Les templiers
etc.
Cependant, il ne faut pas croire que les Templiers ne s’occupèrent que des Grands. Bien au contraire. À la fin du XIIIe siècle, les activités financières de l’Ordre prirent d’immenses proportions. Mais dès le début, elles permirent à beaucoup de petites gens d’effectuer le pèlerinage en Terre Sainte. Des prêts furent consentis à des particuliers. Ce sont surtout des prêts hypothécaires. Le premier document concernant ce système date du mois d’octobre 1135. Il émane de Pierre Desde et d’Élisabeth, sa femme. Ils donnent à l’Ordre du Temple et à Dieu tous les biens qu’ils possèdent à Zaragoza, maisons, terres, vignes, jardins. Les seigneurs du Temple leur accordent, par charité, cinquante morabatins {3} , afin qu’ils puissent aller en pèlerinage au Saint-Sépulcre. Les frères devront tenir un compte des bénéfices qu’ils tireront de la propriété. Les pèlerins rembourseront la somme prêtée. À leur retour, ils vivront dans leur propriété, en toute quiétude, et à la mort du dernier d’entre eux, cette propriété reviendra au Temple pour toujours et en toute liberté. Ce type de prêt, ou d’achat « par charité », se retrouvera souvent. L’Église ayant interdit l’usure, il fallait un camouflage.
Ce texte est instructif, car il comporte deux clauses figurant dans un grand nombre de documents de plusieurs commanderies. Deux dons servent de couverture au prêt : le don de la propriété, le don charitable. Le capital prêté est garanti par le bien foncier et l’intérêt est fourni par l’usufruitier jusqu’au retour de l’un ou de l’autre, ou des deux souscripteurs.
Nous retrouvons ce système du don de charité dans les ventes camouflées. Toujours, les deux dons entrent en jeu. Mais, lorsque l’on peut comparer la somme accordée par charité avec d’autres documents qui n’ont rien à voir avec une corporation religieuse, on se rend compte qu’à quelques sous près, elle correspond au prix réel du bien donné.
Quoi qu’il en soit, beaucoup de pèlerins emploieront ce mode de prêt pour aller à Jérusalem. Les exemples sont nombreux. Il en est de même des prêts levés sur des pentes royales, comme ce fut le cas pour l’abbaye de Silos, en 1185. Le Temple demandera toujours des garanties. Ainsi, le 6 juillet 1168, sans qu’il soit question de don, l’Ordre prêtera cent morabatins à Raymond de Castela pour effectuer son pèlerinage au Saint-Sépulcre, avec, comme garantie, l’hypothèque sur un bien immeuble qui reviendrait aux frères s’il ne rentrait pas de son voyage.
Le rôle du Trésorier du Temple fut d’une grande importance. Dès le milieu du XIIe siècle, un frère était désigné pour occuper ce poste.
Le premier trésorier connu est Eustache Chien, cité dans la lettre de Bertrand de Blanquefort au roi Louis VII. En 1168, il signe un acte de Raoul de Coucy qui donne dix livres de Provins sur ses revenus de Laon à l’église de Nazareth, à prendre chaque année entre les mains des frères du Temple de Paris. Le dernier acte où il figure date de 1174. Néanmoins, il n’y a pas encore de fonction définitive de trésorier ; en 1171, Geoffroy Foucher, qualifié de procureur du Temple, est chargé de payer une rente à prendre sur le Temple de Paris.
Le Temple de Paris était donc le centre des opérations financières de l’Europe occidentale dès la fin du XIIe siècle. Bien plus, il fut aussi le siège du Trésor Royal, à partir de Philippe-Auguste. Le premier chevalier du Temple qui occupa cette fonction fut frère Aimard. Trésorier de 1202 à 1227, il fut à la fois commandeur de France et trésorier jusqu’en 1204.
En 1202, il fut chargé de mettre de l’ordre dans les comptes royaux et encaissa l’argent dont chaque receveur était débiteur. Certes, il n’est pas question de faire l’inventaire des documents qui le citent. Pendant sa grande période, on n’en compte pas moins de vingt-sept. Il joua un rôle important après la conquête de la Normandie. Il fut envoyé par Philippe-Auguste pour s’entendre avec les barons de cette province sur le cours des monnaies et le bon emploi de la substitution des deniers tournois aux deniers angevins.
En 1222, Philippe-Auguste le choisit comme l’un de ses trois exécuteurs testamentaires. Les archives possèdent encore deux exemplaires du Sceau de frère Aimard. Le dessin très effacé représente peut-être un animal mythologique ou un
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