L'Héritage des Templiers
possédait encore les bols, les boîtes et les chandeliers qu’il avait fabriqués à partir d’essences locales.
Elle ne lui avait rendu visite ici qu’à de rares occasions. Elle avait vécu avec Mark à Washington, avant de s’installer à Atlanta. Lars avait surtout vécu en Europe et avait passé les dix dernières années de sa vie à Rennes-le-Château. Ni l’un ni l’autre n’avait jamais empiété sur l’espace vital de son conjoint sans sa permission. Ils avaient beau ne pas être d’accord sur certains points, ils étaient toujours restés courtois l’un avec l’autre. Une courtoisie sans doute excessive, avait-elle souvent songé.
Elle avait toujours cru que les royalties rapportées par le premier livre de Lars lui avaient permis d’acheter la maison, mais elle venait de découvrir que Henrik Thorvaldsen l’y avait aidé. C’était du Lars tout craché. Il faisait peu de cas de l’argent, dépensait tout ce qu’il gagnait dans ses voyages et ses lubies, lui laissant la responsabilité de payer les factures. Elle venait à peine de rembourser un prêt contracté pour payer les études universitaires de Mark. Son fils lui avait maintes fois proposé de prendre le relais, surtout depuis qu’ils ne s’entendaient plus, mais elle avait toujours refusé. Les parents étaient responsables de l’éducation de leurs enfants, et Stéphanie prenait ses responsabilités très au sérieux. Trop, peut-être, se disait-elle aujourd’hui avec le recul.
Lars et elle ne s’étaient pas du tout donné de nouvelles pendant les mois qui avaient précédé sa mort. Ils avaient eu une dernière entrevue désastreuse qui s’était soldée par une dispute de plus à propos d’argent, de responsabilités, de la famille. Lorsqu’elle avait tenté de se défendre hier auprès de Henrik Thorvaldsen, ses mots sonnaient creux, mais elle n’aurait jamais cru que quelqu’un fût au courant de ses déboires conjugaux. Thorvaldsen semblait en savoir long sur le sujet, pourtant. Lars et lui étaient-ils proches ? Malheureusement, elle ne le saurait jamais. C’était ça, le pire, avec le suicide : en mettant fin à ses souffrances, le désespéré ne faisait que prolonger la douleur de ceux qui lui survivaient. Elle aurait tant aimé se débarrasser de la sensation d’écœurement nichée au creux de son estomac. La douleur de l’échec, pour reprendre la formule d’un écrivain. C’était exactement ça.
Elle rejoignit Malone au salon et s’installa face à lui ; après le dîner, il s’était plongé dans la lecture du journal de Lars.
« Votre mari était très méticuleux dans ses recherches, commenta-t-il.
— La plupart des notes sont bien mystérieuses. À l’image de l’homme, constata Stéphanie, de la frustration dans la voix.
— Pourquoi vous sentez-vous responsable de son suicide ? » demanda Malone.
Stéphanie accepta son indiscrétion. Elle avait besoin de se confier. « Je me sens moins responsable que simplement concernée. Nous étions très fiers, tous les deux. Têtus, aussi. Je travaillais pour le ministère de la Justice, Mark était adulte, et on parlait de me donner mon propre département, alors je me suis concentrée sur ce qui me paraissait important. Lars a fait la même chose. Malheureusement, nous ne partagions pas nos passions respectives.
— Il est facile de se faire des reproches avec le recul. Impossible de s’en rendre compte sur le moment.
— Mais c’est là tout le problème, Cotton. Je suis toujours là, pas lui », s’écria-t-elle. Parler d’elle la rendait mal à l’aise, mais il fallait que certaines choses soient dites. « Lars était un écrivain talentueux, un chercheur doué. Tout ce que je vous ai appris tout à l’heure sur Saunière et le village, c’est passionnant. Si j’avais montré de l’intérêt pour tout ça de son vivant, il serait peut-être toujours là. » Elle hésita. « Il était tellement calme. Il n’élevait jamais la voix, ne se montrait jamais critique. Son arme, c’était le silence. Il pouvait passer des semaines sans parler. Cela me rendait furieuse.
— Ça ne m’étonne pas, répondit Malone avec un sourire.
— Je sais, j’ai mauvais caractère. Lars n’a jamais pu le supporter non plus. Au bout du compte, nous avons décidé d’un commun accord que la meilleure chose à faire, c’était de vivre notre vie chacun de notre côté. Ni lui ni moi ne souhaitions divorcer.
— Ce qui en
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