Les reliques sacrées d'Hitler
très bien pu avoir été occupé par une tribu germanique qui pratiquait le paganisme, comme lâindiquaient les gravures sur les murs dâune des tours du château. De même, le III e Reich ne pouvait être compris comme un mouvement idéologique et politique détaché de ce qui lâavait précédé. Le sujet de lâexposé de Horn, la Sainte Lance, permettait de faire comprendre comment les trésors dâun empire pouvaient devenir des talismans sacrés pour le suivant.
Le lieutenant nâavait pas besoin de notes. Non content dâavoir obtenu son doctorat en histoire de lâart, son père et son grand-père avaient été tous deux des pasteurs luthériens, son frère aîné, Rudolf, un honorable professeur dâhistoire germanique à lâuniversité de Heidelberg, et son beau-frère, Erich Maschke, occupait la chaire du département dâarchéologie à lâuniversité de Leipzig. Au dîner, il arrivait souvent que la conversation tourne mal, car son frère et son beau-frère avaient pris leur carte du parti nazi, mais, en dépit des clivages politiques et de la menace dâune guerre mondiale imminente, toute la famille connaissait par cÅur les légendes et les traditions inhérentes à la Sainte Lance. Ils comprenaient lâaura de sainteté qui entourait lâobjet et pourquoi son pouvoir emblématique avait perduré à travers les siècles, depuis les temps bibliques jusquâà aujourdâhui.
Horn commença ainsi son exposé, comme il le ferait, des années plus tard, à Berkeley.
« La question nâest pas de savoir si la lance de Longin trouvée dans le bunker nazi est bien celle qui a transpercé Jésus, dit Horn. Peut-être un jour pourra-t-on lâanalyser pour déterminer une fois pour toutes si câest ou non la vraie lance. Lâimportant est de savoir que des générations de chrétiens allemands lâont vénérée comme si elle était authentique et que câest encore le cas aujourdâhui. »
Cette vénération, expliqua Horn, était liée au moment le plus significatif de lâhistoire du Christ : au moment où Jésus, couvert de sang et rudoyé, avec une couronne dâépines sur la tête, fut cloué sur la croix. Cela sâétant produit le vendredi avant Pâques et la loi juive interdisant les exécutions les jours saints, le corps de Jésus devait être enlevé pour quâil soit enterré avant le coucher du soleil. Pour sâassurer que Jésus était mort, un soldat romain, qui était au pied de la croix, enfonça sa lance profondément dans le flanc droit de Jésus, dâoù sâécoulèrent du sang et de lâeau.
Dans le verset 34, chapitre XIX de lâévangile selon Jean, souligna Horn, la Bible nâidentifie pas le soldat qui avait brandi ce qui devint la Sainte Lance. Le nom de Longin apparut pour la première fois dans un ensemble de textes chrétiens connu sous le nom dâapocryphes de la Bible, où il est décrit comme un centurion dévoué à sa légion avant quâune vision déficiente ne mette un terme à sa carrière de combattant.
En reconnaissance pour ses bons services, Ponce Pilate avait confié à Longin des tâches moins exigeantes sur le mont du Calvaire, dont sa participation à la crucifixion de Jésus. Comme il est décrit dans la Bible et commenté dans les apocryphes, lorsque Longin retira sa lance du flanc droit de Jésus, du sang et de lâeau coulèrent le long de la hampe jusque dans les yeux du centurion, le lavant de ses péchés et lui redonnant la vue. Inspiré par la dignité et le courage de Jésus dans ses dernières heures et transformé par la guérison miraculeuse, Longin sâagenouilla devant la croix, supplia le Christ de le pardonner et proclama sa divinité à haute voix.
Longin était un autre homme quand il quitta le mont du Calvaire. Plus jamais il ne servirait Ponce Pilate et les légions romaines. Après avoir quitté lâarmée, il rechercha la compagnie des disciples de Jésus. Contrairement à la plupart, Longin était un citoyen romain et pouvait se déplacer librement. Pendant les vingt-huit années qui suivirent, il
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