Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
L'Eté de 1939 avant l'orage

L'Eté de 1939 avant l'orage

Titel: L'Eté de 1939 avant l'orage Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
Vom Netzwerk:
qu’un imbécile écrit «Casque d’acier» au bas d’une lettre que nous allons brimer le droit d’association de ces gens-là.
    â€” Nous en arriverons certainement à une loi de ce genre, au moment où la guerre sera imminente.
    â€” Ce jour-là, la police interviendra. En attendant, vous m’affirmez ne pas pouvoir me signaler le moindre incident impliquant une personne ou un groupe, d’où je pourrais partir pour enquêter?
    Un moment, Davidowicz sembla vouloir ajouter quelque chose, se reprit, admit finalement:
    â€” Si j’excepte des accrochages plutôt anodins, des insultes, des remarques méprisantes, des individus qui me proposent de retourner d’où je viens, je n’ai pas été l’objet de menaces formulées de vive voix.
    Mollement, l’air de ne plus y croire, Georges Farah-Lajoie posa encore quelques questions, puis à la fin il se leva en disant:
    â€” Docteur, je vous remercie, je ne volerai pas plus de temps à vos patients.
    Son hôte le reconduisit jusqu’à la porte, le quitta en prononçant un «Faites-moi savoir s’il y a du nouveau» peu convaincant. Une fois son visiteur à l’extérieur, Davidowicz dut appuyer une épaule contre le mur pour prendre de grandes inspirations. Maintenant, mieux valait téléphoner sans tarder à Myriam pour la rassurer. Tout à l’heure, au bout du fil, elle paraissait terriblement inquiète.

21
    Parfois, Renaud Daigle se faisait la réflexion que les trop jeunes filles ne devraient pas lire n’importe quoi. Peut-être même devrait-il songer à interdire la presse quotidienne à toutes les personnes de la maisonnée âgées de moins de vingt ans. Cette pulsion vers la censure tenait au fait que depuis le matin, Nadja ne ratait pas une occasion de lui dire:
    â€” Tu sais, cela ne s’est jamais produit dans le monde. Je vais m’en souvenir toute ma vie.
    Après avoir entendu l’argument pour la centième fois de la journée, cette fois au-dessus du repas du soir, l’homme adressa un regard un peu lassé à sa femme. Cette dernière lui répondit d’un sourire ironique, certaine que son conjoint ne résisterait pas bien longtemps encore à des assauts pareils.
    â€” Mais tu ne connais personne parmi ces gens-là, tenta-t-il.
    â€” Ce n’est pas grave. Dans la foule, personne ne s’en apercevra.
    â€” Les journaux affirment que seuls les membres de l’association de la Jeunesse ouvrière catholique, et les invités des mariés bien sûr, pourront entrer.
    â€” Voyons, fais le calcul: trois mille invités, quinze mille membres. Le stade peut contenir trente mille personnes. Cela laisse douze mille places!
    Nouveau regard éploré du père vers sa douce moitié, qui s’en tenait à sa résolution de ne pas s’en mêler.
    â€” Tu sais, si tu décides de faire des études de droit, spécialise-toi dans les litiges. Tu as les aptitudes requises…
    La sonnerie du téléphone interrompit les commentaires paternels. Comme Virginie s’inquiétait fort de son cinéma, elle se précipita vers le bureau où se trouvait l’appareil. Après un moment, elle revint dans la salle à manger en disant:
    â€” C’est pour toi. Une jeune femme à l’accent européen.
    Allemand peut-être.
    Renaud lui adressa un regard plutôt surpris. À l’autre bout du fil, la voix de femme répondit à son «J’écoute» en disant:
    â€” Monsieur Daigle, je vous mets en communication avec monsieur Bronfman.
    Après un cliquetis métallique dans l’appareil, l’homme d’affaires commença par de plates excuses:
    â€” Je suis désolé de vous déranger à cette heure-ci, monsieur Daigle, mais je veux vérifier quelque chose. Quand avez-vous eu des nouvelles de mon … informateur pour la dernière fois?
    â€” … Alfred Côté?
    â€” Si vous voulez le désigner ainsi.
    â€” Lundi de la semaine dernière. Le 3 juillet, si je me souviens bien.
    Ã€ l’autre bout du fil, un long silence fit suite à cette information, comme si son interlocuteur avait posé la main sur le combiné pour parler à quelqu’un. Puis Bronfman intervint à nouveau:
    â€” Depuis lors, personne ne semble avoir entendu parler de lui.

Weitere Kostenlose Bücher