Les templiers
chevaliers, un convent général qui le maintint dans ses fonctions.
Ce fut la guerre froide entre les deux Maîtres. L’obstination de Palaprat l’emporta, les chevaliers donnèrent leur démission les uns après les autres, ainsi que Lepeletier qui, le 14 mai 1814, déclara l’ordre en sommeil. La riposte de Palaprat fut terrible. Par bulle du 10 avril, il proclama l’anathème contre tous les chevaliers ralliés à Peletier. Deux décrets, datés des 5 et 6 mai, invitèrent les chevaliers à une fête de réconciliation générale, avec amnistie générale pour tous les dissidents qui se présenteraient. Quelques chevaliers rejoignirent les rangs, mais nombre d’entre eux s’abstinrent de paraître à nouveau.
Au début de l’année 1827, Charles-Louis de Lorraine abdiqua et un nouveau convent fut prévu pour le 27 mars de la même année. Mettant fin au schisme, cette assemblée réélut Fabre-Palaprat.
La folie des grandeurs de Palaprat se montra à nouveau. L’Angleterre se sépara totalement de Paris et seul le couvent de Liverpool resta dans l’obédience de Bernard-Raymond. Associé dans un mouvement tendant à détrôner Charles X, le néo-temple se dresse contre l’Église de Rome qui n’avait pas voulu, et c’est bien compréhensible, approuver ce pseudotemple carnavalesque et sans autre idéologie que la mascarade.
Les prétentions du Maître du Temple le poussèrent à fonder une nouvelle religion. Il admit, en 1810, Mgr Guillaume Mauviel. Ce dernier, après avoir été évêque de Saint-Domingue en 1800, rentra en France en 1805, accepta l’Église concordataire et demanda^ la cure de Mantes, en Seine-et-Oise. Mort en 1814, il avait consacré évêque le Maître Fabre-Palaprat, le 29 juillet 1810. En moins de trois mois, Mauviel avait été nommé Primat de l’Ordre. Le Grand Maître l’invita à exercer publiquement les fonctions de son ministère. Mauviel, ou pour le Temple Guillaume des Antilles, noblesse oblige, confessa par écrit qu’il ne pouvait faire cela n’ayant pas reçu d’acte légal de sa communion avec Rome. Palaprat le destitua le 10 mars 1810, suivant l’article 18 des statuts, qui disait que tout ministre ecclésiastique de l’ordre doit faire profession de l’Église catholique, apostolique et romaine. Mais cela ne dura pas. Fabre-Palaprat, en février 1812, faisait savoir qu’en « sa qualité de souverain pontife et patriarche de l’Ordre il avait le pouvoir de conférer l’onction de la chevalerie ». En toute humilité !
En 1814, il acheta sur les quais, un manuscrit grec intitulé « Evangelicon ». C’était une version de l’évangile de saint Jean, précédée d’une introduction appelée «Léviticon ». Cette découverte fit connaître à Fabre-Palaprat la religion secrète johannite, qui avait un aspect différent de celui que connurent les Maçons des frères de l’Ecole du Nord. Cette trouvaille devait devenir le credo d’une nouvelle Église dont le maître du Temple serait le pape, le primat, le docteur, etc.
II composa aussitôt une légende templière, combinant la tradition maçonnique sur l’origine égyptienne de la société secrète avec la thèse socinienne, l’anti-cléricalisme des Encyclopédistes. À en croire le Léviticon, l’Ordre d’Orient, né en Égypte, avait été fondé par des chefs pour assurer le pouvoir de la caste sacerdotale et du gouvernement théocratique. On est loin du système synarchique des véritables Templiers.
Dans le Léviticon, le Christ est un philosophe et un initié. Il est appelé « Fils de Dieu » uniquement parce qu’il « était doué d’un génie tout divin. » La vie du Christ, inventée de toutes pièces, nous indique qu’il a été élevé à l’école égyptienne et initié très jeune. Jésus conféra l’initiation à saint Jean l’Evangéliste et aux autres apôtres, qu’il avait divisé en plusieurs ordres. Le Christ disparu, l’ordre fut animé d’un autre esprit sous l’inspiration de saint Jean.
On retrouve ici l’origine de la théorie templière que certains devaient exploiter. Par l’intermédiaire des primats de l’Église johannite, la tradition primitive de l’Ordre fut altérée. Son premier chef, Hugues de Payens, fut « instruit dans la doctrine ésotérique et dans des formules initiatoires des chrétiens d’Orient, par le patriarche Théoclès, 66 e successeur de saint Jean ». Les Templiers retombèrent dans les
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