Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
L'Etoffe du Juste

L'Etoffe du Juste

Titel: L'Etoffe du Juste Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hervé Gagnon
Vom Netzwerk:
tenaient deux revenants : Gerbaut de Gant et Odon, le fils de Pernelle.
    1
    Tu es poussière et tu retourneras à la poussière. Genèse 3,19.
    2
    Tous ceux qui vivent par l’épée, mourront par l’épée.

Chapitre 12 Retrouvailles
    Dans un état second, j’assistai à la discussion qui suivit.
    — Nous souhaitons nous abriter ici pour la nuit, déclara Pierrepont d’un ton qui interdisait toute réplique.
    Tel un vautour, Gerbaut étira son long cou émacié pour regarder la procession que nous formions, et qui s’étendait jusque dans les bois.
    —    Vous êtes bien trop nombreux, rétorqua-t-il. Rossal est petit.
    —    Rossal fera l’affaire, riposta sèchement sire Alain. Seuls les soldats et les prêtres y dormiront. Les marchands, les putains et le reste s’arrangeront comme ils le pourront dans les bois.
    —    Cela fait encore une bonne centaine. Nous ne pouvons vraiment pas.
    J’observai le prophète de malheur. L’homme furieux et péremptoire que j’avais connu semblait avoir été adouci par son grand âge. S’il ne souhaitait manifestement pas voir les croisés s’arrêter dans le village qui était maintenant le sien, il hésitait à le dire. Autour de lui, les habitants se jetaient des regards inquiets.
    —    Il ne s’agit pas d’une requête, coupa Pierrepont. Tu devras faire avec, vieil homme. Nous repartirons dès l’aube. J’installerai mes hommes dans les étables. Vois à ce qu’il y ait du foin frais et sec, et fais-nous porter des victuailles.
    —    Nous sommes pauvres, sire.
    —    Et vous le serez encore plus si tu tergiverses, vieille carne ! Si tu préfères, nous pouvons nous installer dans les maisons.
    —    Fort bien, minauda Gerbaut en s’inclinant ridiculement malgré son dos difforme. Considérez-vous comme chez vous.
    Pierrepont se tourna vers un de ses officiers.
    —    Vois à ce que tout le monde s’installe. Et fais passer le mot au reste du convoi. Qu’on dresse le camp hors du village.
    —    Bien, sire.
    L’homme sortit aussitôt du rang et se mit à beugler des ordres pendant que son supérieur descendait de cheval. Je me tournai vers le jeune Montfort, qui était à mes côtés. De la tête, je désignai ce qu’il restait de l’étable de mon père.
    —    Allez avec eux et gardez-moi une place dans cette étable, sire. J’ai une affaire à régler de mon côté. Je ne serai pas long.
    —    Tu vas me laisser seul ? Après ce qui s’est produit la nuit dernière ? fit-il, son visage blanchissant de quelques tons. Tu n’y penses pas ! Tu dois assurer ma protection ! Le sieur de Pierrepont te l’a ordonné ! Tes affaires attendront !
    —    Ne craignez rien. Je reviendrai dans l’heure, je vous le promets. D’ici là, assurez-vous de rester bien en vue et tout ira bien.
    Laissant le jeune Guy pantois, je me dirigeai vers Pierrepont.
    —    Sire Alain, dis-je, en espérant encore, contre toute attente, lui faire changer ses plans, les gens de ce village sont malades. Ils crachent le sang.
    —    Et alors ? rétorqua-t-il. Avec ce temps, les nôtres ne sont guère en meilleur état.
    —    Mais.
    —    Écoute, tu peux bien continuer en pleine nuit dans la tempête et emmener ton petit chéri avec toi, si tu veux. Au matin, on vous retrouvera gelés, dans les bras l’un de l’autre. Je m’en fiche.
    Il s’éloigna sans rien ajouter. Je fis faire un demi-tour rageur à Sauvage et remontai le convoi à rebours dans la pluie froide. J’étais anxieux de faire part à mes compagnons des développements inattendus qui venaient de se produire. Par-dessus tout, j’avais une chance inespérée de soulager mon âme d’un des trop nombreux fardeaux qu’elle portait depuis trois ans. Odon était vivant. Cela ne m’exemptait pas des actes que j’avais commis, mais versait sur les plaies de mon âme un baume que j’appréciais à sa juste valeur.
    Je galopai à tombeau ouvert vers la fin de la caravane, où je trouvai les marchands, qui s’abritaient de la neige de plus en plus abondante sous les bâches de leurs charrettes, et tous les autres, misérablement installés sous les arbres, l’humidité et le vent les privant de feu. Je ralentis le pas et avançai en fouillant la foule du regard. Le soir qui commençait à tomber rendait mes recherches difficiles et ce fut finalement Ugolin qui me vit.
    —    Pssssst ! Gondemar, chuchota-t-il sur ma droite.
    Je me tournai et

Weitere Kostenlose Bücher