Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Les Roses De La Vie

Les Roses De La Vie

Titel: Les Roses De La Vie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
Vom Netzwerk:
n’avons-nous jamais honoré
cette dette ?
    — Jamais ! et pour notre plus grande honte, mon
fils ! Quand le Palatin, pressé par les armes de Spinola, nous a pressés
de le faire, notre oreille tout soudain est devenue sourdaude…
    Je fus tout chaffouré de chagrin et de dépit en oyant ce
procédé indigne. C’était vraiment rendre les plus éhontés services à l’empereur
d’Allemagne de ne pas restituer ses monnaies à l’Électeur palatin au moment où
il en avait le plus besoin. Ah ! m’apensai-je, Louis ! Louis le
Juste ! Tu fus bien mal conseillé en cette triste affaire !
    Mais ma fidélité l’emportant à la parfin et ne voulant pas
non plus rendre les armes à mon père, je repris :
    — Mais, ne croyez-vous pas, Monsieur mon père,
qu’arrêter Spinola sur la frontière palatine risquait d’allumer une guerre
ouverte entre les Habsbourg et la France ?
    — Je le décrois, dit mon père aussitôt. Le temps de la
grande invasion annoncée à son de trompe contre un grand royaume voisin est
passé. Le désastre de l’invincible Armada sur les côtes anglaises a rendu les
Habsbourg plus prudents que serpents. Voyez comme ils en ont agi avec nous sous
le règne de notre Henri ! Par surprise et traîtrise, sans la moindre
déclaration de guerre, ils s’emparent d’Amiens. Mais dès qu’Henri, leur courant
sus, les bat comme plâtre et les boute hors la ville, ils se retirent, les
chattemites, sans piper mot et comme si rien ne s’était passé… Voilà meshui
leur tactique ! Ne pouvant nous avaler d’un seul coup, il tâche de nous
grignoter par petits morceaux.
    Là-dessus, mon père, qui s’était par degrés décoléré en
déchargeant sa bile, se tut, tira une montre-horloge de l’emmanchure de son
pourpoint, l’examina avec gravité et dit qu’il allait nous quitter pour faire
une sieste, coutume, quoiqu’elle fût espagnole, dit-il, qu’il trouvait fort
bonne, surtout à son âge, car elle coupait la journée en son milieu par un
repos rebiscoulant.
    En oyant ces mots, un léger sourire flotta sur les lèvres de
La Surie tandis que ses yeux vairons brillèrent, mais d’une façon dissemblable,
son œil marron avec affection et son œil bleu avec une pointe de gausserie.
    J’eus tout le loisir, dans la suite des temps, de
m’apercevoir que mon père ne s’était pas trompé en parlant au sujet des
Habsbourg de leur stratégie du grignotement, car sept mois à peine s’étaient
écoulés depuis la bataille de la Montagne Blanche qu’ils s’emparaient par
surprise, dans les Alpes, de la Valteline.
    Mais je ne veux point parler ici de la Valteline car elle
fut pendant tant d’années un tel brandon de discorde entre les Habsbourg et la
France que j’aurai assurément l’occasion de revenir sur elle dans la suite de
ces Mémoires. Toutefois, je ne saurais clore ce passage sur les affaires
d’Allemagne sans citer la lettre que je reçus quelque temps plus tard de Madame
de Lichtenberg. Elle l’avait adressée à la rue du Champ Fleuri et c’est là qu’elle
me fut remise par mon père. Je noulus l’ouvrir sur le moment et attendis d’être
retiré dans ma chambre pour rompre le cachet, car de la cousine de l’Électeur
palatin je ne pouvais attendre que d’affligeantes nouvelles, lesquelles, dès
les premiers mots, passèrent mes pires appréhensions.
     
    « Mon ami,
    « C’en est fait de mon fils, de mes biens et de moi. Je
vous écris de La Haye où je suis réfugiée en une maison si modeste que le train
vous en étonnerait. Après la défaite de ses troupes à la Montagne Blanche de
Prague, mon cousin a vilainement abandonné ses sujets de Bohême au “feu et
sang” que leur avait promis Tilly et s’est réfugié en son Palatinat, où il n’a
pas résisté plus vaillamment aux attaques conjuguées de la Bavière et des
Espagnols des Pays-Bas. Il s’est enfui derechef, cette fois jusqu’en Hollande
dont le noble peuple l’a, avec beaucoup de courage, accueilli, lui, sa femme,
ses enfants et sa famille à laquelle, pour mon malheur, j’appartiens. Son
beau-père, Jacques I er d’Angleterre, a élevé une bêlante
plainte auprès de l’empereur quant à l’occupation du Palatinat. Mais comme pas
le moindre soldat anglais ne mettait entre-temps le bout de l’orteil sur le
continent pour soutenir cette plainte, l’empereur n’a fait qu’en rire.
    « Pour moi, il ne m’a servi de rien d’avoir eu si tôt
raison en prévoyant la

Weitere Kostenlose Bücher