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Les sorciers du ciel

Les sorciers du ciel

Titel: Les sorciers du ciel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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européennes. « Avez-vous compris   ? » Les plus forts hurlent « oui » . « Deux détenus russes » , on les désigne à côté de la potence, dans un garde-à-vous impeccable, sauf un bras cassé, « vont être pendus pour tentative d’évasion ».
    — Der erste   ! Celui qui a le bras cassé monte le premier sur la table. Un bourreau athlétique le rejoint, lui donne la main pour se hisser sur le tabouret. Le bourreau le domine tout de même et lui passe le nœud coulant autour du cou, règle adroitement la tension de la corde et, enlève le tabouret. Ce camarade qui s’allonge jusqu’à frôler la table de ses pieds, sort une langue énorme, engluée de boue. C’est tout. Pas un geste, pas un mot. Il tourne doucement. L’officier et le bourreau rêvent ou méditent… Dix minutes s’écoulent, la musique a changé de partition, les cymbales sont aussi vives, les nuages se cuivrent, s’affaissent, prêts à pleurer.
    — Der Nachste   ! ordonne l’officier. Le suivant en question a examiné de près, du pied de la potence, comment s’était comporté son camarade de tentative d’évasion. Il monte souriant, salue du chef rasé l’orchestre où joue son cousin puis, d’une élongation du cou presque coquette, arrange le nœud coulant. Le bourreau est-il moins précis, la corde plus souple, le cou plus musclé   ? Le pendu se débat, tire sur ses menottes, s’agite, déchausse un pied. Le bourreau, d’abord impassible, lui appuie sur les épaules puis, saute en bas en tirant à la taille. C’est fini. Après un dernier soubresaut, une ultime vibration, la langue sort, énorme, et le pendu commence à tourner lentement tandis que les orteils du pied nu font des pointes.
    — L’officier regarde sa montre-bracelet, ordonne de les descendre, se penche, dit un mot au bourreau et repart à bicyclette sans un salut, sa cigarette toujours aux lèvres, le monocle vissé à l’orbite. Les deux pauvres cadavres sont emmenés sur le chariot qui transporte la soupe et, tout à l’heure, la fumée du crématoire sera plus épaisse pendant quelques minutes, car ils étaient grassouillets.
    *
    Le Kommando de Falkensee où se retrouvent l’abbé Lavallart et les déportés de son convoi dépendait du grand camp d’Oranienburg.
    Dans le block de désinfection, Louis Coste «  raconte » les pendaisons de Neuengamme et conclut   :
    — Puisque des choses pareilles sont possibles, Dieu n’existe pas.
    Une voix grave répond   :
    — Dieu existe, et je te le prouverai.
    Coste se retourne et aperçoit un « grand échalas » qui lui tend la main   :
    — Soyons amis, veux-tu   ?
    Coste, responsable F.T.P. de son usine a toujours « bouffé » du curé.
    — Toi tu causes comme un prêtre.
    — J’en suis un. Lavallart du diocèse de Lille.
    Au block 2, un « ancien », Roland Picart lui demande pourquoi il a caché qu’il était prêtre.
    — J’ai voulu rester avec mes compagnons. Ma place est au milieu de vous et je n’ai même pas menti à l’enregistrement. J’ai dit que j’étais professeur. C’est vrai, je suis professeur en théologie.
    Il est dirigé sur la « kolonne 7 » et transporte, douze heures de suite, les lourds obus de l’usine Demag. Perret et Kauffmann, deux anciens scouts de France, veulent se « débrouiller » pour lui trouver un travail moins pénible. Il refuse   :
    — Je ne vais pas déserter. Que diraient mes amis   ? Catholiques ou non, ce sont mes amis et je suis le leur. Je reste aux obus.
    Très vite une petite paroisse se constitue autour de l’abbé.
    — Il doit exister un moyen de se procurer des hosties et qui sait… du vin de messe.
    — Pour le moment, voici une croix et une timbale qui pourrait servir de ciboire. C’est Coudrey qui a fabriqué le tout à l’usine.
    Ce fut alors une véritable chaîne d’entraide qui s’organisa et, parmi ses maillons, laïques et athées n’étaient pas les derniers à rivaliser d’astuce pour réaliser le souhait de leur nouvel ami.
    — Des contacts (109) furent pris avec les civils de l’usine et, par cet intermédiaire, des prisonniers de guerre purent toucher un aumônier militaire qui parvint à faire passer un missel et des hosties. Il ne faudrait pas croire que tout se soit passé sans difficultés ni complications. Le Kommando de Falkensee n’avait pas la réputation d’un Kommando facile… Les S.S. et les vorarbeiters y sévissaient… On y vivait misérablement,

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