Les quatre livres des stratagèmes
s’attendaient à rien de
semblable. Après la victoire, ses soldats lui ayant demandé ce qui
leur avait rendu cette conquête si facile, il leur répondit que le
succès était acquis dès le moment où ils avaient franchi en deux
jours la distance de quatre journées de marche [91] .
II. Tromper les assiégés.
1 Domitius Calvinus, assiégeant Lima,
ville de Ligurie, défendue non seulement par sa position naturelle
et par ses ouvrages de fortification, mais encore par une garnison
excellente, menait souvent ses troupes autour des murs de la place,
et les faisait ensuite rentrer au camp. Cette manœuvre habituelle
fît croire aux assiégés que ce n’était, de la part des Romains,
qu’un simple exercice, et leur ôta toute crainte d’une tentative.
Mais, changeant tout à coup sa promenade en attaque, Domitius
escalada les remparts et força les habitants à se rendre.
2 Le consul. C. Duilius, en conduisant
souvent à la manœuvre ses soldats et ses rameurs, réussit à
n’inspirer aux Carthaginois aucune méfiance à l’égard de ses
exercices jusque-là inoffensifs ; et, s’approchant tout à coup
avec sa flotte, il se rendit maître de la place.
3 Hannibal s’empara de plusieurs villes
d’Italie après y avoir envoyé, sous le costume romain, quelques-uns
des siens qui, pendant de longues guerres en ce pays, avaient
appris la langue latine.
4 Les Arcadiens, assiégeant un château de
Messénie, se fabriquèrent des armes semblables à celles des
ennemis ; et, dans le temps où ils savaient que la garnison
devait être changée, ils prirent le costume des troupes attendues,
déguisement qui les fit admettre comme amis, et se rendirent
maîtres de la place en exterminant la garnison.
5 Cimon, général athénien, voulant
surprendre une ville de Carie, mit le feu pendant la nuit,
lorsqu’on s’y attendait le moins, à un temple de Diane vénéré dans
ce pays, ainsi qu’à un bois sacré situé hors des remparts ;
et, quand les habitants furent sortis en foule pour éteindre
l’incendie, Cimon prit la ville, restée sans défenseurs.
5 Alcibiade, général athénien, faisant le
siège d’Agrigente, ville bien fortifiée, demanda aux habitants une
assemblée générale, comme pour y traiter d’affaires qui
intéressaient les deux parties belligérantes, et les harangua
longtemps au théâtre, où, selon l’usage des Grecs, avaient lieu les
réunions de ce genre. Tandis que, sous prétexte de délibération, il
retenait la multitude, les Athéniens, apostés à cet effet,
s’emparèrent de la ville, qui n’était point gardée.
6 Épaminondas, général thébain, ayant vu
pendant un jour de fête, en Arcadie, les femmes d’une ville ennemie
se répandre confusément hors des murs, envoya parmi elles un grand
nombre de ses soldats qui avaient pris des habits de femmes, et
qui, à l’aide de ce déguisement, entrèrent dans la ville à nuit
tombante, s’en rendirent maîtres, et ouvrirent les portes à leurs
compagnons.
7 Aristippe de Lacédémone, un jour que
les Tégéates étaient sortis en foule de leur ville pour célébrer
une fête de Minerve, chargea des bêtes de somme de sacs à blé
remplis de paille, et les fit conduire par des soldats qui, ayant
l’air de marchands, entrèrent dans la ville sans être observés, et
ouvrirent les portes [92] aux
Lacédémoniens.
9 Antiochus, assiégeant le château de
Suenda, en Cappadoce, s’empara des bêtes de charge sorties pour
aller à la provision, tua les valets qui les conduisaient, et
revêtit de leurs habits des soldats qu’il envoya à leur place comme
ramenant du blé. Leur costume ayant trompé les gardes, ils
pénétrèrent dans le château et y firent entrer l’armée
d’Antiochus.
10 Les Thébains, ne pouvant s’emparer de
vive force du port de Sicyone, remplirent de soldats armés un
vaisseau sur lequel ils étalèrent des marchandises, comme sur un
navire de commerce, afin de tromper l’ennemi ; puis ils
apostèrent derrière les murs les plus éloignés du port, quelques
hommes auxquels ils avaient donné l’ordre de simuler une rixe avec
d’autres gens qu’ils faisaient débarquer sans armes. Les habitants
de Sicyone étant accourus pour apaiser cette querelle, les
vaisseaux thébains prirent le port resté sans défense, ainsi que la
ville.
11 Timarque, général étolien, ayant tué
Charmade, lieutenant du roi Ptolémée, se couvrit du manteau et du
bonnet macédonien de ce chef [93] .
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