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Les révoltés de Cordoue

Les révoltés de Cordoue

Titel: Les révoltés de Cordoue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ildefonso Falcones
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expérience de muletier, toujours
vers le nord, se cachant dès qu’il percevait un mouvement, méfiant en
permanence bien qu’il eût désormais la conviction qu’Umar ne le poursuivrait
pas sur ces terres sauvages. Les deux chevaux étaient d’une immense valeur et
il trouva à l’intérieur du coffre une seconde fortune, composée de pierres
précieuses et de différentes pièces d’or : dirhams, rubis, zianas,
pistoles, sultanines et écus espagnols.
    Tétouan était une petite ville enclavée au pied du mont
Dersa, dans la vallée de l’oued Mardi. Elle se trouvait seulement à six milles
de la Méditerranée et à près de dix-huit du détroit de Gibraltar, un point
stratégique pour le trafic naval. Fertile, elle jouissait d’une eau abondante,
provenant de la montagne du Hauz et de la cordillère du Rif. La médina
fortifiée de la ville avait été reconstruite et repeuplée par les musulmans qui
avaient fui après la reddition de Grenade aux Rois Catholiques. Par conséquent,
ses habitants étaient, en grande majorité, maures.
    Brahim rompit sa promesse de ne plus jamais jouer les
bouffons et, après avoir caché chevaux et argent dans la montagne, il se
présenta en ville par la porte de Bab Mqabar, près du cimetière, sous
l’apparence d’un mendiant fou, avec seulement quelques pièces dissimulées sur
lui. L’esprit andalou palpable dans l’air, la façon de parler et de s’habiller
des gens, la distribution des rues comme dans l’Albaicín de Grenade ou tout
autre petit village des Alpujarras, le convainquit aussitôt que c’était
l’endroit où il devait vivre. Il persuada un gamin débraillé, aux yeux vifs,
ronds et grands, au crâne rasé à cause de la gale, de le guider à travers la ville.
Il surprit les marchands du souk et le gamin en achetant des habits neufs et
tout ce dont il avait besoin pour se présenter avec la plus grande distinction.
Il acheta également des vêtements pour Nasi, qui était le nom du garnement. Il
ne pouvait entrer dans Tétouan sous cet aspect d’indigent, alors qu’il
voyageait avec deux magnifiques chevaux et un coffre rempli d’or. Il revint
ensuite avec le gamin étonné à l’endroit où il avait caché les chevaux, se lava
dans une rivière, obligeant Nasi à faire de même, s’habilla, étendit une natte
sur le cheval d’Umar, qui lui servirait de monture, et chargea les sacs sur
celui de Yusuf, afin que Nasi, un turban sur la tête, le tire par la bride
comme s’il était son serviteur. Dès que Brahim lui promit qu’il aurait à manger
tous les jours, le garçon accepta.
    — Mais si tu racontes quoi que ce soit sur moi, je
t’égorge, le menaça-t-il en lui montrant la lame de la dague.
    Nasi ne parut pas impressionné à la vue du couteau, mais sa
réponse fut sincère :
    — Je le jure, par Allah.
    Ils louèrent une belle maison à un étage, qui disposait d’un
jardin à l’arrière.
    Dans la seconde
partie du XVI e  siècle, au moment où Brahim s’établissait en
ville, le commerce maritime se transforma totalement. Depuis Martil, le port de
Tétouan, de nombreuses embarcations levaient l’ancre, généralement petites,
pour attaquer les côtes espagnoles, rivalisant ainsi avec les autres villes
corsaires des Barbaresques : Alger, Tunis, Sargel, Vélez, Larache ou Salé.
Mais au cours du dernier quart de ce siècle, l’arrivée de grands et ronds
navires français, anglais ou hollandais en Méditerranée poussa les armateurs
d’Alger à remplacer leurs délicates galiotes et galères à coques fines et
légères par de grands voiliers ronds, armés de dizaines de canons, afin
d’égaler ces nouvelles embarcations, voire de les dépasser. Par conséquent, la
zone d’influence des seigneurs de la mer algériens finit par toucher jusqu’aux
coins les plus reculés de la Méditerranée, aussi éloignés que pussent être
leurs ports, et même de l’Atlantique : Angleterre, France, Portugal et la
très lointaine Islande.
    Les rapides actions surprises de pillage auxquelles se
livrait la petite flotte qui accostait sur les côtes espagnoles, sans cesser
complètement, ne représentèrent plus alors pour ces grands peuples corsaires
qu’une activité secondaire. Ainsi, une fois établi à Tétouan, Brahim devint
l’armateur de trois navires de douze rangées de rameurs chacun, à une condition
qu’acceptèrent les capitaines de ses bateaux : il participerait
personnellement aux expéditions car, s’il ne

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