Les templiers
frontières stratégiques.
Cependant le royaume latin était, au XIII e siècle, à l’apogée de sa prospérité commerciale. Plusieurs documents signalent des navires du Temple, des pontons et des ports d’attache. Certes, la marine marchande était peu importante comparée à celle de guerre ou encore à celles de Gênes, Pise ou Venise.
En 1244, le vicomte de Toulon donna libre franchise aux frères du Temple et les autorisa à construire des « auberges » au plus près de la mer, pour leurs marchandises. Les états des marchandises transportées par les navires templiers, nefs ou galions, sont des plus intéressants. Dès le début du XIII e siècle, à Rouen et à La Rochelle, on débarquait le poivre, la muscade et le clou de girofle. D’Acre et de Tyr, les navires transportaient les matières nécessaires à la fabrication des médicaments : rebeth, aloès, camphre, rhubarbe, myrrhe. Des Indes arrivaient, au ponton templier d’Aiach, en Petite Arménie, la cannelle, le gingembre et la cardamome. Il en était de même des produits industriels. Ainsi, en 1271, les Templiers consignaient dans leur port de Petite Arménie du coton, du bois et de l’alun. Du zinc et de la laque sont mentionnés en 1246.
Pour les offices liturgiques, on transportait l’encens venu d’Arabie. Sans parler des produits miniers ou des produits alimentaires, comme les agrumes, les melons ou les huiles.
En Palestine, tous les châteaux appartenaient aux ordres militaires. Cependant, la situation extérieure de la Terre Sainte était plus que désespérée. Les luttes partisanes déchiraient l’embryon de paix laissée par saint Louis. Voulant évincer Frédéric II, les barons offrirent la couronne à Alix de Chypre, fille d’Isabelle de Jérusalem et d’Henri de Champagne. En 1258 eut lieu un démêlé qui permet de comprendre ces luttes. La plupart des seigneurs francs, le Temple, les Pisans et les Vénitiens reconnurent comme roi de Jérusalem le petit-fils d’Isabelle, Hugues de Chypre. De leur côté, les chevaliers de l’Hôpital, les Génois et les Espagnols optèrent pour Conrad, le fils de Frédéric II.
Les Hospitaliers, pendant tout le XIII e siècle, se guidèrent surtout sur leur propre intérêt. Ils allèrent jusqu’à se dresser contre l’ensemble des seigneurs francs. Nous verrons l’attitude de cet ordre au moment du Procès. Mais nous pouvons dire déjà que l’honnêteté des chevaliers du Temple ne se rencontra pas à l’Hôpital. L’exemple le plus flagrant est l’affaire de Frédéric II. Pour obtenir les grâces de l’empereur, la reconnaissance des privilèges, les confirmations de biens, ils n’hésitèrent pas à mettre la Syrie dans une situation délicate que saint Louis redressa avec difficulté.
Rien n’était pire pour la monarchie franque que ces luttes intestines. En choisissant Hugues de Chypre, les Templiers se trouvèrent dans le parti Gibelin, allié aux Vénitiens, que favorisait le nouveau patriarche, Jacques Pantaléon. Originaire de Troyes, en Champagne, il fut évêque de Verdun en 1252 avant d’être nommé patriarche de Jérusalem et légat du Saint Siège, le 7 décembre 1255. En 1261, alors qu’il était à la cour apostolique pour les affaires de Terre Sainte, il fut élu pape, après la mort d’Alexandre IV le 29 avril, et prit le nom d’Urbain IV.
Entre temps, le Temple s’était donné un nouveau Maître, Thomas Béraud. Essayant de se soustraire aux disputes des barons et autres seigneurs, marchands et bourgeois, il intervint en 1258, comme l’indique clairement les Gestes chypriotes des chroniqueurs arméniens. Cette année-là, lors d’une attaque navale des Génois sur le port d’Acre, les Pisans et les Vénitiens n’osèrent pas gagner leurs vaisseaux, de peur de voir leur quartier envahi et occupé par les Génois d’Acre et surtout par leurs alliés, les Hospitaliers. Ils demandèrent conseil à Jean d’Ibelin, comte de Jaffa, qui les envoya au Maître du Temple, Thomas Béraud. Celui-ci se trouvait dans la maison de Saint-Lazare avec son couvent. Il s’était retiré de cette émeute « car la maison du Temple était mult près des Pisans. »
Le comte de Jaffa et le Conseil de Pise parlèrent au Maître, avec le bailli de Venise. Thomas Béraud leur promit de les aider et d’envoyer des frères chevaliers et des sergents à pied pour garder les rues et les maisons, tant que le combat se déroulerait sur mer. Ce qui fut
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