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L'honneur de Sartine

L'honneur de Sartine

Titel: L'honneur de Sartine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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procéder pour ne pas heurter sa sensible susceptibilité. Du reste, l’inspecteur, père d’une famille nombreuse nichée dans une maison du Faubourg Saint-Marcel, s’en était un jour gentiment ouvert au commissaire. Il déplorait n’avoir pu depuis des années faire retour à Chinon. Il possédait à Cravant un petit clos, L’Étournière, qu’un sien cousin cultivait et qui lui donnait, bon an mal an, quelques centaines de bouteilles. Nicolas en avait tâté à l’occasion de ce resbaudissant breuvage, surpris par une fraîcheur de pierre à fusil à laquelle s’ajoutait un arôme de cassis et de fourrure sauvage. Cet appariement rustique l’avait tant séduit qu’il avait bu plus que de raison. Ravi, Bourdeau avait fait porter aussitôt une bourriche de bouteilles chez
Noblecourt. Il s’agirait donc d’offrir un adjoint à l’inspecteur en le chargeant de la responsabilité de le former. Ainsi serait habilement évité un éventuel rejet de l’inspecteur au cas où il aurait le sentiment que sa place auprès de Nicolas et dans son amitié risquait d’être compromise, sinon menacée.
    Le père Marie leur apporta un réconfort tout droit venu de la taverne amie de la rue du Pied-de-Bœuf. Les oreilles de cochon grillées étaient croquantes à souhait et une salade de pissenlits aux œufs durs rafraîchissait l’ensemble arrosé d’une bouteille d’un vin léger.
    Nicolas continuait d’interroger Gremillon en douceur. Il apprit ainsi que sa famille, originaire d’Origny, en Lorraine, était parisienne depuis deux générations. Sa mère était morte, mais son père, graveur sur pierres fines, tenait toujours boutique rue du Temple et s’était fait une spécialité de la gravure sur camées qu’il fixait ensuite sur des bagues, des fermoirs, des agrafes ou des broches. Gremillon lui montra une petite tabatière d’argent où se distinguait en relief le profil du roi. Interrogé sur les raisons de ne s’être point engagé à la suite de son père, le sergent avoua, en rougissant, que la perspective de travailler assis avec une mauvaise lumière l’avait rebuté et que l’esprit d’aventure, sa force physique et son habileté révélée aux armes l’avaient tout naturellement dirigé vers le guet. Restait que, désormais il avait fait le tour de cette activité, qu’elle lui paraissait, en dépit des surprises quotidiennes, un peu routinière et qu’il aspirait avec force à conjuguer un jour l’activité physique à celle de l’intelligence des situations criminelles où l’agilité de l’esprit prévalait sans pour autant contraindre celui qui s’y consacrait à la seule obscurité d’une tâche assise.
    Deux heures s’étaient écoulées quand Bourdeau revint.
    – Tu as la mine affriandée de quelqu’un qui a découvert ce qu’il cherchait !
    – Certes. Ce fut malaisé car les bureaux étaient fermés et j’ai dû aller quérir M. Jouanet dans son logis qui heureusement n’est guère éloigné, boulevard de la Madeleine. Tout grommelant, il est venu m’ouvrir ses tiroirs !
    – Et quelle récolte ?
    – En un mot comme en cent, tu avais visé au cœur de la cible. C’est un notaire qui a acquis la pleine propriété du terrain où se tenaient les combats de bêtes féroces. Il a même ouvert une requête en vue de se conformer aux nouvelles règles régissant l’alignement des immeubles…
    – La beauté de la ville en dépend…
    – Et sa sûreté, ajouta Gremillon.
    – Et sa salubrité.
    – Et, reprit Bourdeau, ces autorisations sont partagées entre la police, le bureau de la ville et celui des finances. Le dernier donne en ultime ressort la permission de construire. Pour faire court, car je vous sens sur les charbons, il s’avère que le susdit notaire qui a déposé les plans des immeubles en projet se nomme Gondrillard et tient étude place Dauphine.
    – Je le présumais ! dit Nicolas d’un ton farouche.
    – Et tu ignores encore ce qui apporte davantage de ragoût à la chose. Nos bureaux, qui sont des modèles d’organisation et qui autorisent nombre de recoupements, colligent à tout hasard tout ce qui concerne les requérants. Et qu’ai-je appris dans une de ces notules ? Que ce personnage est réputé cor
rompu, trafiquant à toutes mains dans des imbroglios financiers…
    – On pouvait s’en douter !
    – Et qu’il a partie liée avec les traitants les moins sûrs de la place. Il y a plus grave encore. Le doyen de la

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