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L'honneur de Sartine

L'honneur de Sartine

Titel: L'honneur de Sartine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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dire de l’hôtel de Noblecourt aux murailles pentues et aux planchers inégaux. Pour lui une demeure était un être vivant qui devait posséder son histoire, un passé, des ombres et des lumières. L’éclatante blancheur de l’hôtel de Ravillois, son éclat artificiel et son ostentation aggravaient encore cette défavorable impression.
    Un vieux valet qu’il supposa être celui du défunt les conduisit à sa chambre. Gévigland ouvrit la porte avec la clé qu’il avait conservée. La surprise du commissaire fut grande de découvrir le décor dans lequel avait choisi de vivre M. de Chamberlin. Il arrêta ses compagnons sur le seuil. Bourdeau sourit, habitué aux pratiques de son chef qui aimait toujours prendre une vue générale d’un lieu avant de se consacrer à l’examen des détails. La chambre, de grandes dimensions, s’étendait devant eux. De la porte on envisageait à gauche une double croisée dont les volets intérieurs étaient à demi dépliés, laissant pénétrer suffisamment de lumière pour distinguer tous les éléments de la pièce. Devant cette
croisée, il découvrit un fauteuil à haut dossier recouvert de cuir gaufré et une grande table de bois massif tenant lieu de bureau, à en juger par les papiers qui s’y amoncelaient. Au fond, face à la porte d’entrée, une cheminée de marbre de Rance, rouge mêlé de veines bleues et blanches, montrait un âtre encore propre. De chaque côté, de hautes bibliothèques croulaient sous les livres, les tablettes les plus basses alignaient les in-folio. Nicolas avança d’un pas pour élargir sa vision. À sa droite, il aperçut le lit à baldaquin. Ce n’était plus que désordre et effondrement. Le ciel tombé recouvrait de guingois un entremêlement de bois rompus et de draperies. Seul un bras, pendant du linge d’une manche, signalait la présence du cadavre.

II
    L’hôtel de Ravillois
    « Car des chiens nombreux m’environnent, une troupe de scélérats m’assiège. »
    Psaume XXII
    Nicolas foulait maintenant un tapis d’orient élimé aux motifs compliqués et aux bords effrangés. Quel contraste avec les lambris rechampis en gris-blanc et leurs baguettes dorées. À droite et à gauche de la porte, le long des murs, deux cabinets en bois précieux marqueté reposaient sur des bâtis d’essence commune. Ils étaient semblables en tous points avec leurs motifs de rinceaux encadrés de filets, volutes, feuillages, fleurs et figures grotesques. Chacun comprenait une vingtaine de tiroirs encore plus ornés. Ces cabinets étaient de facture ancienne et détonnaient avec le style général de l’hôtel de Ravillois. La surprise du commissaire était si visible que le vieux valet qui les avait suivis intervint.
    – Ah, oui ! Monsieur aimait ses vieux meubles. Il disait que ces antiques lui dissimulaient toutes ces crèmes et ces dorures qui l’écœuraient.
    – Qui êtes-vous ? demanda Nicolas en lui posant la main sur le bras.
    – Tiburce, Tiburce Mauras, monsieur, le valet de M. de Chamberlin. Nous étions frères de lait et élevés ensemble. Je ne l’ai jamais quitté.
    Une larme roulait sur sa joue affaissée. Il baissa une tête couronnée de quelques cheveux blancs.
    – Demeurez avec nous, vous pourrez nous être utile.
    Il s’approcha du lit pour en faire lentement le tour. Il s’agenouilla et regarda dessous, tendit une main, s’allongea pour saisir quelque chose qu’il mit dans sa poche sans un mot. Il se releva et parcourut la pièce, s’arrêtant pour regarder tel ou tel objet. Il demeura un long moment devant la cheminée, à l’arrêt, l’air intrigué, avant de passer ses doigts sur la tablette. Il nota quelque chose dans son petit carnet noir. Il défila à pas lents devant les bibliothèques et se pencha pour contempler avec attention la ligne des in-folio. Il se porta devant la croisée pour contempler la perspective de la chambre.
    – De cette déambulation, dit Bourdeau, que déduisez-vous ?
    Le vouvoiement redevenait presque toujours de rigueur devant des étrangers, y compris Gévigland, ami du deuxième cercle.
    – Quelques constatations et en conséquence quelques questions. Et un objet.
    Il sortit de sa poche une petite bille de verre.
    – Oh ! Une agate, s’écria le valet. Elle doit appartenir à M. Charles.
    – M. Charles ?
    – Oui, le petit-neveu de monsieur. Il venait souvent jouer ou lire ici. Monsieur l’aimait beaucoup.
    – Voici un premier mystère

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