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L'Eté de 1939 avant l'orage

L'Eté de 1939 avant l'orage

Titel: L'Eté de 1939 avant l'orage Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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n’ai jamais aperçu de femmes parmi eux.
    â€” Mais vous n’en verriez pas dans la plupart des organisations politiques, ce qui ne veut pas dire qu’il ne s’y trouve pas des militantes convaincues.
    â€” Comment entendez-vous orienter vos recherches, maintenant?
    â€” Vous ne considérez pas que dans toute cette histoire, il y a une grande absente: la victime!
    L’avocat adressa un regard étonné à son vis-à-vis, comme s’il ne suivait plus.
    â€” La plupart du temps, les policiers cherchent à connaître le mort. Cela permet tout de suite de savoir qui lui en voulait, et pourquoi. Pour une femme, la réponse habituelle est le mari, ou l’amoureux. Ici, comme nous commençons par éliminer l’époux visiblement pas très éploré, il faut regarder la victime autrement que comme un accessoire de théâtre.
    â€” Ce qui signifie?
    â€” Que je vais tenter de rencontrer la famille de la dame.
    Peut-être trouverai-je là une piste tout à fait nouvelle.
    Renaud Daigle acquiesça d’un signe de tête, comprenant bien que cela ferait apparaître l’affaire sous un autre jour, puis il relança la conversation:
    â€” Avez-vous recueilli des informations sur le docteur Lalonde?
    â€” Lui? J’aurais pu vous en donner dès mardi, mais j’ai mis la journée d’hier à me rafraîchir la mémoire. Le personnage est tout de même connu des services de police.
    Comme la dernière fois, les deux hommes avaient commandé un café qu’ils ne termineraient pas. Le vieux détective étendait devant lui des petites fiches couvertes d’informations griffonnées à la hâte.
    â€” Le docteur Paul-André Lalonde a été traduit en justice il y a deux ans: une jeune fille confiée à ses soins est morte lors d’une intervention chirurgicale qui ressemblait fort à un avortement. L’homme a plaidé que la patiente lui était arrivée déjà charcutée, qu’il avait tout fait pour la sauver, en vain.
    â€” Cela se tenait comme histoire: une gamine malchanceuse se retrouve enceinte, elle déniche une avorteuse qui lui rentre des aiguilles à tricoter dans le ventre. La patiente se sent mal, accourt chez le médecin qui ne peut lui venir en aide.
    â€” À vous entendre, on dirait que vous avez défendu ce praticien. Le juge s’est montré tout disposé à avaler ce conte.
    La difficulté, voyez-vous, c’est que la rumeur tenace qui circulait chez les constables voulait que le magistrat ait eu lui-même une fille assez généreuse de sa personne, qui avait utilisé les bons services de ce docteur.
    Bien sûr, cela se pouvait très bien. Surtout, Renaud croyait que les policiers pouvaient inventer bien des histoires pour se moquer des riches et des puissants… dont les juges faisaient partie. Aussi préféra-t-il commenter prudemment:
    â€” Ce type de légende circule partout. Cela ne constitue pas une preuve. Je n’y ferais pas beaucoup confiance.
    â€” Mais moi non plus. Tout de même, j’ai assisté au procès. Vous savez, dans ce genre d’événements, il est assez rare que le suspect affiche plus d’assurance que le juge. Cette fois-là, c’était bien le cas.
    L’avocat se souvenait de l’allure arrogante du médecin.
    N’empêche, se trouver au banc des accusés pour un crime aussi grave aurait dû lui inspirer un minimum de modestie.
    â€” Alors comment interprétez-vous ce retournement de situation?
    â€” Si Lalonde se spécialise, comme le veut la rumeur, dans les avortements des jeunes femmes de bonne famille, tout le monde devait s’inquiéter que celui-ci rende public son carnet de rendez-vous. Même l’avocat de la couronne.
    â€” Pourquoi celui-ci aurait-il porté les accusations? insista Renaud.
    â€” La fille était morte dans des circonstances très louches, il y a eu autopsie. Celle-ci a démontré qu’un avortement venait tout juste d’avoir lieu. Je présume que le Procureur général n’avait pas d’autre choix.
    Ã‰videmment, un peu comme dans le cas de Davidowicz, s’abstenir d’intenter des poursuites aurait paru très suspect.
    Quitte à ce qu’un avocat de la couronne pousse l’affaire mollement, et que le juge se montre tout disposé à

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