L'holocauste oublié, le massacre des tsiganes
manque évidemment pas d’ironie…
— « La principale chose qui manque à un prisonnier : c’est la liberté. »
— Tous ces hommes, toutes ces femmes n’ont absolument aucune situation sociale. Et pourtant, pendant la visite que nous eûmes l’occasion de faire dans le camp de Montreuil-Bellay, nous en avons rencontré de fort riches.
— L’un d’entre eux, originaire de Hongrie, y possède une ferme importante. Un autre détient au fond du grabat qui lui sert de lit pour 7 kilos d’or en barre. Une vieille femme se pare d’un collier magnifique entièrement monté avec des louis d’or. Ce collier vaut plus d’un million.
— Dans les baraques du camp, il y a largement de la place pour que chaque famille, si nombreuse soit-elle, puisse vivre dans un confort relatif. Eh bien non ! Comme au temps où ils vivaient dans leurs roulottes, ces gens du voyage préfèrent s’entasser dans un angle et coucher par famille entière dans un même lit.
— Et pourtant, il en est ainsi. Ils pourraient manger convenablement dans un réfectoire spacieux et clair. Non… Il a fallu que l’on se décide à leur donner leur portion de nourriture. Ils aiment mieux allumer des feux devant leurs baraques et cuisiner dans des ustensiles de fortune.
— Car, avant toute chose, les Gitans ont essentiellement l’esprit de famille.
— C’est encore un de leurs gardiens qui nous raconte que lorsqu’il y a un malade, le reste de la famille fait cercle autour de lui, et, geint en sa compagnie.
— Cet esprit de famille se retrouve chez ce peuple, aussi bien dans les mauvais jours que dans les bons. À ce propos, nous savons une anecdote, c’est celle de la fille d’un certain Macroumini, qui rendit fou d’amour le descendant direct du cardinal de Beatoun, primat d’Écosse ; et qui réussit à s’en faire épouser. Devenue lady Beatoun, son premier soin fut de nommer son père et ses frères gardes-chasses des terres de son mari…
— Le résultat fut qu’au bout d’un an et deux mois, il n’y avait plus un seul lapin dans les garennes, ni de faisans dans la faisanderie.
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Le décret du 6 avril 1940 qui interdisait le déplacement des nomades – appellation qu’il faudra maintenant traduire par tsigane car le décret s’adresse aux nomades titulaires d’un carnet anthropométrique, donc aux tsiganes – et leur mise sous surveillance par la police française, sera complété le 29 avril par de nouvelles instructions aux préfets signées du ministère de l’intérieur. Ce texte servira de référence à l’ensemble des fonctionnaires de police.
Paris, le 29 avril 1940
LE MINISTÈRE DE L’INTÉRIEUR
à Messieurs les Préfets
Le décret du 6 avril 1940, publié au « J.O. » du 9 courant, page 2 600, a interdit la circulation des nomades pendant la durée des hostilités et vous a prescrit de leur assigner dans votre département une localité où ils seront astreints à séjourner sous la surveillance des services de police.
Pour répondre à diverses questions qui m’ont été adressées par plusieurs de vos collègues, je vous précise ci-après la portée et les conditions d’application de ce décret.
I. – But de la réglementation nouvelle.
Ce but est exposé dans le rapport qui précède le décret : leurs incessants déplacements au cours desquels les nomades peuvent recueillir de nombreux et importants renseignements, peuvent constituer, pour la Défense nationale un danger très sérieux ; il est donc nécessaire de les soumettre à une étroite surveillance de la police et de la gendarmerie et ce résultat ne peut être pratiquement obtenu que si les nomades sont astreints à séjourner dans un lieu déterminé.
II. À qui s’applique ce décret ?
À tous individus quelle que soit leur nationalité qui sont soumis aux dispositions de l’article 3 de la loi du 16 juillet 1912 et qui, comme tels, sont ou doivent être titulaires d’un carnet anthropométrique.
Si certaines situations exceptionnelles vous paraissent réclamer un examen spécial, vous voudriez bien me les signaler sous le timbre de l’inspection générale des services de police criminelle.
III. – Résidence des nomades.
L’article 2 du décret dispose que le préfet fixera, par arrêté, la localité où les nomades devront se rendre. La question s’est posée à ce sujet de savoir s’il convient de grouper tous les nomades d’un département
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