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Les sorciers du ciel

Les sorciers du ciel

Titel: Les sorciers du ciel Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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S.S. entre également dans la salle de garde. Il empoche rapidement le flacon ainsi que les cigarettes. Il est content, cela va de soi, car le S.S. ne reçoit que deux cigarettes par jour et pas d’eau-de-vie du tout. Ici pourtant les cigarettes et l’eau de vie sont indispensables, aussi bien comme stimulant que comme narcotique. Le S.S. fume et boit, et c’est ainsi que font ceux du Sonderkommando. Par ce chemin, parviennent ici toutes les marchandises qui sont nécessaires, et plus particulièrement le beurre, le jambon, les oignons et les œufs. Rien de semblable n’est amené par les transports.
    — L’or est procuré par un travail collectif et la répartition des marchandises échangées se fait sur les mêmes bases. Le Kommando du crématorium ainsi que le sous-officier reçoivent largement des cigarettes, de l’eau-de-vie et des denrées. Tout le monde fait comme s’il ne savait rien et personne ne veut rien savoir, car chacun y trouve son avantage. Chaque gardien S.S. du crématorium pris à part est très maniable. Ils ne se méfient que les uns des autres. Ils sont sûrs que les hommes du Sonderkommando ne trahissent personne. C’est pour cela que les cigarettes, l’eau-de-vie et la nourriture destinées aux S.S. sont remis en tête à tête à chacun par un homme du Sonderkommando.
    — C’est par la même voie que parvient tous les matins le « VolkicherBeobachter », organe du gouvernement du III e  Reich. C’est encore un cheminot qui l’apporte. Prix de l’abonnement   : pour un mois, un cylindre d’or. Celui qui apporte à un prisonnier du KZ tous les jours son journal durant trente jours, mérite cette paye.
    — Depuis que je suis dans le crématorium, je suis le premier à le recevoir. Je le lis dans une cachette sûre, puis je raconte les nouvelles du jour à un prisonnier préposé aux écritures. Ce dernier les transmet à ses compagnons. Au bout de quelques minutes, tout le monde connaît les derniers événements.
    *
    Auschwitz « accueillit » également de nombreuses religieuses.
    — À l’hôpital (173) j’ai connu de près une de ces religieuses et je me suis liée d’amitié avec elle. Elle avait passé par plusieurs prisons polonaises et au cours des interrogatoires qu’elle avait dû subir, elle avait souvent été maltraitée et frappée. En fin de compte, les Allemands n’avaient pu relever contre elle aucun fait précis, ce qui aurait peut-être mieux valu pour elle, car alors elle aurait été condamnée à une peine de prison et aurait connu un régime sans doute moins dur que celui des camps.
    — À Birkenau, elle se vit infliger les pires humiliations. Lorsqu’on la dépouilla de sa robe de religieuse, des gardes allemands eurent l’idée de s’en affubler et, pour corser la plaisanterie, se livrèrent devant elle à une exhibition de danse du plus mauvais goût. À la suite de quoi, elle fut tondue comme toutes les internées et obligée de défiler nue devant des S.S. plus ou moins saouls…
    — Dans notre camp les sœurs partageaient entièrement le régime des autres internées. Cependant, elles faisaient preuve d’une fermeté d’âme peu commune, comme on n’en rencontrait guère que chez des déportés animés d’un idéal, résistants actifs ou communistes militants.

CHAPITRE XVII

NEUENGAMME
    Dans les blocks de quarantaine   :
    — Tous ceux qui ont plus de soixante ans peuvent passer au magasin toucher des chaussures neuves.
    Les moins de soixante ans, jaloux, haussent les épaules   :
    — Des chaussures neuves pour les vieux   !
    Les vieux reviennent, claquettes rutilantes.
    Le lendemain   :
    — Ceux qui ont reçu des chaussures neuves au travail   !
    Quelques jeunes ricanent.
    Ces vieillards (174) durent se rendre à la corvée. Il s’agissait de s’aligner et de passer de mains en mains deux lourdes tuiles à la fois. Il y avait parmi eux, le R.P. Muller, supérieur des Pères du Saint-Esprit à Paris. Il avait soixante-quinze ans. Il fit remarquer au Kapo que son âge ne lui permettait pas un tel travail… Il ne pouvait porter qu’une tuile. Le Kapo, dont la grande gueule ne cessait d’aboyer, et qui menaçait sans cesse de sa matraque les malheureux dont les forces physiques ne pouvaient suppléer à la bonne volonté devint enragé.
    — Fainéant   ! Tu ferais beaucoup mieux d’aller au four crématoire si tu ne peux pas travailler   !
    Et il leva la main sur le R.P. Muller qui lui répondit avec

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