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L'Héritage des Cathares

L'Héritage des Cathares

Titel: L'Héritage des Cathares Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hervé Gagnon
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prendre le dessus sur un adversaire lorsqu’il recule pour la première fois et qu’une lueur d’inquiétude traverse son visage. J’aime le terrasser et lire dans ses yeux le respect avant qu’il ne trépasse. C’est ce que je sais faire de mieux. C’est ce que je suis. Dieu m’a fait ainsi. S’il n’en avait été que de moi, en ce moment même, j’aurais les deux pieds bien plantés dans le sable de la Terre sainte et je taillerais du Sarrasin.
    —    Et pourtant, vous voilà perdu dans l’insignifiante seigneurie de Rossal. Que s’est-il passé ? Vous a-t-on chassé ?
    Montbard s’arrêta et se tourna vers moi. Dans son œil valide brillait une amertume perceptible et quelque chose comme du regret.
    —    Si j’ai quitté le Temple, c’est par respect de mon vœu d’obéissance, dit-il d’une voix éteinte. On m’a ordonné de le faire.
    —    Je ne comprends pas.
    —    Je ne te blâme pas. Je ne suis pas sûr de comprendre moi-même.
    Montbard inspira profondément et ferma les yeux. Il semblait essayer de mettre de l’ordre dans ses souvenirs.
    —    En juillet 1187, nous avons subi une terrible défaite aux Cornes de Hattin. Tout cela parce que cette cruche vide de Gérard de Ridefort, qui n’aurait jamais dû devenir Magister Templi 2 , cherchait la gloire personnelle et désirait la faveur de Guy de Lusignan et de sa femme, la reine Sybille de Jérusalem. Le maudit ambitieux s’est mis en tête de reprendre Tibériade et s’est retrouvé pris dans une plaine aride, sans eau. Quel sot ! Saladin l’a écrasé comme on piétine une fleur. Par sa faute, deux cent trente courageux frères ont été massacrés et écorchés vifs. Je fus un des rares rescapés et j’ai rapporté ce souvenir, dit-il en désignant du doigt la vilaine cicatrice qui découpait le côté gauche de son visage. Peu après, Saint-Jean-d’Acre, Ascalon,
    Jaffa, Sidon et Beirut sont tombées aux mains des Sarrasins. C’était la débandade. Les troupes civiles étaient en désarroi et le peu de templiers et d’hospitaliers qui restaient ne pouvaient pas tout défendre seuls. Saladin semblait impossible à arrêter. J’étais stationné à Jérusalem, où nous étions repliés, lorsque la nouvelle nous est parvenue qu’il s’y dirigeait. C’était en septembre. Je suis parti juste avant que la cité ne soit assiégée.
    —    Vous avez abandonné votre poste ?
    —    Foutre de Dieu, surtout pas ! s’insurgea-t-il. Un jour, on m’a mandé à la commanderie. Le commandeur de la cité, Robert de Sablé, qui devint Magister Templi lorsque Ridefort fut enfin occis, m’attendait. Il s’est planté devant moi et m’a demandé si j’étais disposé à l’ultime sacrifice pour l’Ordre. Croyant qu’il faisait référence à ma volonté de mourir au combat, je lui ai rétorqué que j’en avais fait vœu et que je n’avais qu’une parole. Mais il ne s’agissait pas de cela. Il a pris une cassette de bois sculpté, qui se trouvait sur une table, et me l’a remise avec trois clés. Il m’a annoncé que je devais abandonner l’habit à croix pattée, quitter la Terre sainte et me rendre à Béziers, dans le Languedoc. Il savait que j’en étais natif. Là, je devais retrouver dame Esclarmonde de Foix, sœur du comte Raymond Roger, et lui remettre la cassette en mains propres. Puis je devais disparaître et ne plus jamais entrer en contact avec le Temple. Le pauvre homme semblait déchiré par ce qu’il me demandait.
    —    Et vous avez accepté ?
    —    Un templier ne conteste pas les ordres. Mais, quelques semaines après mon départ, Jérusalem est tombée et je n’étais pas là pour la défendre avec mes frères. Après tout ce temps, je le regrette encore.
    Le regard de Montbard se perdit dans le vide. Je le laissai à ses pensées un moment avant de continuer à l’interroger.
    —    Qui était cette Esclarmonde ?
    —    Je l’ignore. Mais je n’oublierai jamais sa beauté et sa sérénité. Elle se tenait droite et son regard était, pénétrant. J’avais l’impression qu’elle me fouillait l’âme. On aurait dit une sainte.
    Elle a accepté la cassette, m’a remercié d’avoir protégé la Vérité et m’a dit que Dieu me le rendrait au centuple. Puis elle a posé sa main sur ma tête et a dit : « Dieu vous bénisse, Bertrand de Montbard. Je prierai Dieu pour qu’il vous fasse bon chrétien et vous mène à bonne fin. » Une bien étrange

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