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Les voyages interdits

Les voyages interdits

Titel: Les voyages interdits Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gary Jennings
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qui
s’étirait sur tout le nord et l’est de Mechhed. Nous choisîmes de suivre une
route à travers le Garabil, ou Plateau froid, longue saillie tendue telle une
ligne de côte entre le lugubre océan sec des Sables noirs et le morne
escarpement de montagnes dépourvues d’arbres que l’on nomme le Paropamisus [27] .
    Il eût certes été plus direct de traverser tout droit
dans le Karakoum, mais nous avions eu notre compte de désert. Par ailleurs, il
eût été plus confortable de cheminer plus au sud, à travers les vallées du
Paropamisus, car nous aurions trouvé là de quoi nous reposer dans des villages,
des villes ou même de grandes cités telles que Harat ou Meymana. Mais nous
préférâmes la voie médiane. Nous avions pris l’habitude de camper à la belle
étoile, et ce haut plateau, le Garabil, ne devait sans doute son surnom qu’à
une comparaison avec les terres plus basses, nettement plus chaudes, car, même
en hiver, il n’y faisait jamais franchement froid. Nous ajoutâmes juste
quelques épaisseurs de vêtements dès que cela s’avéra nécessaire et nous
accommodâmes somme toute fort bien des températures.
    Le Garabil consistait essentiellement en monotones
terres herbeuses, piquetées çà et là de bosquets d’arbres : pistachiers,
jujubiers, saules et quelques conifères. Nous avions déjà traversé des contrées
bien plus verdoyantes, et donc plus plaisantes, et nous devions plus tard en
voir bien d’autres ; pourtant, après avoir enduré le Grand Salé, la
lassante herbe grise et le rare feuillage du Garabil étaient un régal pour nos
yeux, constituant en outre pour nos chevaux une abondante réserve de fourrage.
Au sortir de la surface inerte du désert, ce plateau nous semblait grouiller de
vie sauvage. Il y avait des volées de cailles et de perdrix aux pattes rouges,
et, partout, des marmottes jetant des coups d’œil furtifs de leurs terriers et
sifflant d’un air grognon sur notre passage. Des oies et des canards migrateurs
hivernaient par ici ou survolaient la contrée : les oies portaient sur la
tête une sorte de plumet hérissé, et les canards arboraient un joli plumage
brun-roux et doré. Sur le sol grouillaient une multitude de lézards bruns,
parfois si longs – certains étaient plus grands que ma jambe – qu’ils en
effrayaient nos chevaux.
    Nous y aperçûmes aussi certaines espèces de gazelles
délicates et des ânes sauvages appelés dans cette région kulan. Dès que
nous en rencontrâmes un spécimen, mon père émit le souhait que nous en capturions
un et que nous le domestiquions : nous l’emmènerions en Orient pour le
vendre. Là-bas, en effet, nous en tirerions un bien meilleur prix que les mules
que les nobles et les grandes dames aimaient à utiliser comme montures. Aussi
grand qu’une mule, le kulan a une forme de tête similaire et la même
queue courte, mais son pelage, magnifique, est d’un beau marron foncé, avec le
ventre pâle. Il est impossible de se lasser du spectacle de leurs troupeaux
trottant de façon aérienne, gambadant et folâtrant à l’unisson. Cependant, les
natifs du Garabil nous dissuadèrent d’essayer de le dompter : cet animal
rétif à tout dressage ne se laissait pas chevaucher, et son seul intérêt
résidait dans sa chair, comestible.
    Afin de compléter nos provisions de bouche, nous
pratiquions abondamment la chasse, l’oncle Matteo tout particulièrement. À
Mechhed, nous nous étions procuré chacun un petit arc mongol avec les flèches
miniatures qui convenaient, et mon oncle, après s’être suffisamment entraîné,
était devenu un expert dans son maniement. En règle générale, nous nous tenions
à l’écart des grands troupeaux de gazelles ou de kulan, soucieux de ne
pas entrer en conflit avec les prédateurs féroces qui pouvaient les
accompagner : loups et même lions, qui abondent dans le Garabil.
Cependant, nous prîmes le risque, à une ou deux reprises, d’en traquer de
petites troupes, abattant plusieurs gazelles et, une fois, un kulan. Chaque
jour ou presque, nous pouvions compter sur une oie, un canard, une caille ou
une perdrix. Cette viande fraîche aurait été un don du ciel, n’eût été un léger
inconvénient.
    J’ai oublié quelle sorte de créature nous avions
abattue la première fois, et qui l’avait fait. Mais quand nous commençâmes à la
dépecer pour la faire griller sur notre feu, nous découvrîmes qu’elle était
criblée de petits insectes grouillants

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