Les templiers
prit la fuite devant la charge franque, mais ce fut la dernière fois. Cette victoire se passa à Ledda, entre Jérusalem et la côte. Une paix favorable aux Francs s’établit et permit de mettre la Galilée à l’abri des incursions musulmanes venues du Nord.
Entre-temps, Raymond se retira à Tripoli et le jeune roi de dix-neuf ans prit comme conseiller le Maître du Temple.
Selon les accords, en période de trêve aucune forteresse nouvelle ne pouvait être édifiée sur les frontières. Malgré cela Eudes de Saint-Amand suggéra la construction du château du Gué de Jacob, situé sur le Jourdain, en amont de Génésareth et qui commandait la route de Tibériade à Qounestra. Le Roi fut réticent, à cause du traité, mais finit par céder. En octobre 1178, une puissante forteresse commença à s’élever, sous la direction du Maître du Temple qui faisait fi des considérations ecclésiastiques et féodales. Ni lui-même ni son Ordre n’avait pris, disait-il, d’engagement de cette sorte. Bientôt, une garnison de soixante frères du Temple et de mille cinq cents mercenaires à la solde du roi, s’installa au « Châtelet » sous la direction du Sénéchal du Temple, Gérard de Rideford.
Le roi et le Maître du Temple poursuivirent leur route en longeant la frontière jusqu’à Bâniyâs. Avec leur troupe et en compagnie du comte de Tripoli, les deux chefs chevauchèrent jusqu’à l’entrée du Mardj Ayours où, des hauteurs du Hourim, ils découvrirent l’armée de Saladin. Le combat s’engagea, mais les Francs se dispersèrent pendant la descente. Eudes prit avec impétuosité la tête de son couvent, contre les Turcs. Saladin ayant vu la manœuvre eut le temps de se porter sur les lieux avec le gros de ses troupes. Baudouin IV et le comte de Tripoli réussirent à s’échapper. Le Maître du Temple et de nombreux chevaliers furent emmenés captifs. C’était le 10 juin 1179.
Saladin fit raser la forteresse du Gué de Jacob, après quelques jours de siège. Le roi lépreux, qui pendant trois ans avait tenu tête au redoutable envahisseur, se résigna, malgré sa maladie, à conclure un nouvel accord.
Eudes de Saint-Amand mourut dans les geôles musulmanes, ayant refusé toute rançon ou échange.
La succession fut difficile. Le souci de l’Ordre était de redresser les maisons tant au point de vue politique que militaire et moral. Les textes signalant l’élection d’Arnaud de la Tour Rouge à la charge suprême font état d’un long débat acharné. Le choix des électeurs ne put se faire au premier tour. Certains penchaient pour Arnaud de la Tour Rouge, Maître des Espagnes, plus apte à commander en chef, d’autres pour Gérard de Rideford, anciennement Maréchal du Royaume et actuellement Sénéchal de l’Ordre. Après plusieurs jours de discussions, le Maître des Espagnes fut élu.
Le roi lépreux, voyant sa santé décliner, se préoccupa de sa succession. Elle revenait à sa sœur cadette Sibylle. Veuve à l’âge de seize ans de Guillaume de Montferrat, elle avait épousé Guy de Lusignan. Par ce mariage, il reçut l’apanage de Jaffa et d’Ascalon et voulut devenir régent du royaume. Le Roi mourant avait un autre choix en la personne d’Onfroi IV de Tours, mari d’Isabelle, sœur des deux précédents. Mais le danger était imminent. Saladin tenait dans une main de fer la Syrie et l’Égypte réunies. Il fallait un régent fort, au moral et au physique, capable de jouer un rôle politique, diplomatique et militaire. Baudouin IV trouva cet homme en Raymond III, comte de Tripoli. Mais Agnès de Courtenay, femme répudiée d’Amaury et mère de Baudouin, avide de gloire, fit S ’avoir au jeune roi que le comte arrivait en ses terres pour lui arracher le royaume. Il lui fut donc défendu de pénétrer en Galilée. Le sort tomba sur Jocelin III de Courtenay, Sénéchal du royaume et oncle du roi et sur le fameux Guy de Lusignan. Malade, transporté en litière sur les lieux de bataille, Baudouin, aveugle et mourant, se rendit compte du désastre de Séphorie, au mois d’octobre 1183. Il mesura aussi l’inexpérience et l’irréflexion de Guy de Lusignan. Il lui retira la baillie du royaume, nomma pour successeur son propre neveu, le futur Baudouin V, et pour régent le comte de Tripoli.
Entre-temps, les barons de Terre Sainte, devant cette situation désastreuse, décidèrent d’envoyer une ambassade en Europe. On désigna le patriarche Héraclius, et les
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