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Les valets du roi

Les valets du roi

Titel: Les valets du roi Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mireille Calmel
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toujours aussi bien que ce qu’elle avait espéré.
     
    Les agents recruteurs tenaient casernement dans une des bâtisses du port d’Ostende. Mary avait échoué dans les Flandres en plein cœur des opérations militaires de la ligue d’Augsbourg. On lui servit un ragoût de fèves allongé de belles et grandes tranches de pain, et d’un vin qui piquait le gosier mais laissait une note fleurie sur la langue. Elle reprit trois fois du bouilli, tandis que d’autres, tout aussi démunis qu’elle, arrivaient de la même manière.
    Elle craignit un instant qu’on ne la fît voir à quelque infirmier, mais il n’en fut rien. On se contenta de lui remettre un paquetage et de lui annoncer qu’ils partaient le lendemain matin pour Breda où se tenait sa garnison, prête à reprendre les hostilités après ses quartiers d’hiver. En plus de l’habit gris échancré à la taille, tombant sur le genou, dont les manches étaient larges, on lui offrit un long gilet, une chemise blanche, d’amples culottes et des chausses. Pour compléter sa mise, elle eut des chaussures à boucle et un tricorne de feutre. Elle avait reçu également une giberne à cartouches, un mousquet, une baïonnette, une épée et un plastron avant et arrière en guise d’armure. Pour finir, on lui donna une petite ration de tabac qu’elle prisa avec volupté.
    Dans la caserne, la journée durant, ce ne fut qu’un défilé incessant de garçons abusés, tandis que les sentinelles veillaient à ce qu’aucun ne puisse s’échapper.
    A la nuit venue, Mary profita de l’extinction des feux dans le dortoir pour se changer.
    Puis elle s’endormit d’un trait.
     

25
     
     
    E lle parvint à Château-Breda une semaine plus tard, après un voyage chaotique qui lui permit de faire connaissance avec ses compagnons d’infortune. Elle s’allia vite avec sept d’entre eux, affectés en qualité de cadets au même régiment qu’elle.
    Il y avait là Tom qui pleurnichait à l’idée de ne jamais fêter ses treize ans, Joost qui crânait du haut de ses quatorze pour masquer sa peur, Gerrit, qui ronchonnait en flamand et refusait toute approche, Jacob et Karel qui s’imaginaient la guerre comme un vaste terrain de jeux, Joris qui ne cessait de rabâcher qu’il avait été enlevé à ses parents une nuit, dans son lit, et enfin Maarten, dix-sept ans, qui, comme elle, avait déjà eu son baptême du sang.
    Ce fut aussitôt de lui que Mary se rapprocha le plus. Les agents recruteurs l’avaient arraché de prison où il croupissait depuis trois mois pour le meurtre d’un notable chez lequel il travaillait. On lui avait laissé le choix entre la corde ou la guerre. Il avait choisi la seconde option.
    Lorsque Mary lui demanda pour quelle raison il avait occis cet homme, il répondit tout net :
    — Je n’aimais pas qu’il me donne des ordres. Il ne valait pas mieux que moi. Faut pas me chercher ! ajouta-t-il l’œil noir, en direction de leurs compagnons, qui se tassèrent, terrifiés.
    Seul Joost s’avança, supposant sans doute qu’il valait mieux se trouver auprès des attaquants que dans le camp des opprimés.
    — Et toi, Read, d’où tu viens ?
    — J’étais garçon de poudre sur le navire de sir Shovel, répondit Mary, et je sais manier le pistolet et l’épée.
    — Tu as déserté ?
    — Après avoir tué deux matelots qui tentaient de me violer, avoua-t-elle dans un souffle, en clignant d’un œil complice.
    Dès cet instant, Maarten et elle devinrent inséparables. Ils quittèrent la ville de Breda, quelques jours après y être arrivés, sans avoir seulement vu à quoi elle ressemblait.
    Mary n’avait pas eu besoin qu’on lui enseigne les tactiques militaires. Comme sur La Perle autrefois, son instinct et son goût de la bataille les avaient repérées d’emblée. Elle se délecta de cette première échauffourée avec une excitation grandissante au fur et à mesure que les soldats avançaient sur la plaine, couverte autant de leurs tuniques que de celles des rangs ennemis, en position eux aussi.
    Mary réalisa que les mains du pauvre Tom tremblaient sur ses baguettes de tambour. Il avait les joues ruisselantes de larmes et elle comprit qu’il ne passerait pas la journée. Elle savait trop que, sans hargne, il n’était pas possible de survivre. Elle l’encouragea pourtant à avancer, l’assurant que les vainqueurs étaient toujours ceux qui agissaient. Pour toute réponse à ses conseils, il se mit à prier et

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