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L'Héritage des Cathares

L'Héritage des Cathares

Titel: L'Héritage des Cathares Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hervé Gagnon
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même occasion leur salut. Les camps de chaque troupe étaient entassés les uns contre les autres, surchargés de tentes. Pour leur faire de la place, on avait abattu tous les arbres, dont je pouvais encore, çà et là, apercevoir les souches. Les chevaux, plus nombreux que tout ce que j’avais jamais vu, étaient gardés près des tentes. Un peu partout, des soldats étaient assis en cercle autour d’innombrables feux de camp qui, dans la dernière lumière du jour, prenaient des allures d’étoiles scintillant dans les cieux. Au-delà de la masse humaine, à quelque distance des murailles, je pouvais apercevoir de menaçantes machines de guerre qu’on avait placées là dans l’attente de l’assaut. Sans doute construites sur place avec les arbres coupés, elles étaient montées sur d’immenses roues en bois et leur bras en forme de cuillère portait déjà d’énormes pierres qui allaient bientôt être projetées contre les murs de la cité.
    Plus nous approchions, plus la puanteur était suffocante. Je reconnus l’odeur des excréments produits depuis des semaines par des milliers de soldats, qu’on accumulait dans des fosses à l’orée du camp. S’y mêlaient celles du fumier des chevaux, de la crasse humaine, de la viande grillée dont la fumée montait de chaque feu et des carcasses débitées et abandonnées çà et là pour y pourrir. Accompagnant le chant gracieux des moines, la pestilence fétide créait un contraste surréaliste.
    —    Nous y sommes, dit Evrart en plissant le nez de dégoût. Parbleu, ces vilains empestent comme des pestiférés.
    Une fois franchie la demi-lieue qui nous séparait de l’entrée du camp, nous nous heurtâmes à des gardes qui brandirent aussitôt des hallebardes dans notre direction, dressant un mur qui ne pourrait être franchi qu’au prix de la vie de nos montures. Evrart leva la main, à la fois pour signifier l’arrêt et pour montrer ses bonnes intentions.
    —    Qui va là ? s’écria l’un d’eux.
    —    Evrart, seigneur de Nanteroi. Je viens mettre mon épée et celle de mes hommes au service de Sa Sainteté Innocent III.
    Le soldat toisa le manteau de croisé que portait Evrart et consulta ses collègues du regard. Puis il enfourcha un cheval attaché tout près et nous fit signe.
    —    Bien, vous devez vous rapporter au légat. Suivez-moi, sire Evrart, dit-il.
    Sans autres palabres, nous pénétrâmes dans le camp à la suite du soldat, les autres gardes restant à leur poste.
    —    Ils ne sont guère prudents, chuchotai-je à Montbard, qui se trouvait à ma gauche. N’importe qui pourrait se présenter en portant la croix.
    —    Et alors ? Regarde autour de toi. Ils sont des milliers. Que pourraient faire quelques intrus à part se faire massacrer ?
    Nos montures avançaient lentement entre les tentes disposées dans le désordre le plus total, contournant les feux de camp et les hommes endormis. Sur place, l’odeur était encore pire et je me demandai comment des êtres humains pouvaient vivre dans des conditions que même les porcs refuseraient. La saleté était omniprésente et nos chevaux progressaient dans une boue dont je préférais ne pas connaître la composition. Des monceaux de déchets, d’armes brisées, de bois de chauffage et d’entrailles de bêtes vidées s’élevaient au hasard. Un peu partout, des hommes riaient, chantaient et titubaient gaiement, visiblement ivres. D’autres, à quatre pattes, vomissaient sans que leurs compères y prêtent la moindre attention. Derrière une tente, j’entrevis au passage une grosse femme allongée sur une table, ses seins énormes débordant de son corsage, la jupe relevée jusqu’à la taille et les jambes écartées. Un soldat, les braies sur les chevilles, s’activait entre ses cuisses en grognant, ses fesses ridiculement pâles allant et venant à un rythme effréné. Les sept ou huit autres qui faisaient la ligne derrière lui l’encourageaient de remarques grivoises et de rires gras en marquant le tempo de leurs mains. Stupéfait, je regardai Montbard.
    —    Bienvenue dans le monde de la guerre, Gondemar, grommela-t-il, le regard sombre et l’air renfrogné. À part chez les templiers, je n’ai encore jamais vu un camp militaire sans ribaudes et sans ivrognes. Il suffit qu’une bataille se pointe à l’horizon pour que l’homme devienne semblable à la bête et que Sodome et Gomorrhe renaissent de leurs cendres.
    Nous venions de

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