Les refuges de pierre
leurs
petits. Ils peuvent se tenir sur la queue au-dessus de l’eau – je l’ai
vu – et l’on dit même qu’ils ont leur propre langue. Les hommes qui
vivent là-bas leur donnent le nom de dauphins, et certains prétendent parler
leur langue. Ils ont poussé des sortes de cris aigus pour m’en convaincre.
« On raconte maintes histoires et légendes à leur sujet,
poursuivit le Maître du Troc. On dit qu’ils aident les pêcheurs en dirigeant le
poisson vers leurs filets, et même qu’ils ont sauvé la vie d’hommes dont le
bateau s’était retourné loin de la côte. Les Légendes Anciennes de ce peuple
racontent que jadis tous les êtres vivaient dans la mer. Certains sont venus
sur terre, ceux qui sont restés sont devenus des dauphins. Les hommes de là-bas
les appellent parfois « cousins », et leur Zelandoni – c’est
elle qui m’a donné cette plaque – dit qu’ils nous sont apparentés.
Son peuple vénère le dauphin presque autant que la Mère. Chaque famille possède
une donii, mais tout le monde a aussi un objet-dauphin, une gravure comme
celle-ci ou une partie de l’animal, un os ou une dent. Cela porte chance.
— Et tu dis que j’ai des histoires intéressantes à
raconter, Willamar ! fit Jondalar. Des poissons qui respirent et se
tiennent sur la queue ! J’ai presque envie de partir avec toi.
— Peut-être l’année prochaine, quand j’irai faire du troc
pour avoir du sel. Ce n’est pas un très long voyage, surtout comparé au tien.
— Je croyais t’avoir entendu dire que tu ne voulais plus
voyager, lança Marthona à Jondalar. Voilà qu’à peine rentré, tu penses à
repartir. Tu as la bougeotte, comme Willamar ?
— Les expéditions de troc ne sont pas des Voyages, souligna
Jondalar. Je ne suis pas prêt à me remettre en route maintenant, sauf pour
aller à la Réunion d’Été : mais un an, c’est long.
Folara et Jaradal, blottis contre Loup sur le lit de la jeune
fille, s’efforçaient de rester éveillés. Ils ne voulaient rien manquer, mais la
chaleur de l’animal et le bourdonnement des voix finirent par les endormir.
Le jour suivant se leva sous un crachin gris qui ne parvint
pas à altérer l’enthousiasme de la Caverne au moment du départ. Bien qu’elle
eût veillé tard, la famille de Marthona se leva de bon matin. Après avoir avalé
la nourriture préparée la veille, on finit les paquets. La pluie faiblit, le
soleil tenta de percer à travers les nuages, mais l’humidité accumulée pendant
la nuit sur les feuilles et dans les flaques rendait l’air froid et brumeux.
Quand tous ceux qui partaient se furent rassemblés sur le devant
de la terrasse, Joharran donna le signal du départ. Le chef ouvrant la marche,
les Zelandonii prirent la direction du nord, descendirent vers la Vallée des
Bois. Le groupe était nombreux, remarqua Ayla, bien plus nombreux que celui du
Camp du Lion lorsqu’il se rendait à la Réunion d’Été mamutoï. Il y avait encore
beaucoup de gens qu’elle ne connaissait pas très bien, mais du moins se
rappelait-elle à peu près le nom de chacun.
Elle se demandait quel chemin Joharran prendrait. Après la
promenade à cheval qu’elle avait faite avec Jondalar, elle savait qu’au début
la plaine inondable de la rive droite – le côté de la Neuvième
Caverne – était large. S’ils remontaient la Rivière en suivant,
malgré les méandres, la direction du nord-est, ils longeraient des arbres
proches de la berge. De chaque côté, une vaste étendue herbeuse séparait le
cours d’eau des hauteurs vers lesquelles elle montait en pente douce. Un peu
plus loin, l’eau serrait une paroi abrupte de l’autre côté, la rive gauche, qui
se trouvait à main droite quand on se dirigeait vers la source. Rive gauche et
rive droite désignaient toujours les côtés d’un cours d’eau quand on se
déplaçait dans le sens du courant.
Jondalar lui avait expliqué que la communauté Zelandonii la plus
proche ne se trouvait qu’à une faible distance de la Neuvième Caverne mais qu’il
faudrait un radeau pour terminer le voyage s’ils restaient près de la Rivière,
parce que son cours changeait de direction. En aval, la configuration du
terrain forçait l’eau à frôler la paroi de la rive droite, leur côté, sans même
laisser d’espace pour un étroit sentier. Aussi les Zelandonii de la Neuvième
Caverne prenaient-ils un chemin qui s’écartait de la Rivière lorsqu’ils
rendaient visite
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