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Les spectres de l'honneur

Les spectres de l'honneur

Titel: Les spectres de l'honneur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Pierre Naudin
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échangèrent un regard qui lui fit craindre une objection, à moins qu’il ne se fût agi d’une exigence malaisée à satisfaire dans l’immédiat.
    – Hé ! dit-il. Je reviens de trop loin pour subir une déception !… Vous n’allez point refuser ou stipuler je ne sais quoi !… Je souscris volontiers à toutes vos demandes.
    Son exaltation saignait : ils eussent dû s’ébaudir or, ils semblaient mal heureux. Entre eux, le cuveau du foyer brasillait. Afin qu’il fît plus clair, Massol manœuvra la poignée du soufflet. Peu à peu, des flammes apparurent. Il y plongea la tête d’un flambeau qu’il conserva, une fois allumé, dans son poing.
    – Votre père est mat, messire.
    Tristan s’approcha du fèvre dont le visage rougi du fauve éclat des langues rouges, fumeuses, exprimait une compassion qu’il ne pouvait concevoir. Car cette annonce le laissait froid, lui, le fils. Il avait perdu son père quand celui-ci avait épousé Aliénor. Lorsqu’il l’avait revu, à son premier retour d’Espagne, il l’avait senti condamné : par la vieillesse et par sa seconde épouse.
    « Aliénor ! » songea-t-il.
    Son regard était le plus perfide piège à loup qui se pût voir. On s’y perdait corps et âme. Mais qu’allait-il penser à elle !
    – J’ai dû aller à Limoux fin janvier, reprit Massol en accrochant le flambeau à un anneau proche de la hotte de son foyer. C’est là que j’ai appris, sur le marché…
    Maguelonne fit un signe vague dont Tristan fut troublé. L’idée l’effleura qu’elle prenait part à sa peine. Cependant, par-delà cette pitié de pure forme, il décela quelque chose d’autre.
    – Parle, dit-elle avec une extrême douceur à son oncle. C’est toi qui as su, pas moi. Il te croira.
    – Croire quoi  ? s’étonna Tristan à bout de souffle.
    – On dit qu’il a été enherbé.
    – Qui on ?
    – Raymond Sabazan, le mazelier 152 auquel votre père vendait des bêtes. Un ami à moi… Il est au mieux avec quelques gens du village.
    Tristan acquiesça : il connaissait Sabazan. Ses soupçons devaient être fondés. Quant à lui, depuis sa dernière visite, il lui était advenu d’augurer ce trépas pour son père. Oui, bien qu’il eût le cœur étreint, rapetissé, cette disparition ne l’émouvait guère. Lorsqu’il l’avait vu, Thoumelin de Castelreng lui avait semblé près de sa fin. C’était un vaincu. Déjà, sans doute, un poison malicieux, incurable, commençait à l’emmaladir.
    – Mon père attendait la mort d’une façon ou d’une autre. Peut-être même l’espérait-il.
    – Qu’allez-vous faire ? demanda Massol en séchant ses paumes contre son tablier de cuir. Ce qu’on sait encore, c’est que par crainte d’être dénoncés par celle qui devait offrir – sans le savoir – le gobelet mortel à votre père…
    – Sais-tu le nom de cette meschine ?
    – Augusta Gaulène, dit Maguelonne. Elle était de Missègne ou de Valmigère.
    – Ceux qui ont enherbé votre père l’ont occise quelques jours après.
    – Aucun témoin ? suggéra Tristan désolé.
    Le fèvre s’approcha et presque à voix basse, comme s’il craignait que sa confidence transpirât hors des murs :
    – Avant que ses meurtriers la rejoignent, elle a parlé… Elle s’est confessée – à ce que prétend Sabazan.
    – Elle s’est confessée à son frère, intervint Maguelonne. C’est un clerc de Saint-Hilaire. Il n’a sûrement pas parlé, mais il sait, lui aussi. Il faudrait que vous l’alliez voir.
    – On a retrouvé Augusta quatre jours après son départ de Castelreng.
    – Pas un départ, m’amie : une fuite. Où gisait-elle ?
    – Tout près de l’abbaye de Rieunette. Elle allait sans doute y chercher refuge à l’instigation de son frère.
    – Ce que je sais aussi, dit Massol en poussant le fer d’épieu sur son enclume afin d’y poser une fesse, c’est qu’on a percé la mal heureuse au col comme un veau, une brebis…
    – Je reconnais là Olivier, son signe et sa séquelle de males gens.
    – Que voulez-vous dire ? s’étonna le fèvre.
    – Que je crois connaître celui qui a porté ce coup et celle qui l’a décidé. Je les châtierai.
    – Qui est-ce ? demanda Maguelonne.
    – Ma belle-mère et son fils. Mon soi-disant demi-frère.
    – Ah ! Pour ça, fit Massol en riant, on dit de cette Aliénor qu’elle a le potron en feu.
    Tristan fit quelques pas jusqu’à la porte de la forge. L’air

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