Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les révoltés de Cordoue

Les révoltés de Cordoue

Titel: Les révoltés de Cordoue Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Ildefonso Falcones
Vom Netzwerk:
au même endroit…
    Alors que l’odeur douceâtre du sang de ce second animal
emplissait encore l’atmosphère, Hernando prêta de nouveau attention à la
conversation qu’entretenaient les monfíes.
    — Le marquis ne peut pas attendre l’arrivée de renforts
supplémentaires, disait l’un d’eux. Je sais qu’à Órgiva, les chrétiens sont
enfermés depuis plus de quinze jours dans la tour de l’église, résistant à
l’assaut de la population maure. Il faut qu’il entre dans les Alpujarras le
plus vite possible pour leur venir en aide.
    — Alors remercions les chrétiens d’Órgiva, rit un monfí
qui avait rejoint le groupe et qu’Hernando découvrit monté sur un autre cheval
qu’il avait réussi à soigner.
    Ils passèrent la nuit au sommet d’une colline qui s’élevait au-dessus
du pont de Tablate. Au-dessous s’ouvrait une gorge étroite et abyssale et, de
l’autre côté, les terres de la vallée de Lecrín. El Gironcillo le gratifia d’un
sourire noir et d’une tape terrible dans le dos quand, mettant pied à terre, il
constata que les sutures en soie avaient résisté au chemin ardu. Pendant la
nuit, Hernando s’occupa des chevaux qu’il soigna de nouveau.
    À l’aube, les espions annoncèrent l’arrivée imminente de
l’armée chrétienne, et Abén Humeya ordonna de détruire le pont. Hernando
observa une bande de Maures descendre et démâter la structure en bois pour n’en
laisser que les cintres et quelques grosses planches éparses, qu’ils
utilisèrent pour revenir auprès de leur armée. Trois d’entre eux chutèrent
tandis qu’ils revenaient, et leurs cris s’éteignirent à mesure que leurs corps
disparaissaient dans le profond ravin.
    — Allons, dit El Gironcillo à Hernando, le forçant à
détourner le regard du gouffre où venait de se perdre le dernier Maure tombé.
Prenons position afin d’accueillir ces bâtards comme ils le méritent.
    — Mais…
    Hernando fit un geste en direction des chevaux.
    — Les enfants s’occuperont d’eux. Ton beau-père a
raison : tu es en âge de te battre et je veux que tu restes à mes côtés.
Je crois que tu me portes chance.
    Il descendit vers le pont derrière El Gironcillo, entouré
par une foule de Maures. En peu de temps, le versant de la colline se peupla de
plus de trois mille hommes qui, euphoriques et confiants, attendaient l’armée
du marquis. À leurs pieds s’ouvrait le ravin de Tablate, et devant eux se
dressait le versant de la colline où devaient apparaître les chrétiens.
    Quelqu’un entonna les premières notes d’une chanson, et
aussitôt une timbale retentit. Un autre Maure se dressa sur la côte et fit
ondoyer un grand drapeau blanc ; plus loin un drapeau coloré apparut, puis
encore un… Et cent autres ! Hernando sentit qu’il avait la chair de poule
lorsque les trois mille Maures chantèrent en chœur ; au son des timbales,
des centaines de drapeaux ondoyants recouvrirent de blanc et de rouge le
versant de la colline.
    C’est ainsi qu’ils accueillirent l’armée dirigée par le
marquis de Mondéjar, commandant général du royaume de Grenade. Hernando se
laissa entraîner par l’enthousiasme général et, l’immense Gironcillo à ses
côtés, se mit à chanter à pleins poumons, défiant ouvertement les troupes
chrétiennes.
    Le marquis, dans une armure étincelante, prit la tête de ses
troupes ; il établit la cavalerie à l’arrière-garde, disposa l’infanterie
sur le côté opposé et ordonna aux arquebusiers de charger. Pendant ce temps,
les Maures prirent leurs positions respectives.
    Au-dessus de l’étroit précipice, ils répondirent à l’attaque
ennemie en tirant avec quelques arquebuses et arbalètes, mais surtout en
déclenchant sur les chrétiens, au moyen de leurs frondes, une pluie intense de
cailloux. Hernando respira l’odeur de poudre qui émanait de l’arquebuse du
Gironcillo. Comme il ne disposait pas de fronde pour lancer des pierres, il le
fit à la main, en criant avec exaltation. Il visait bien : il avait déjà
lancé des pierres contre des animaux, et à ses moments perdus s’était entraîné
dans les champs. Il parvint à atteindre un fantassin, ce qui le conduisit à
prendre davantage de risques à chaque coup : aveuglé, il s’exposait au feu
ennemi.
    — Protège-toi !
    Le monfí lui attrapa le bras et l’obligea à s’asseoir
brutalement. Puis il s’employa à passer par les baguettes le canon de son
arquebuse. Hernando fit

Weitere Kostenlose Bücher