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Les Roses De La Vie

Les Roses De La Vie

Titel: Les Roses De La Vie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Robert Merle
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ces
incommodités ?
    En ce milieu du jour, le ciel étant aussi sombre qu’au
crépuscule, Franz alluma les chandeliers et fit dresser la table dans la
librairie où brûlait un feu haut et clair, mon père, au rebours du sien à
Mespech en Périgord, n’épargnant ni la bûche ni la chandelle. Je baillai au
marquis de Siorac une forte brassée et une autre à La Surie et d’un commun
accord, nous ne pipâmes mot que de choses indifférentes pendant cette repue,
attendant que le rôt fût glouti et le vin avalé et que Mariette eût débarrassé
les reliefs, emportant avec elle dans la cuisine ses avides oreilles. Je fis
alors à mon père et à La Surie un conte succinct sur ce Conseil où s’était
débattue une affaire de si grande conséquence pour le royaume. À peine avais-je
fini que mon père se mit très à la fureur, l’œil étincelant et maîtrisant avec
peine les éclats de sa voix.
    — Les mots ! s’écria-t-il, les mots véritablement
souffrent tout ! Le but de cette ambassade serait, si j’ai bien ouï, de
moyenner la paix entre les États de la Sainte Ligue et ceux de la Ligue
évangélique grâce à quelque « accommodement » ou
« composition » ! Ventre Saint-Antoine ! Un
accommodement ! Une composition ! Quel accommodement est-ce là ?
De quelle composition s’agit-il ? Avant l’arrivée de nos ambassadeurs où
en était-on ? Si j’ai bien entendu votre récit, mon fils, le Brandebourg
protestant, qui ne pense qu’à soi, consentait de prime au sacrifice de la
Bohême, mais il demandait, fût-ce du bout des lèvres, qu’on épargnât le
Palatinat ! «  Nein ! » grogna la Bavière avec
d’autant plus de force qu’elle parlait au nom de l’empereur. Là-dessus
apparaissent – dei ex machina [38]  –, à Ulm, nos ambassadeurs,
ayant à leur tête le beau poupelet que l’on sait. Mais ce sont des dieux sans
pouvoir, en tout cas sans pouvoir pour révoquer le nein de la Bavière
puisqu’ils sont envoyés par un royaume qui a commencé par offrir à l’empereur
le secours de ses armes pour dompter ses huguenots rebelles !
    Mon père fit une pause tant son indignation l’étouffait.
    — Jour de ma vie ! reprit-il, qu’est-ce donc que
cette « composition » sinon une capitulation déguisée ? Une mise
à mort hypocrite de la Bohême, de la Hongrie et du Palatinat ! Une
permission implicite donnée à l’empereur d’avaler d’un seul coup de glotte
trois États protestants et de livrer leurs habitants à la Sainte Inquisition
(vraiment sainte celle-là) comme Ferdinand l’a déjà fait dans son gouvernement
de Styrie, détruisant du même coup l’équilibre en Allemagne entre États
catholiques et États protestants ! Vramy ! Qui pourra croire que les
Habsbourg ne vont pas sortir de cette opération considérablement renforcés et
cela à nos infinis dépens et dommages, cela va sans dire, nous qui sommes,
depuis des lustres, la cible principale de leurs empiétements !
    — Mais, Monsieur mon père, dis-je, que diantre pouvait
faire Louis, alors qu’il est présentement en butte à de graves soucis d’argent,
aux révoltes des Grands, à l’interminable guerre que lui livre sa mère et à la
désobéissance de nos huguenots qui acceptent la tolérance pour eux-mêmes mais,
dans les occasions, la dénient aux catholiques ?
    — Ce qu’il devait faire, dit mon père avec feu, c’est
ce qu’eût fait notre Henri, s’il eût été à la place de son fils.
    Je sentis dans ce « notre Henri » dans lequel mon
père mettait tant de vénération, que Louis, pour lui, n’était pas « notre
Louis », surtout depuis qu’il avait renversé les alliances de la France
avec les princes protestants d’Allemagne.
    — Qu’aurait pu faire Louis ? répétai-je en levant
les sourcils. Rassembler une armée et s’enfoncer très imprudemment avec elle au
cœur de l’Allemagne pour aller secourir la Bohême ?
    — Il n’eût pas été nécessaire d’aller si loin, dit mon
père. Il eût suffi de se porter à l’est, sur le Rhin, entre le Palatinat et les
Espagnols du Pays-Bas, rendant ainsi à l’Électeur l’aide que nous avions reçue
de son père quand nous avions nous-mêmes maille à partir avec les Habsbourg. Et
par la même occasion, ne faillant pas de lui rembourser la pécune qu’il nous
avait alors prêtée.
    — Eh quoi ! dis-je non sans malaise, n’ayant
jamais ouï quoi que ce fût à ce sujet au Conseil,

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