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Les révoltés de Cordoue

Les révoltés de Cordoue

Titel: Les révoltés de Cordoue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ildefonso Falcones
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propriété à libérer. Pour cette raison, le
fait de se retrouver avec un chef corsaire bien disposé, qui les invitait à
s’asseoir et leur offrait de la nourriture et de la boisson que leur servait
déjà toute une armée d’esclaves noirs, constituait une circonstance dont ils
devaient profiter. Ils avaient de l’argent, pas mal d’argent, provenant
directement des familles des captifs, des aumônes qu’ils demandaient
constamment dans tous les royaumes, et surtout des dons et des legs que les
pieux chrétiens effectuaient sur leurs testaments. Près de soixante-dix pour
cent des testaments espagnols instituaient des legs pour le rachat
d’âmes ! Néanmoins, tout l’argent du monde était insuffisant pour libérer
les milliers de chrétiens retenus sous terre, dans les silos de Tétouan, car la
ville était construite sur un terrain calcaire et, près de la forteresse, il
existait d’immenses galeries souterraines naturelles qui traversaient toute la
ville et dans lesquelles des milliers de prisonniers chrétiens étaient
enfermés.
    Les moines revenaient de ces tunnels encore tout étourdis
par la puanteur et l’ambiance malsaine. Des milliers d’hommes s’entassaient
dans les souterrains, affamés, nus et malades. Il n’y avait ni lumière
naturelle ni air ; l’unique ventilation provenait de meurtrières
grillagées qui donnaient directement sur les rues de la ville. Là, les
chrétiens attendaient leur libération ou leur mort, attachés à des chaînes, à
des anneaux, les pieds entravés entre de longues barres de fer qui leur
interdisaient de bouger.
    — Racontez-moi, racontez-moi ! les exhorta Brahim,
tirant les deux religieux du souvenir des conditions sauvages dans lesquelles
étaient maintenus leurs compatriotes captifs.
    Frère Silvestre avait entendu parler d’Hernando, le Maure
employé par don Diego aux écuries royales et qui se promenait le dimanche dans
Cordoue sur un magnifique cheval alezan avec deux enfants à califourchon sur sa
monture. On lui avait dit aussi qu’il prêtait ses services au conseil de la
cathédrale, mais il ignorait tout ce qui avait trait à sa famille. En revanche,
bien sûr, il savait qui était le monfí sanguinaire connu de tout le monde comme
le Manchot – le religieux dut faire un effort pour détourner le regard du
moignon de Brahim –, lequel, après la mort d’El Sobahet, était devenu un
vrai roitelet au cœur de la Sierra Morena. Aucun des deux n’osa demander
pourquoi le corsaire s’intéressait à ces personnages et, entre deux gorgées de
citronnade, des dattes et des pâtisseries, ils parlèrent de Cordoue avant de
traiter directement de la rançon des esclaves qu’ils étaient venus libérer et
dont Brahim laissa à Nasi, au grand désespoir des moines, la responsabilité de
la négociation.
     
    Peu à peu, Brahim avait rassemblé l’information qu’il
désirait. Cependant, malgré l’audace des corsaires qui les amenait à
s’aventurer en territoire chrétien jusqu’à des localités assez éloignées des
côtes, Cordoue, à plus de trente lieues par les voies principales, restait trop
enfoncée dans les terres éloignée pour qu’ils se risquent à aller jusque-là. De
plus, qu’aurait-il fait une fois rendu dans l’ancien siège des califes ?
    À présent, dans un pâturage proche de Carmona, Brahim
contemplait ces mêmes étoiles filantes qu’Hernando voulait interpréter comme un
message céleste de ses chers disparus. Le corsaire avait réussi à résoudre, non
sans risques, les problèmes qui jusqu’alors l’avaient empêché d’assouvir sa vengeance.
La solution était venue de la jeune et belle doña Catalina, épouse et fils de
don José de Guzmán, marquis de Casabermeja, riche propriétaire terrien de
Malága, et de son petit Daniel, que ses hommes avaient fait prisonniers tandis
qu’ils voyageaient au côté d’une petite escorte, lors d’une incursion dans les
environs de Marbella.
    Doña Catalina et son fils Daniel constituaient une proie
d’une immense valeur. Pour cette raison, le corsaire les avait immédiatement
accueillis dans son palais et leur avait accordé toutes les attentions
nécessaires jusqu’à l’arrivée des négociateurs du marquis. Les nobles, en
effet, n’attendaient pas qu’une mission de moines obtienne les fonds ainsi que
les autorisations nécessaires et compliquées du gouverneur de Tétouan et du roi
Philippe, toujours réticent à cette fuite de capitaux vers ses

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