Les révoltés de Cordoue
lui.
— Tous les deux, ensemble, exigea-t-elle. Je t’aime.
Elle lui tirait gentiment les cheveux tandis qu’il la
conduisait à l’alcôve.
— Ne me quitte pas. Aime-moi. Reste à l’intérieur de
moi…
Allongés, toujours unis, ils s’embrassèrent et se
caressèrent jusqu’au moment où Fatima sentit le désir renaître chez Hernando.
Alors ils refirent l’amour, avec frénésie, comme si c’était la première fois.
Puis elle se leva et prépara de la citronnade et des fruits secs, qu’elle
servit sur le lit à Hernando. Et pendant qu’il mangeait, elle lui lécha tout le
corps, ondulant comme une chatte. Alors il joua avec elle, essayant de
l’atteindre avec la langue à mesure qu’elle se glissait d’un côté et de
l’autre.
Et cette nuit-là, tous deux parcoururent ensemble, sans
relâche, les chemins millénaires de l’amour et du plaisir.
35.
8 décembre
1573,
fête de la
Conception de Notre-Dame
Sept mois avaient passé depuis leur mariage. Aisha avait purgé
ses soixante jours de prison avant d’être remise en liberté. Hernando avait
obtenu l’autorisation de l’administrateur des écuries pour qu’elle puisse, avec
Shamir, partager leur habitation au-dessus des box. Fatima était enceinte de
cinq mois et Saeta avait fini par se rendre, sous les soins d’Hernando et de
ses caresses. Il ne lui avait plus parlé en arabe. Au cours de leur nuit de
noces, alors qu’ils étaient étendus tous deux sur le lit, en sueur, le jeune
homme avait expliqué à Fatima ce qui s’était passé avec le poulain et don
Diego.
— Un chrétien sera toujours un chrétien, avait-elle
alors assuré, sur un ton absolument différent de celui qu’elle avait employé
tout au long de la nuit, méfiante face à l’affirmation qui prétendait qu’aux
écuries royales, la seule religion, c’était les chevaux. Maudits
soient-ils ! Ne t’y trompe pas, mon amour : avec ou sans chevaux, ils
nous détestent et nous détesteront toujours.
Puis Fatima avait cherché une nouvelle fois le corps de son
époux.
Hernando travaillait du lever au coucher du soleil. Deux
fois par jour, il devait promener les poulains et les dresser. Il utilisait un
long licou autour duquel les animaux tournaient avec un bâton vert enduit de
miel dans la bouche, dont la grosseur devait augmenter au fur et à mesure,
jusqu’à atteindre celle d’une lance, pour les habituer au mors en fer qu’ils
seraient un jour contraints de supporter ; et avec des sacs de sable sur
le dos pour s’exercer au poids d’un cavalier. Dans les box, il les lavait,
frottant énergiquement leur corps tout entier avec une époussette. Il soulevait
leurs pattes et nettoyait leurs sabots, les préparant au moment où ils seraient
ferrés. Saeta fut le premier à accepter l’exercice dans le patio avec le sac de
sable sur le dos et le gros bâton entre les dents.
En dehors de ces tâches, souvent, comme l’avait fait
Rodrigo, un cavalier lui demandait de l’accompagner en ville.
Il aimait son travail, et les poulains respiraient la santé
et les bonnes manières. Il avait surpris les valets d’écurie en proposant
plusieurs types d’alimentation complémentaire à la paille et à l’avoine, que
d’ordinaire les poulains consommaient : Saeta, fougueux, devait manger une
pâte composée de fèves ou de pois chiches bouillis avec du son et une pincée de
sel pendant la nuit ; un autre poulain, timide, était tenu de compléter
son alimentation avec du blé ou du seigle, pareillement bouilli au cours de la
nuit précédente pour former une pâte à laquelle on ajoutait également du son,
du sel et, dans ce cas, de l’huile. Face à ces recommandations, qui soulevaient
quelques réticences par rapport aux coutumes des écuries, don Diego avait
estimé qu’il ne fallait en aucune façon qu’elles nuisent aux poulains, et il
avait pour cela demandé conseil à Hernando. Les résultats ne s’étaient pas fait
attendre : Saeta, sans perdre sa fougue, s’était apaisé, et les poulains
pusillanimes avaient gagné en courage et en joie de vivre. Cavaliers, valets
d’écurie, maréchaux-ferrants et selliers respectaient Hernando, et
l’administrateur lui accordait avec diligence tout ce qu’il demandait. Ainsi il
avait obtenu une recommandation pour qu’Aisha puisse travailler au tissage de
la soie.
Ce 8 décembre 1573, jour de la Conception de
Notre-Dame, les inquisiteurs avaient prévu de célébrer un autodafé dans
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