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L'Etoffe du Juste

L'Etoffe du Juste

Titel: L'Etoffe du Juste Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hervé Gagnon
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l’idée de tenter d’assassiner Montfort, ce dont j’avais pris prétexte pour me rendre à Toulouse, auprès du Cancellarius Maximus. De toute évidence, Eudes avait appris que nous avions échoué, mais il n’avait pas abandonné l’idée. À défaut de pouvoir occire le chef des croisés, peut-être avait-il décidé de s’attaquer à sa progéniture ? Cela expliquerait la présence de Jaume. Avec ses années passées en Terre sainte auprès des Sarrasins, il était sans doute l’assassin le plus habile de l’Ordre.
    Je ne pouvais m’empêcher de rager. Ugolin, Pernelle et moi-même étions dans le Nord. Ravier et Daufina étaient morts. Raynal aussi. Il en découlait que seuls Eudes, Véran, Jaume, Esclarmonde et Peirina étaient encore à Montségur pour veiller sur la cassette. Et voilà qu’ils se privaient de l’un d’eux pour une telle mission. C’était d’une folle imprudence.
    Par-dessus tout, je ne pouvais me permettre de perdre le jeune Montfort. J’avais besoin de lui. S’il mourait, je perdrais ma chance d’apprendre ce que savait peut-être son père et je risquais de tomber à pieds joints dans un traquenard à Gisors. Je me levai d’un trait.
    —    N’interviens pas, dis-je à Ugolin.
    Je marchai aussi vite que je pouvais sans faire de bruit. Jaume avait de l’avance sur moi et je devais le rejoindre avant qu’il ne soit trop tard. Lorsqu’il fut à deux pas du jeune Guy, il s’accroupit, la lame au clair, et le contourna pour se placer directement derrière lui, tel un fauve prêt à bondir. Le jeune homme pinçait toujours ses cordes en chantant, totalement absorbé par sa musique. Je me hâtai tout en sachant que Jaume était un combattant redoutable et qu’il avait l’oreille fine. J’étais presque parvenu à lui lorsqu’il bondit et empoigna le fils Montfort par la chevelure. Le luth virevolta dans les airs et chuta sur le sol. Jaume le tira vers l’arrière et lui appuya sa lame sur la gorge. Il était trop tard.
    Mais Jaume me surprit en ne tranchant pas tout de suite.
    —    Mort au pape et à ses croisés ! hurla-t-il à pleins poumons. Et l’enfer pour ces pourritures de Montfort !
    Je compris alors ce qu’il entendait accomplir. Simplement assassiner sa victime et s’évanouir dans la nuit ne lui suffisait pas.
    Son geste devait être connu de tous afin que Simon de Montfort sache que c’était lui qui avait été visé et que les cathares ne baisseraient pas les bras. En claironnant ainsi son intention avant d’agir, Jaume se condamnait à mort.
    Je franchis à la hâte les quelques pas qui nous séparaient et bondis sur lui. Pris de court, il tenta de trancher le gosier du jeune homme avant que je l’en empêche, mais je retins son poignet tout en l’immobilisant de mon mieux avec mon bras gauche. Je tirai de toutes mes forces et parvins à l’arracher de sa victime, que je poussai vers l’avant avec mon pied pour l’éloigner du danger. Guy de Montfort émit un petit cri, s’écrasa piteusement face la première dans la poussière et s’éloigna à quatre pattes, apeuré.
    Alertés par la déclaration de Jaume, des soldats accouraient, l’arme au poing. Je parvins à glisser ma jambe devant celles du templier et, en poussant dans son dos, je le fis choir sur le ventre. J’atterris sur lui et, tout en tentant de l’immobiliser sous mon poids, me penchai à son oreille.
    —    Secretum Templi, mon frère, chuchotai-je sèchement. Joue le jeu et fais-moi confiance.
    Stupéfait, Jaume cessa de se débattre.
    —    Gondemar. bredouilla-t-il à mi-voix.
    —    Ils arrivent. Ne dis rien et ne trahis pas mon identité. Ugolin te libérera dès que possible. Ensuite, je t’expliquerai.
    L’instant d’après, je fus saisi par le col et violemment tiré vers l’arrière. Mon surcot se déchira, découvrant ma cotte de mailles et mes épaules, et je fus immobilisé au sol. Près de moi, une masse de gardes fondit sur le pauvre Jaume. Donnant le change de son mieux, le templier résista avec hargne et plusieurs en furent quittes pour une lèvre fendue, un nez écrasé ou une bourse qui resterait tendre pour les jours à venir. La force du nombre finit toutefois par s’imposer.
    Lorsqu’il fut remis sur pied, solidement retenu par deux gardes qui lui tordaient cruellement les bras vers l’arrière pendant qu’un autre appuyait son épée contre son gosier, il était fort mal en point, lui aussi. À son honneur, jamais il ne

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