Les quatre livres des stratagèmes
À
l’aide de ce déguisement, il fut reçu pour Charmade dans le port de
Samos, dont il se rendit maître.
III. Avoir des intelligences dans la
place.
1 Le consul Papirius Cursor, faisant le
siège de Tarente, que défendait Milon avec une garnison d’Épirotes,
promit à ce chef la vie sauve, pour lui et pour ses compatriotes,
s’il lui facilitait la prise de la ville. Séduit par cette offre,
Milon se fit envoyer en mission par les Tarentins vers le
consul ; d’après les promesses qu’il rapporta, scellées par un
traité, les habitants s’abandonnèrent à une trop confiante
sécurité, et la ville, dès lors mal gardée, fut livrée à Papirius
Cursor.
2 Au siège de Syracuse,
M. Marcellus, ayant gagné un certain Sosistrate, apprit de lui
que la garde serait moins vigilante que de coutume pendant un jour
de fête, où Épicyde devait faire au peuple des largesses de vin et
de bonne chère. Ayant donc épié ce moment de plaisir et, par
conséquent, de négligence, Marcellus franchit les remparts, égorgea
les sentinelles, et ouvrit à l’armée romaine cette ville illustrée
par d’éclatantes victoires.
3 Tarquin le Superbe, ne pouvant se
rendre maître de Gabies, envoya dans cette ville son fils Sestus,
après l’avoir fait battre de verges. Celui-ci, se plaignant de la
cruauté de son père, engagea les Gabiens à tirer profit de son
ressentiment ; et, quand il fut investi du commandement de
leur armée, il livra la ville à son père.
4 Cyrus [94] , roi de
Perse, avait un courtisan d’une fidélité éprouvée, nommé Zopyre,
qui, s’étant fait à dessein mutiler le visage, passa chez les
ennemis. Il se plaignit des outrages dont il portait les marques,
et on le crut irréconciliable ennemi de Cyrus, opinion qu’il
confirma en se plaçant, dans toutes les rencontres, à la tête des
combattants, et en dirigeant les décharges de traits contre Cyrus
lui-même ; puis, lorsqu’on lui eut confié la défense de
Babylone, il livra la ville à son roi.
5 Philippe, à qui les habitants de Sana
refusaient l’entrée de leur ville, corrompit Apollonius, leur chef,
et l’engagea à placer dans l’ouverture même de l’une des portes,
une voiture chargée de pierres de taille Cet ordre exécuté,
Philippe donna le signal de l’attaque, et défit par surprise les
assiégés, qui étaient accourus en désordre pour fermer leur porte
embarrassée.
6 Hannibal, assiégeant Tarente, alors
défendue par une garnison romaine, sous le commandement de Livius,
gagna un Tarentin nommé Cononée, qui, pour tromper les habitants,
sortait la nuit sous prétexte d’aller à la chasse, ce que la
présence de l’ennemi rendait impossible pendant le jour. Quand il
était hors des murs, les Carthaginois lui fournissaient secrètement
des sangliers, qu’il présentait ensuite à Livius comme provenant,
de sa chasse. Ces sorties, souvent renouvelées, éveillant de moins
en moins l’attention, Hannibal, une certaine nuit, déguisa des
Carthaginois en chasseurs, et les mêla à ceux qui accompagnaient
Cononée. Ils entrèrent dans la ville chargés de gibier, se jetèrent
aussitôt sur les gardes et les égorgèrent ; ensuite ils
brisèrent la porte, et introduisirent Hannibal avec ses troupes,
qui firent main basse sur tous les Romains, à l’exception de ceux
qui s’étaient réfugiés dans la citadelle.
7 Lysimaque, roi de Macédoine, faisait le
siège d’Éphèse, et cette ville était secourue par Mandron, chef de
pirates. Comme celui-ci amenait souvent au port ses vaisseaux
chargés de butin, Lysimaque parvint à le gagner, et envoya avec lui
les plus braves de ses soldats, que le pirate fit entrer dans
Éphèse les mains liées, comme des prisonniers. Quelque temps après,
ces mêmes hommes prirent des armes dans la citadelle, et livrèrent
la ville à leur roi.
IV. Des moyens de réduire l’ennemi par
famine.
1 Fabius Maximus, ayant ravagé le
territoire de Capoue, et voulant ôter à cette ville tout espoir de
soutenir un siège, se retira au moment des semailles, afin de
laisser les habitants répandre dans leurs champs le blé qui leur
restait ; puis il revint sur ses pas, fit fouler aux pieds les
semences, qui déjà étaient en herbe, et la famine le rendit maître
du pays [95] .
2 Antigone en fit autant aux
Athéniens.
3 Denys voulant, après s’être emparé de
plusieurs villes, attaquer celle de Rhegium, qui avait une garnison
nombreuse, feignit de vouloir
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