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L'Héritage des Cathares

L'Héritage des Cathares

Titel: L'Héritage des Cathares Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hervé Gagnon
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rétracter publiquement et lui offris même, en échange, un exil doré dans l’endroit de son choix. Nous discutâmes toute la nuit de manière fort civilisée, mais rien ne put ébranler ses convictions.
    Il était hors de question que je puisse le libérer. Son influence était bien trop grande et je devais faire un exemple. Lorsque je lui demandai, résigné, s’il était bien celui qu’on appelait le roi des Juifs, il me répondit simplement « tu le dis », en apparence indifférent au fait qu’il scellait ainsi son sort. J’appelai donc les gardes et le fis conduire en prison. Puis je signai sa condamnation et, un peu à regret, me lavai les mains de lui.
    La sentence fut exécutée le lendemain, premier jour de la Pâque juive. Il fut d’abord fouetté puis mené vers la colline de Golgotha, à l’extérieur de Jérusalem. Comme le veut l’usage, il porta lui-même la barre transversale de sa croix, le patibulum. Une fois sur place, lorsque le soleil était à sa méridienne, il y fut cloué par les poignets pendant que quelques centaines de légionnaires contrôlaient la foule hostile. Il fut ensuite hissé au poteau et ses pieds y furent rivés. Je fis accrocher au sommet de la croix un titulum indiquant son crime : « Iesus Nazarenum, Rex Iudaeorum 1 ». De chaque côté de lui se trouvait un autre séditieux.
    Trois heures plus tard, il était déjà mort, ce qui m’étonna. Habituellement, le supplice dure beaucoup plus longtemps. Pour s’en assurer, un légionnaire lui enfonça sa lance dans le côté. Comme il avait expiré si vite, le crucifragium lui fut évité et ses jambes ne furent pas brisées, comme on le fait habituellement pour accélérer l’agonie. J’aurais dû le laisser pourrir sur la croix, comme le veut l’usage, mais j’éprouvais une étrange sympathie pour cet homme digne et je désirais lui éviter cet ultime outrage. J’autorisai donc les siens à le descendre de la croix et à disposer de sa dépouille, ce qu’ils firent sans tarder. Quelques jours plus tard, une rumeur inquiétante s’est mise à courir. On racontait que Ieschoua avait survécu. Après enquête, la chose se confirma. Il appert que ses partisans l’avaient drogué pour qu’il paraisse mort. Mais que pouvais-je faire ? La sentence était accomplie et Ieschoua avait disparu sans laisser de traces.
    Tout cela se passait voilà trois semaines. Dans Jérusalem, les passions se sont calmées. Mais déjà, on entend chuchoter que le Dieu des Juifs a ressuscité leur Roi pour qu’il revienne, un jour, chasser Rome d’Israël. Ma plus grande crainte demeure que l’on fasse de Ieschoua un mythe. Car un mythe est infiniment plus puissant que la réalité. Quoi de mieux, en effet, qu’un homme devenu dieu pour motiver les Juifs à se révolter ? Quoi de plus dangereux qu’une petite secte qui devient religion ? Je garde donc l’œil bien ouvert et veille à tes intérêts, mais pour l’instant, la rébellion semble bien brisée, ô divin César.
    Que les dieux te gardent.
    Le 12 avril DCCLXXXVI depuis la fondation de Rome, dans la dix-neuvième année de ton règne
    Autour de moi, j’avais le sentiment que le temps s’était arrêté. Un lourd silence m’enveloppait. Je savais que les autres me regardaient lire, mais j’étais indifférent à leur présence. Seul existait ce document, écrit de la main même de celui qui avait condamné Jésus à la croix. Je le relus une fois, puis une autre fois encore, absorbant à grand-peine ses implications. Mon rêve était donc prémonitoire. À la manière des songes, il m’avait prévenu que ce que je trouverais dans cette cassette avait le pouvoir de détruire la chrétienté tout entière. Je compris la stupéfaction qu’au matin, après que nous eûmes découvert les templiers à Quéribus, j’avais pu lire sur le visage de mon maître. Le monde n’est que mensonge, avait-il dit, dépité. Depuis le début, tout est faux.
    Les colonnes qui soutenaient mon être étaient ébranlées. Je n’étais pas docteur de l’Église, mais je n’étais pas non plus stupide. J’avais été élevé dans la religion chrétienne et le père Prelou m’en avait inculqué les dogmes. Si ce que disait ce document était vrai, la chrétienté était une fausseté. Elle était fondée sur un mythe, un mensonge. D’une main tremblante, je remis le parchemin au Magister, qui le rangea aussitôt dans la cassette.
    —    Ce document est-il authentique ?
    —

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