Les refuges de pierre
des chefs Zelandonii qu’elle avait rencontrés
semblaient à leur place. Les Cavernes les choisissaient en général avec
discernement, mais, si Joharran s’était révélé incapable d’assumer son rôle, sa
Caverne l’aurait tout bonnement remplacé par un autre, plus compétent. Sans
cérémonie : il n’y avait pas de procédure pour destituer un chef, les
autres auraient simplement cessé de le suivre.
Broud, lui, n’avait pas été choisi. Dès sa naissance, il était
destiné à devenir chef. Parce qu’il était né de la compagne d’un chef, on
supposait qu’il aurait en mémoire les qualités pour tenir ce rôle. Et il les
possédait peut-être, mais à des degrés divers. Certains traits utiles à un
chef, comme la fierté, le besoin d’être respecté, étaient accentués chez Broud.
La fierté de Brun venait des prouesses de son clan, qui lui valaient aussi d’être
respecté. Celle de Broud confinait à un orgueil démesuré, il voulait être
respecté pour ses exploits. Bien que Brun se fût efforcé de l’aider, Broud n’était
jamais devenu un chef aussi capable que lui. Comme la réunion touchait à sa
fin, Ayla murmura à Jondalar :
— J’ai envie de partir devant avec Whinney pour essayer de
trouver les bisons. Tu crois que Joharran verrait un inconvénient à ce que je
demande à Thefona où elle les a aperçus pour la dernière fois ?
— Non, je ne crois pas, mais pose-lui la question toi-même.
Ils s’approchèrent tous deux du chef et, quand Ayla lui exposa son plan, il
répondit :
— Tu penses pouvoir repérer ces bisons ?
— Je ne sais pas, mais ils ne doivent pas être très loin,
et Whinney est plus rapide que n’importe quel chasseur.
— Tu n’avais pas l’intention de chasser le grand cerf avec
nous ?
— Si, et je pense pouvoir être de retour à temps.
— C’est vrai que j’aimerais bien savoir où sont les bisons,
admit Joharran. Allons interroger Thefona.
— J’irai avec Ayla, dit Jondalar. Elle ne connaît pas
encore la région, elle pourrait ne pas comprendre les indications de Thefona.
— Allez-y, mais j’espère que vous serez de retour à temps.
Je voudrais voir vos lance-sagaies en action. S’ils sont à moitié aussi
efficaces que vous le prétendez, cela pourrait changer beaucoup de choses.
Ayla et Jondalar partirent au galop avec Loup tandis que le
reste des chasseurs continuait à remonter la Rivière des Prairies. Le
territoire des Zelandonii offrait un paysage spectaculaire sculpté en relief,
avec des parois abruptes, de larges vallées, des collines ondulantes et de
hauts plateaux. Les rivières serpentaient parmi les prés, bordées d’une galerie
d’arbres, ou coulaient au pied de hautes falaises. Les habitants de la région
étaient habitués à ce paysage varié et s’y déplaçaient aisément, qu’ils dussent
gravir une colline escarpée, escalader une paroi quasi verticale, sauter sur
des pierres glissantes pour traverser une rivière ou nager contre son courant,
marcher sur une longue file entre une paroi rocheuse et un torrent bouillonnant
ou se déployer dans une plaine découverte.
Les chasseurs se divisèrent en petits groupes quand ils s’engagèrent
dans l’herbe haute mais encore verte de la vallée. Joharran ne cessait de
guetter le retour de son frère et de sa curieuse escorte – une
étrangère, deux chevaux et un loup – dans l’espoir qu’ils seraient de
retour à temps, bien qu’il sût que cela ne changerait pas grand-chose. Avec
autant de chasseurs pour une si petite harde, ils réussiraient sans difficulté
à abattre tous les animaux qu’ils désiraient.
Au milieu de la matinée, les chasseurs repérèrent le cerf aux
bois immenses et s’arrêtèrent pour dresser leur plan. Joharran entendit un
bruit de sabots, se retourna. Avec une exactitude involontaire mais parfaite,
Ayla et Jondalar venaient d’arriver.
— Nous les avons trouvés ! annonça Jondalar dans un
murmure après être descendu de cheval. (Il aurait crié s’il n’avait remarqué la
présence du grand cerf à proximité.) Ils ont de nouveau changé de direction, ils
vont vers l’enceinte ! Je suis sûr que nous pourrions leur faire accélérer
l’allure.
— Ils sont loin d’ici ? s’enquit Joharran. Nous devons
marcher, nous. Nous n’avons pas de chevaux.
— Pas très loin, répondit Ayla. Si tu préfères le bison au
cerf, tu peux encore changer d’avis.
— Grand frère, tu pourrais
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