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L'honneur de Sartine

L'honneur de Sartine

Titel: L'honneur de Sartine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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main, de revenir à l’hôtel de Noblecourt dans un quart d’heure. Il ne s’agissait pas de se livrer au stratagème habituel pour déceler s’il était suivi. Chacun connaissait son logis et ce serait à partir de ce lieu qu’il risquait d’être à nouveau filé et surtout, à nouveau menacé. Il se dirigea vers la chapelle de la
Vierge où il s’agenouilla. Par ce temps de canicule, l’odeur des cierges et de l’encens ne dissipait pas le remugle de pourrissoir qui montait des profondeurs du sanctuaire. Il songea que tout avait commencé aux Saints-Innocents. Les morts l’entouraient comme ceux de la danse macabre du vieux cimetière. Étaient-ils plus redoutables que les vivants ?

    Prosterné, il se souvient des enseignements du chanoine Le Floch et revoit le vieux visage ridé au regard presque enfantin ; il l’entend même murmurer ses conseils : Vois-tu, la simplicité est la droiture de l’âme . N’hésite à faire le vide en toi sans t’efforcer en rien, car l’homme est un mystère à lui-même et il suffit d’être en tourment pour que le Seigneur comprenne nos faiblesses. Au pied du sacré tribunal, ton amertume sera chassée de ton cœur, même si mille soucis l’appesantissent. Tu dois alors t’anéantir et te laisser conduire par les voies singulières et peu battues qui te seront signifiées . Cette voix aimante l’émeut jusqu’aux larmes et, à l’issue d’un long agenouillement, il retrouve la rue et se sent apaisé.

    À l’hôtel de Noblecourt il eut la surprise de retrouver Naganda de retour de Versailles. Louis n’avait pu quitter son service, ayant eu l’honneur d’être requis par la reine pour lui donner la réplique à la répétition d’une pièce qu’elle interprétait avec ses beaux-frères. Le roi, apercevant Naganda au moment où il partait pour la chasse, l’avait fait approcher. Il l’avait chargé de prévenir le petit Ranreuil d’avoir à se présenter dans les meilleurs délais. Nicolas entraîna son ami à l’office ; il ne voulait pas troubler M. de Noblecourt par le récit d’une journée dont il avait failli ne pas voir le terme. Il informa
Naganda des périls qui pesaient sur lui. Devant repartir pour Versailles, il souhaitait le faire en sûreté.
    Au cours de ses enquêtes il avait usé différentes manières d’échapper à des poursuivants. La plus pittoresque avait marqué son départ pour l’Angleterre où, sous le couvert d’un embarras de voitures, il avait pu s’échapper, passant d’une caisse à l’autre alors que des complices organisaient le désordre pour gazer sa disparition. Les deux amis échafaudèrent plusieurs plans, rejetés l’un après l’autre pour avoir déjà été utilisés. À ce moment, Fauroux, le maître boulanger du rez-de-chaussée, apparut.
    Convoqué par Catherine, il venait chercher un cuisseau de veau entouré de ces fameuses pommes de terre que, sur les conseils de l’ancienne cantinière, Poitevin cultivait depuis longtemps. C’était un plat de haut goût concocté par la chaleur ardente du four du boulanger. Fauroux entourait Nicolas d’une dévotion sans faille, depuis que, naguère, celui-ci l’avait tiré d’un fort mauvais pas 45 . Dans la tenue blanche de son état, calotte de coton sur la tête, il était couvert de farine. Le dévisageant, le commissaire se mit à rire.
    – J’ai trouvé ! dit-il à Naganda surpris de cette hilarité.
    Il s’adressa à Fauroux.
    – Disposes-tu de pain rassis ?
    – Oui, je le conserve pour quelques regrattiers qui s’en contentent afin d’abonnir leur soupe. Mais…
    – Tu m’en prépares une corbeille et tu me prêtes une de tes tenues blanches, enfin, la plus sale… Et des savates de toile. Il ne manquerait plus que les bottes me trahissent !
    Surpris, il allait partir, oubliant le but premier de sa venue, quand Catherine le houspilla et lui tendit un grand plat de faïence à feu recouvert d’un torchon.
    – Gredin, tu oublies mon veau ?
    – Vêtu de blanc, enfariné comme un merlan, cambré sous le poids de ma corbeille, qui me reconnaîtrait ? reprit Nicolas. Nous ferons entrer ma voiture dans la cour, elle en ressortira à grand train.
    – Il sera évident que personne n’en occupe la caisse.
    – Rideaux baissés ?
    – Cela intriguera. J’ai une meilleure idée. Je pars dans le fiacre vêtu comme toi, le tricorne abaissé. Chacun s’y laissera prendre. Et toi, tu sors par la boulangerie.
    – Je ne veux

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