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L'Héritage des Cathares

L'Héritage des Cathares

Titel: L'Héritage des Cathares Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hervé Gagnon
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courage d’autant plus admirables qu’ils étaient sans espoir. Les soldats d’Amaury qui tombaient au combat étaient nombreux, mais ils étaient aussitôt remplacés par deux, trois ou quatre autres, hurlant, cheveux, barbes et vêtements maculés de sang, qui menaient l’assaut avec une fureur renouvelée. Déjà, les cadavres entremêlés jonchaient la place devant la grande porte et dans les rues qui y prenaient naissance. Je réalisai avec écœurement que les combattants pataugeaient dans une boue formée de terre et de sang frais qui atteignait leurs chevilles. Je me trouvai incapable d’imaginer combien de corps éventrés étaient nécessaires pour créer une telle immondice. Dégoûté au-delà des mots, j’eus le réflexe de me signer et de dire les paroles sacrées : in nomine patris... Aussitôt, une violente douleur me serra la gorge, empêchant l’air d’y pénétrer et me faisant grimacer. Mon geste s’arrêta à mi-chemin et je vacillai sur mes pieds. Ton corps te rappellera tes fautes et te refusera tout ce qui est divin, avait déclaré Métatron. Je comprenais maintenant l’horreur de ce qu’il avait voulu dire. Le Dieu que j’avais renié ne m’était pas accessible. J’étais seul. Plus que jamais. La douleur se résorba. Mais celle qui déchirait mon âme n’en fut que plus aiguë.
    Autour de nous, j’entrevis distraitement Evrart et ses hommes qui s’étaient lancés dans la bataille avec une énergie peu commune. Ils formaient une unité compacte et redoutable sur laquelle les adversaires se butaient à leurs risques et périls. Ils avançaient promptement, laissant une couche de morts et de blessés sur leur chemin. À leur tête, le seigneur de Nanteroi se battait comme un diable en multipliant les ordres et les encouragements, surveillant sans cesse ses hommes et les protégeant au besoin. Stupéfait, j’avançais à pas lents et disloqués, davantage poussé par les soldats dans mon dos que par la conviction. Les bras ballants, je me sentais vidé de toute volonté. À ma droite, je pouvais apercevoir du coin de l’œil la charpente massive de Montbard qui se démenait en riant comme un dément, au comble du bonheur.
    Devant moi, un cathare se défit de deux croisés avec une parade habile suivie de deux coups de tranchant qui détachèrent net le bras du premier et ouvrirent le cou du second. La fureur meurtrière et le désespoir lui déformant le visage, il les enjamba et s’élança dans ma direction, l’épée brandie au dessus de sa tête, prête à enfoncer mon heaume. Comme dans un rêve, je le regardai approcher, certain que ma dernière heure était venue et n’éprouvant qu’indifférence. Son élan fut interrompu en pleine course. Sa bouche se révulsa dans une grimace d’agonie. Je constatai qu’il était empalé sur une longue épée qui s’enfonçait dans son ventre jusqu’à la garde et émergeait à la hauteur de ses reins. L’arme était tenue par deux mains puissantes. Puis le malheureux fut secoué comme un fétu de paille et projeté au sol. L’épée fut tirée de ses entrailles, luisante d’un sang vermeil.
    Je reçus une violente claque derrière la tête qui fit résonner mon heaume comme la cloche d’une église et me tira un peu de l’état second où j’étais plongé.
    —    Tudieu ! tonna Bertrand de Montbard, son œil valide brillant de colère tout en restant alerte à ce qui se passait aux alentours. Le moment est mal choisi pour rêvasser, bougre d’abruti ! C’est la guerre ! Tue ou sois tué ! Je ne pourrai pas te protéger éternellement le croupion ! Et ne va pas croire que je te laisserai te faire tuer ! Tu vas vivre et regretter longtemps !
    À cet instant précis, un Biterrois en chemise et en tablier de cuir, armé d’un grand couperet de boucher, surgit sur la droite de mon maître en hurlant comme un dément. Machinalement, presque sans regarder, Montbard se baissa et enfonça son épaule dans le ventre de son assaillant. Lorsque celui-ci fut tombé à genoux, cherchant son souffle, il abattit le pommeau de son épée sur sa nuque. L’homme s’écroula au sol et Montbard lui enfonça avec indifférence son arme entre les omoplates.
    Il me mit une main dans le dos et me projeta vers l’avant.
    —    Ne reste pas là bouche béante comme un pauvre d’esprit ! gronda-t-il. Grouille ton cul ! Défends-toi ! Je n’ai pas formé une femmelette impressionnable ! Couilles molles ! Châtron ! À moins que

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