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L'homme au ventre de plomb

L'homme au ventre de plomb

Titel: L'homme au ventre de plomb Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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devrais-je dire,
en vous présentant mon compliment. Que me vaut votre visite ?

    â€“ Monsieur,
je dois recourir à vos lumières sur une affaire bien
délicate.

    â€“ Il n'y a
rien qui soit délicat entre nous, et mon aide vous est acquise
comme à un ami et comme à un protégé de
M. de Sartine.

    Nicolas se
demandait parfois si ses propres qualités suffiraient un jour
à justifier l'aide qu'on lui apportait. Quand cesserait-il
d'être prisonnier de son image ? Il s'en voulut de cette
réaction puérile. M. de La Vergne ne disait pas cela en
mauvaise part ; c'était une manière de compliment.
Chacun marquait son rang dans cette société par sa
naissance, ses talents, mais aussi ses alliances ou ses protections.
M. de La Vergne appartenait à cette société dans
laquelle il était impossible de n'être point sensible à
de telles considérations. Eh bien, il allait lui en donner.

    â€“ Le
ministre, M. de Saint-Florentin...

    Le secrétaire
des maréchaux s'inclina.

    â€“ ...m'a
chargé de démêler une affaire des plus
confidentielles, concernant un ancien officier général,
le comte de Ruissec, qui vient...

    â€“ De perdre
sa femme et son fils. La rumeur va bon train, mon cher. Il est vrai
que l'homme était peu aimé.

    â€“ Justement.
Auriez-vous la bonté de m'éclairer sur sa carrière
? Je me suis laissé dire qu'il avait quitté le service
dans des conditions un peu particulières.

    M. de La Vergne
désigne de la main les cartons qui tapissaient les murs de son
bureau.

    â€“ Inutile de
consulter mes archives. C'est une histoire dont j'ai entendu parler.
Vous savez que nous recevons beaucoup d'informations. Cela peut
quelquefois servir dans les affaires que nous traitons. Votre Ruissec
était bien brigadier général et ancien colonel
de dragons ?

    â€“ C'est
précisément cela.

    â€“ Eh bien,
mon cher, en 1757, année terrible, nos troupes sous le
commandement du prince de Soubise avaient envahi le Hanovre. Des
plaintes se sont multipliées contre votre homme. Il passait
pour avoir partie liée avec des munitionnaires et des
trafiquants. Cela n'était pas nouveau et il n'était pas
le seul. On rogne sur les vivres et sur la viande, on ajoute de
l'ordure à la farine pour faire bon poids. Résultat,
les hôpitaux sont les plus mal lotis et les soldats y
pourrissent inhumainement. Bouillon infâme, viande pourrie et
charogne non écumée, le tout pour faire des économies,
sinon des profits. Chose plus grave encore, pendant des mois, le
trésorier versa à M. de Ruissec un paiement réel
en argent tant pour les hommes que pour les chevaux au prétexte
d'effectifs en fait inexistants. Cela aussi est malheureusement
fréquent Il en aurait réchappé.

    â€“ Mais alors
?

    â€“ J 'y
viens. Un lieutenant protesta de ces manquements et voulut même
les dénoncer. Ruissec réunit sur-le-champ un conseil de
guerre. Nous étions face à l'ennemi. L'accusé
fut condamné pour lâcheté et aussitôt
pendu. Mais il avait des amis et, pour le coup, la rumeur grossit.
Des informations concordantes parvinrent à Versailles. Sa
Majesté en fut avisée, mais demeura silencieuse. Chacun
comprit alors que d'autres influences s'exerçaient et
que le roi n'en ferait pas plus. Le comte, cependant, quitta le
service. C'est toujours pour moi un étonnement de l'avoir vu
s'insinuer et se faire une position à la Cour auprès du
dauphin, ce prince si vertueux, et auprès de Madame par sa
femme !

    â€“ Vous
rappelez-vous le nom de ce lieutenant ?

    â€“ Certes
non, mais je le chercherai et vous le ferai tenir. Mais mon histoire
n'est pas achevée. On raconte que des preuves accablantes ont
été rassemblées contre M. de Ruissec. De temps à
autre, une pièce arrive chez le ministre de la Guerre ou ici,
au tribunal des maréchaux. Mais le tout si décousu et
si parcellaire qu'il serait impossible de l'utiliser. Il appert qu'un
correspondant inconnu s'évertue à maintenir cette
affaire vivante dans les mémoires. Pour quels motifs ? Nous
l'ignerons. On dit aussi que Ruissec lui-même disposerait
d'autres preuves compromettantes pour le prince de Soubise lui-même.
Que dites-vous de cela ? Et qui dit Soubise...

    Il baissa la voix.

    â€“ … dit
Paris-Duverney, le

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