Les templiers
s’engouffra sous la porte Maudite pour marcher sur l’église Saint-Romain où les Pisans tenaient leur machine de jet, l’autre se dirigea vers la porte Saint-Antoine où combattaient les chevaliers syriens et chypriotes.
Ceux-ci tenaient encore quand Guillaume de Beaujeu, Maître du Temple et Jean de Villiers, Maître de l’Hôpital accoururent avec, tout au plus, une douzaine de chevaliers. Cette lutte inégale se poursuivit avec héroïsme, mais l’ennemi était trop nombreux. Les musulmans tiraient des feux grégeois avec fougue. La fumée, dit la chronique, était si grande que l’on voyait à grand-peine. Quelques chevaliers se trouvèrent pris sous une décharge de grenades provoquant d’horribles blessures, et sous une pluie de flèches qui ne cessait de labourer le ciel. Le Maître du Temple, sans cuirasse, fut atteint à l’épaule droite par une de ces flèches « qui pénétra d’une peaume de canne dans son corps ». Transporté loin du combat, avec peine, il expira peu après, sans avoir retiré la flèche qui l’avait mortellement blessé afin de la montrer à ses compagnons de lutte l’accusant d’avoir fui le combat. Il ne resta que dix Templiers, sept Hospitaliers, et aucun teutonique. Ce fut un carnage atroce. Gérard de Montréal, à qui nous empruntons ce récit, continue en ces termes : « Sachez que ce fut horrible à voir, car dames et bourgeoises et religieuses et autres menus gens allaient fuyant par les rues, leurs enfants en leurs bras, et étaient pleureuses et éperdues, et fuyaient à la marine pour se garantir de la mort ; et quand les Sarrasins les rencontraient, l’un prenait la mère et l’autre l’enfant, et les portaient de lieu en lieu... et quelquefois, la femme était emmenée et l’enfant allaitant en était jeté par terre que les chevaux foulaient et était ainsi mort ; et de telles dames qui étaient grosses et étaient si étouffées en la presse qu’elles mouraient sur pied, et la créature qui était en son corps aussi... »
Le Grand Maître de l’Hôpital, Jean de Villiers, fut blessé grièvement, mais put être transporté sur un navire et échappa au massacre. Le valeureux maréchal de l’Hôpital mourut au combat, près de la rue des Génois.
D’autres groupes musulmans s’étaient rués sur les défenseurs pisans de la porte Saint-Romain. Après un court, mais violent combat, ils s’engouffrèrent dans la rue des Allemands où les chevaliers de Saint-Thomas furent battus et repoussés.
De l’autre côté, Jean de Grailly et Otton de Granson résistaient encore, mais les bandes ennemies arrivant par la porte Saint-Nicolas, obligèrent les deux vaillants chevaliers à s’enfuir. Le patriarche prit, lui aussi, la fuite, mais en montant sur le navire il trébucha et se noya.
Le bourg du Temple était séparé du reste de la ville par un rempart. Le maréchal Pierre de Sevry prit le commandement des troupes restantes. Plus de dix mille personnes s’étaient réfugiées dans la maison de l’Ordre, car le Temple était fortifié et situé sur une plage d’où les frères purent faire embarquer la population.
Les chevaliers résistèrent dix jours. Le sultan, désespérant de les réduire, leur offrit la reddition pure et simple. Le Maréchal accepta. Mais les musulmans, en pénétrant dans l’enceinte, molestèrent le peu >de femmes chrétiennes qui se trouvaient encore là. Cette attitude révolta les Templiers qui reprirent les armes et massacrèrent les agresseurs. Le sultan continua les pourparlers auxquels Pierre de Sevry eut le tort de se fier. Il se rendit lui-même auprès des vainqueurs en compagnie dés chevaliers encore valides. Le sultan leur fit trancher la tête. Les musulmans se précipitèrent sur la tour du Temple et la minèrent.
Quelques Templiers, avec Thibaud Gaudin, Grand Commandeur de l’Ordre, avaient réussi à se réfugier à Sidon pour attendre des renforts. D’autres frères tenaient encore les châteaux de Sagette ou Sayette, Baruth et Château-Pèlerin. Ne voyant rien venir, le Commandeur se retira, avec tous les frères, au château de Sayette, où la garnison se constitua en Chapitre Général et l’élut comme Maître. Il partit pour Chypre avec les archives de l’Ordre et les vases sacrés. Accusé de lâcheté pour avoir abandonné la Terre Sainte, il demeura dans l’île où le reste des chevaliers du Temple de Sayette et de Château-Pèlerin vint le rejoindre. Quant à ceux de
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