Les templiers
Naplouse, s’arrêta pour la journée, disant aux deux maîtres qu’il les rejoindrait au château de La Fève.
Cette nuit fut la plus sérieuse de toutes. D’elle dépendit le sort de la Terre Sainte, et sur un simple hasard. Chevauchant près de la ville de Tubas et souhaitant entendre la messe le lendemain matin, jour des saints Philippe et Jacques, Balian alla frapper à la porte de l’évêque. Au lever du jour, l’évêque et sa suite ouïrent la messe et Balian reprit son chemin avec ses sergents et ses écuyers. S’approchant du château de La Fève, sur la plaine d’Esdralon, le seigneur de Naplouse fut surpris par l’installation du camp des Templiers. S’étant approché, il s’aperçut que les tentes étaient vides et le château abandonné. Balian allait s’en retourner lorsqu’un chevalier du Temple vint l’avertir du désastre.
Saladin entreprenait une attaque de représailles contre la Palestine, plusieurs caravanes ayant été pillées par les Francs durant la trêve. Cette faute était due à Renaud de Châtillon. Il avait enlevé une caravane en Arabie. Saladin réclama réparation à Lusignan, mais Châtillon refusa impérativement toute restitution. Le 29 avril 1182, Saladin, conformément au traité conclu avec le comte de Tripoli, demanda le passage à travers la Galilée pour ravager Acre. Raymond n’osa pas rompre. Il demanda à Saladin que la razzia ne dure qu’une journée et qu’aucune ville ou aucun village ne soit attaqué.
Les chrétiens furent avertis et se mirent à l’abri. Les deux maîtres des ordres étaient à La Fère. Gérard de Ridefort envoya un message à son Maréchal Jacques de Mailly qui campait à quelques kilomètres de là, au Casai de Kakoun, lui ordonnant de venir le rejoindre avec le couvent. Il arriva dans la nuit. Le lendemain, le Maître du Temple et le Maître de l’Hôpital, à la tête de cent cinquante chevaliers, surtout Templiers, après être passés à Nazareth, se dirigèrent vers la Fontaine de Cresson. L’attaque fut lancée sous les ordres du Maître du Temple. Si le terrain était peut-être favorable, la disproportion du nombre des combattants ne l’était pas : cent cinquante chevaliers chrétiens contre sept mille mameluks. Le Maréchal du Temple et le Maître de l’Hôpital, prévoyant un désastre rapide, conseillèrent la retraite. La chronique nous a conservé le dialogue du Maître et de son Maréchal. — « Vous parlez comme quelqu’un qui voudrait fuir, trop aimez-vous cette tête blonde que vous voulez si bien garder ! »
Le Maréchal lui répondit : « Je mourrai face à l’ennemi comme un homme de bien. C’est vous qui tournerez bride comme un traître. »
Jacques de Mailly ne croyait pas si bien parler. À la fin de la bataille, trois chevaliers du Temple s’échappèrent, parmi lesquels Gérard de Rideford.
Le Maréchal du Temple, de son côté, avait combattu loyalement et courageusement ; sa belle tête blonde, refusant de se rendre, tomba sous un déluge de flèches d’arbalètes.
Le Maître, avec toute sa lâcheté, s’enfuit sur Nazareth où Balian le rejoignit. Il devait être blessé, mais la honte d’avoir fui fut peut-être plus cuisante encore, puisqu’il laissa son compagnon poursuivre seul son chemin jusqu’à Tibériade. Là,, le seigneur de Naplouse rencontra Raymond de Tripoli, en plein désarroi : les Turcs étaient passés près de son château avec, au bout de leurs lances, la tête des Templiers. Le Maître de l’Hôpital fut tué, et la population de Nazareth, entraînée par Gérard, fut presque entièrement capturée.
Raymond III, pris de remords, se sépara de la garnison musulmane de Tibériade et se réconcilia avec le roi. Bohémond III d’Antioche envoya son propre fils, Raymond, tandis que Gérard de Rideford, comme pour se faire pardonner, rassembla, grâce à la richesse du Temple, une importante garnison. Le ban et l’arrière-ban du royaume furent réunis. Le Maître du Temple versa au roi tout ce que Henri d’Angleterre avait déposé au Trésor de l’Ordre pour subvenir aux frais d’une croisade anglaise. L’armée se concentra près de Nazareth, autour de la fontaine de Séphonie. Ce fut la plus belle armée jamais vue en Terre Sainte. Le patriarche de Jérusalem, Héraclius, se fit excuser, prétextant une fièvre. À cette occasion, il confia la relique de la Vraie Croix aux frères du Temple, au lieu de la porter lui-même
Weitere Kostenlose Bücher