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Les spectres de l'honneur

Les spectres de l'honneur

Titel: Les spectres de l'honneur
Autoren: Pierre Naudin
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surplombait l’entrée de la forteresse.
    – Capitaine, ami et frère, hurla Sancerre, de par monseigneur le connétable, je viens vous requérir vos clés et acquitter vos hommes selon vos promesses !
    Le capitaine agita ses bras et se pencha davantage :
    – Sire, il est vrai que nous avons avec messire Bertrand des conventions que nous tiendrons quand nous le verrons… et à nul autre !
    – Ami !… Si je ne venais de par lui, je ne vous le dirais point.
    – Certes, sire, je tiens bien ce que vous dites pour vrai message. Je me consulterai sur vos paroles avec mes compagnons, puis je vous ferai réponse après dîner, s’il vous plaît.
    Sancerre tourna bride, inquiet. Rien n’était terminé.
    – Les Goddons vont atermoyer, dit Tristan.
    Le dimanche 8, il ne se passa rien. La chaleur développait ses braises. Des hommes frappés de « coups de soleil » moururent. D’autres aussi, qui avaient passé leur journée à alterner la fraîcheur du cours d’eau d’en bas et à se sécher dans la fournaise des berges.
    Le lendemain, on apprit que Guesclin avait fait quérir un notaire de Mende pour recevoir son testament.
    – Il n’a pas fourni cette bonne chance à tous ceux qu’il a meurtris lui-même ou fait occire, dit Tristan lorsqu’il vit paraître, au détour de la première maison de l’Habitarelle, le tabellion à pied devant un cheval fortrait.
    – Hélas ! soupira Paindorge. Plus il s’endort dans la mort, plus je pense à Simon et Teresa… et aux autres. Le brasier qui le dévore n’est rien comparé à celui de l’église de Briviesca que nous l’avons vu arser 344 lui-même avec grande joie… Vous souvenez-vous comme il jouissait quand ceux qu’il y avait fait enfermer hurlaient à la pitié ?
    – Je n’oublie rien, surtout maintenant qu’il est recreu 345 à mort.
    Le mardi 10 de ce juillet qui roulait des torrents de feu tout en asséchant les rivières, le mourant manda auprès de lui toute la Chevalerie.
    – Qu’on aille me quérir l’épée royale, dit-il d’une voix qu’il voulait forte et qui n’était qu’un murmure. Tiens, toi, Castelreng, vas-y…
    L’arme gisait sur le lit que le Breton avait occupé une nuit dans la maison proche de la fontaine. Tristan la saisit sans la moindre religion et l’apporta sur ses mains à plat comme l’exigeait la coutume. Le connétable la tira d’un tiers hors du fourreau de cuir cordouan rehaussé de viroles d’or :
    – Seigneurs, dit-il, seigneurs entre qui j’ai eu les honneurs des vaillances mondaines, dont je suis peu digne, il me faudra payer brièvement le tribut de la mort qui n’épargne nul… Envers Dieu, premièrement, je vous prie de me recommander… À vous, Louis de Sancerre, qui êtes maréchal de France, et qui avez bien mérité plus grand honneur, je vous recommande ma femme 346 et ma parenté…
    Guesclin fît un effort et Tristan songea : « Il a aussi de la parenté en Espagne. La dame de Soria et ses deux fils… Y songe-t-il ? Nenni… Et il se moque autant de son épouse française – la seconde – que de la première à laquelle il fit pousser d’immenses cornes ! » La voix du malade devint plus rude :
    – Recommandez-moi au roi Charles, mon souverain seigneur, et rendez-lui cette épée de par moi : je ne la puis mettre en main de plus loyal ni de meilleur. Priez tous pour moi, car mon temps est fini ; aimez-vous l’un l’autre…
    Tristan sourcilla : cet homme qui n’avait jamais été qu’un tas de haine parlait d’amour !
    –… soyez bonnes gens et servez loyalement notre roi couronné…
    Tristan vit le connétable commencer un signe de croix qu’il eut de la difficulté à achever.
    Il se retira sans émoi mais il s’interrogeait sur la promptitude du mal qui allait enlever son ennemi.
    – Nous n’avons aucun mire, dit-il à Paindorge. Peut-être aurait-il pu être sauvé.
    – Il ne le mérite pas. Il a rançonné deux fois le Saint-Père, il a commis des abominations. Avec Pèdre le Cruel qui aurait sans lui justicié son frère, sa conduite a été infâme. Il a inauguré le verbe bretonner dont vous savez ce qu’il signifie. La Chevalerie le mettra sans doute au nombre des preux ; ce qui sera une turpitude. Attendons-nous sa mort ?
    – À quoi bon : il ne peut nous courir après. Va seller nos chevaux et guerpissons… Ça va puer l’encens par ici. Je ne veux pas voir les fausses larmes de ceux que sa mort va réjouir… Pour
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