna à Isabelle.
    Isabelle se contenta de sourire doucement. Elle demanda :
    — Alors, avez-vous des nouvelles d’Yvette ?
    — Tout le monde me demande ça.
    Julianna regretta tout de suite son ton revêche. Elle réalisait qu’elle
     appréciait Isabelle. Avoir une amie de nouveau, pourquoi pas ?
    — Je crois que sa carrière prend tout son temps, dit
     Julianna.
    — Vous devez être fière d’elle.
    — Très, dit Julianna. J’ai fait encadrer la photographie qui annonce son numéro
     de chant. Yvette est magnifique dans sa robe.
    — Elle a travaillé si fort quand elle était à la pension. Vraiment, de semaine
     en semaine, on la voyait s’améliorer.
    Julianna ne pouvait cacher sa fierté. Sa fille, sa fille menait une carrière à
     Paris, rien de moins ! En même temps, elle s’imaginait, elle, vivre cette belle
     aventure, si elle était plus jeune, si…
    — Un jour, j’irai la voir…, rêva tout haut Julianna.
    — J’espère que mon bébé sera une fille, dit Isabelle.
    — Ah oui ? Pourtant, tout le monde rêve d’avoir un garçon comme premier
     enfant.
    — On dit que des filles, c’est plus facile à élever.
    — Ce n’est pas vrai. Yvette m’a fait tourner en bourrique avec son caractère.
     Elle ne fonçait jamais assez vite ni assez loin à son goût dans la vie. Laura
     était différente, mais pas plus facile. Elle a toujours su qu’elle deviendrait
     religieuse.
    — Plus tard, je donnerai un fils à Henry.
    — C’est la nature qui décide.
    Julianna se leva.
    — Je vais aller me tremper un peu les orteils.
    — J’irais si j’étais moins frileuse.
    — Pourtant, à la chaleur qu’il fait…
    — C’est à cause de ma condition.
    Julianna descendit jusqu’à la grève. Elle avait chaud, s’ennuyait tout à coup
     de ses filles, de Pierre… Elle alla rejoindre Adélard, Zoel et Hélène.
    — Attention, une baleine s’en vient vous arroser !

    — Une baleine, Pierre, regarde, une baleine !
    — Ben oui, ça fait dix fois que tu me jures que t’en vois une. C’est encore
     juste une crête de vague.
    — Non, là je suis certaine, regarde !
    Cette fois, Pierre vit le dos bombé noir, avec une petite nageoire, qui sortait
     et rentrait dans l’eau de la mer. Il manœuvra La Joséphine afin de la
     mener en direction du cétacé. Les yeux de son épouse brillaient
     d’émerveillement.
    — Une autre, s’écria-t-elle, il y en a d’autres avec elle.
    Effectivement, Pierre compta au moins quatre dos sortant à intervalles
     réguliers à la surface de l’eau. Quel bonheur de sentir le vent de la mer sur
     son visage, le soleil qui réchauffe, l’odeur de liberté, une sensation de
     pouvoir ! Cela lui avait pris quelques jours avant de savoir naviguer. Mais La Joséphine était malléable. Large, elle offrait une bonne
     flottaison. Elle n’était pas le plus rapide des bateaux de pêche, mais cela
     était parfait. Pour un novice, elle était l’embarcation rêvée. Même Mélanie, qui
    

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