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Les spectres de l'honneur

Les spectres de l'honneur

Titel: Les spectres de l'honneur
Autoren: Pierre Naudin
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plus.
    – Bertrand a besoin d’un confesseur, messire. Il a moult « choses » à se reprocher…
    – Il est à son chevet… Soit, vous pouvez partir 350 .
    Suivi au petit trot par Paindorge, Tristan rendit les rênes à son cheval. Alcazar hennit en s’engageant dans la descente cependant que des soudoyers, de part et d’autre du chemin, s’écriaient :
    – Vous partez ?… Le châtelet s’est rendu ?
    – Pierre de Galard est prisonnier ?
    – Allons-nous partir, orains ?
    Bientôt, les deux compagnons furent seuls. Ce fut pourtant d’une voix basse, mesurée, que Tristan dit à l’écuyer :
    – Ne dis jamais un mot de ce que tu as fait : tu serais un homme mort.
    – Je porte le fardeau que vous n’osiez porter… J’ai fait justice.
    C’était, en vérité, un mot impropre, mais il n’en existait point d’autre.
    – Allons, dit Tristan, hâtons-nous. Je respire déjà mieux depuis que…
    Il s’interrompit. Respirer mieux. Il songea tout à coup à son fils. Hélie respirait-il mieux, lui aussi ?

 
III
     
     
     
    Maguelonne avait pris son angoisse en patience. Assise sur une escabelle devant le seuil du Cygne noir, elle semblait essayer de trouver dans le ciel un remède agréable à sa mélancolie. Quittant soudain l’ombre de l’hôtellerie et relevant haut sa robe, elle courut au-devant des deux hommes ébahis par sa joie, son sourire et ses larmes. Son visage de lis devenait une rose.
    – Ah ! dit-elle, immobile, une main sur son cœur. Dieu est bon.
    Ils mirent pied à terre. Tristan ne put énoncer quelques mots : des lèvres avides prirent sa bouche, des yeux brillants, mouillés, pénétrèrent les siens cependant que deux bras cerclaient sa taille et qu’il sentait contre son corps la dureté soyeuse de ce ventre dont l’innocence l’avait troublé plus encore que l’expérience.
    – J’avais décidé de quitter le Puy à la fin de la semaine.
    – Dimanche ?
    – Oui… Vous êtes revenus !… Robert, je t’espérais aussi.
    Disant cela, Maguelonne baisa Paindorge aux joues avec force et amitié. Il demanda :
    – Hélie ?
    Tristan lui pardonna de l’avoir devancé. La joie de Maguelonne lors de son élan vers lui avait tempéré puis anéanti son inquiétude : pour qu’elle fût si enjouée, il fallait que leur fils fût guéri ou en voie de l’être.
    – Hélie se porte bien. Il dort en ce moment. Je me languissais davantage pour vous que pour lui… Vous avez mis du temps à revenir !
    – Guesclin ne nous lâchait pas.
    – Je m’en doutais !
    – Il est mort.
    Tristan se sentit dévisagé, puis Paindorge. Une sorte d’incrédulité passa dans les prunelles de Maguelonne et sa bouche frémit.
    – Tu ne vas pas le pleurer, tout de même ? interrogea l’écuyer.
    Il souriait mais ses sourcils restaient froncés. Que craignait-il maintenant ? Les démangeaisons de sa conscience ? Quelle que fût l’acuité de son instinct, Maguelonne ne devinerait jamais.
    – Je ne vais pas pleurer, Robert, rassure-toi. Je n’ai rien oublié de ce que vous m’avez dit l’un et l’autre… et les méchancetés qu’il a jetées contre toi, mon époux, exprès, en ma présence.
    « Elle n’a rien oublié ! » se dit Tristan tout en se défendant du regard soupçonneux de Maguelonne.
    Il se pouvait qu’un jour, lors d’un tençon 351 , elle exprimât soudain son ire et sa déconvenue après quelques détours et prétéritions où les femmes excellaient. Il saurait bien trouver des mots apaisants pour réduire leur désaccord à une escarmouche sans conséquence.
    Cette éventualité, cependant, l’ennuya. Elle teintait d’un soupçon de ténèbre sa liberté nouvelle et définitive. La sagesse exigeait qu’il acceptât la vie telle qu’elle se présenterait à lui désormais. Sans quelques concessions, quelques efforts d’indulgence, l’existence serait impossible : c’était un amour sincère et craintif qui rendait Maguelonne égoïste – encore que ce mot correspondît mal à un caractère enclin à la bienveillance et à la générosité.
    Restait Hélie auquel, guéri ou malade, il consacrerait son temps. Il importait qu’il en fit un homme ; un homme actif, ce qui ne signifiait pas que cette vertu fut tout entière consacrée à l’apprentissage des armes, encore que les Anglais et les routiers fréquemment à leur solde, sinon à leur dévotion, ne fussent pas près d’abandonner la France.
    – Nous allons
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