Les quatre livres des stratagèmes
vaincu
les Carthaginois, et craignant que ses prisonniers, dont le nombre
était considérable, ne fussent pas gardés avec assez de vigilance,
parce que l’heureuse issue du combat pouvait engager ses soldats à
faire festin et à négliger le devoir, annonça faussement qu’il
devait être attaqué la nuit suivante par la cavalerie ennemie. Dans
cette attente, les postes veillèrent avec plus de soin que de
coutume.
7 Le même général, voyant que ses
troupes, auxquelles le succès inspirait trop de sécurité, étaient
ensevelies dans le sommeil et dans le vin, envoya chez les ennemis
un espion qui, après s’être fait passer pour déserteur, les avertit
que les Syracusains leur avaient tendu des embûches de tous côtés,
et les retint dans leur camp par la crainte. Lorsque, plus tard,
ils se furent mis en route, les troupes d’Hermocrate les
poursuivirent, les culbutèrent dans des ravins, et les défirent une
seconde fois.
X. Si l’on a essuyé des revers, il faut y
remédier.
1 T. Didius, après avoir soutenu contre
les Espagnols un combat opiniâtre, qui fut interrompu par la nuit,
et dans lequel il périt beaucoup de monde de part et d’autre, eut
soin de donner la sépulture, pendant cette nuit même, à une grande
partie de ses morts. Les Espagnols, étant venus le lendemain pour
rendre le même devoir aux leurs, et les ayant trouvés plus nombreux
que ceux de leurs ennemis, conclurent de cette différence qu’ils
étaient vaincus, et se soumirent aux conditions du général
romain.
2 L. Marcius, chevalier romain, qui
commandait les restes de l’armée des deux Scipions, se trouvant
dans le voisinage de deux camps carthaginois éloignés de quelques
milles l’un de l’autre, encouragea ses soldats et attaqua, au
milieu de la nuit, le camp le plus rapproché. Il tomba sur les
ennemis au moment où, se reposant sur leur victoire, ils étaient
peu sur leurs gardes, et n’en laissa pas échapper un seul qui pût
annoncer leur désastre ; puis, après un instant de repos donné
à ses troupes, il alla, dans la même nuit, devançant le bruit de
son expédition, fondre sur l’autre camp. Par le double échec qu’il
fit éprouver aux Carthaginois, il rétablit en Espagne la domination
du peuple romain.
XI. Maintenir dans le devoir ceux dont la
fidélité est douteuse.
1 P. Valerius, craignant une révolte des
habitants d’Épidaure, parce qu’il n’avait que peu de troupes dans
cette ville, prépara des jeux gymniques loin des murs. Presque
toute la population étant sortie pour jouir de ce spectacle, il
ferma les portes, et ne laissa rentrer les Épidauriens qu’après
s’être fait donner des otages par les premiers citoyens.
2 Cn. Pompée, qui se méfiait de ceux de
Catane, et craignait qu’ils ne reçussent pas ses troupes en
garnison, les pria de permettre à ses malades de séjourner
temporairement dans leur ville pour se rétablir ; et, à l’aide
de ses meilleurs soldats, qu’il y envoya en les faisant passer pour
des malades, il se rendit maître de la place, et la retint dans
l’obéissance.
3 Alexandre, marchant vers l’Asie, après
avoir vaincu et soumis les Thraces, et craignant que ces peuples ne
reprissent les armes après son départ, emmena avec lui, comme à
titre d’honneur, leurs rois, leurs généraux, et tous ceux qui
paraissaient avoir à cœur leur liberté perdue ; puis il mit le
peuple sous la domination de plébéiens qui, lui étant redevables de
leur élévation, ne voulurent rien changer à ce qu’il avait
fait ; et la nation ne put rien entreprendre, n’ayant plus ses
véritables chefs.
4 Antipater, voyant arriver les premières
troupes des Nicéens, qui, sur un bruit de la mort d’Alexandre,
étaient accourus pour ravager ses provinces, feignit d’ignorer
leurs intentions, les remercia d’être ainsi venus au secours
d’Alexandre contre les Lacédémoniens, et ajouta qu’il en
informerait le roi, les engageant, au reste, à retourner chez eux,
parce qu’il n’avait pas besoin de leurs services pour le moment.
Cet artifice écarta le danger, que rendait imminent le nouvel état
des choses.
3 Scipion l’Africain, à qui l’on
présenta, en Espagne, entre autres captives, une jeune fille en âge
d’être mariée, et dont la rare beauté attirait tous les regards,
ordonna qu’elle fût gardée avec soin, et la rendit à son fiancé,
qui se nommait Allucius. En outre, l’or que les parents de cette
jeune fille avaient
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