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L'honneur de Sartine

L'honneur de Sartine

Titel: L'honneur de Sartine Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-François Parot
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tout. Plutôt pour nourrir contre son parent de redoutables desseins.
    – Dans quel but, selon toi ?
    – Va savoir ! Reste que le vieux surveillait d’un œil les déportements du godelureau. Il n’est pas avilissement qui ne mérite un jour sa sanction… Rassemblait-il des éléments en vue d’une manœuvre ? Moyen de déshonorer le fils préféré de ce M. de Ravillois qu’il détestait de notoriété ? J’ai, comme tu le verras, quelques raisons de le penser.
    – Je crois qu’une conversation avec cet intéressant petit jeune homme s’impose.
    – Hélas ! Tu devras attendre. Toute la famille quitte ce matin Paris afin d’assister à la pompe funèbre de M. de Chamberlin. Elle sera célébrée dans deux jours, soit samedi, dans l’église des Récol
lets, à Sézanne, en Champagne, où il possédait un bien.
    – Voilà une hâte bien fâcheuse et des plus étrange.
    – Ce n’est pas tout, et je te réserve le plus surprenant pour la fin. Le vertueux Tiburce, ce parangon des serviteurs dévoués…
    – En voilà bien une autre ! Que lui reproche-t-on ?
    – Ah !
    Alors pour recourir durant l’âpre saison
    Il fallut aux brebis dérober leur toison.
    – Que me chantes-tu là ?
    – Voilà quelqu’un qui, sous les trompeuses apparences déployées, a le secret de dissimuler une vie des plus désordonnées. Je ne sais si un reste d’honneur lui faisait servir son maître comme il convient.
    – Allons, au fait.
    – Ce vieillard entretient une galvaudeuse logée comme une princesse dans un entresol de la Chaussée d’Antin. Une certaine Henriette Bussaud dite la Lofaque. Souviens-toi que tu avais, l’autre jour, esquissé une réflexion sur la réticence de M. Patay au sujet du susdit Tiburce.
    – Sans parvenir à démêler pourquoi. Et alors ?
    – Et alors ? Je suis allé consulter le Registre.
    – Un vieux serviteur de famille, surveillé par la pousse et qui aurait sa notule dans nos bureaux ?
    – Tu ne crois pas si bien dire. L’homme a été soupçonné, en 1772, d’intérêts dans des établissements de jeux clandestins. Il y faisait attirer les jeunes étrangers, en particulier les petits Anglais du Grand Tour , ensuite dépouillés au cours de parties
simulées. Sans compter cela, des matrones distinguées, qu’il tenait en sa main, présentaient à ces jeunes gens de prétendues innocentes. Tu peux imaginer la suite. Il a fini par être découvert et convaincu, en 1775.
    – Arrêté ? Jugé ?
    – Point du tout ! Lors des événements de la guerre des farines, Le Noir écarté de la lieutenance générale de la police au profit d’Albert, ton ami…
    Nicolas hocha la tête en souriant.
    – J’étais vieille cour et peu en grâce alors…
    – Or, apprends que cet Albert a fait de Tiburce son espion particulier auprès de M. de Chamberlin, contrôleur général de la Marine !
    – Cela est intrigant. Et dans quel but ?
    – Souviens-toi des cabales de l’époque. Albert était l’homme de Turgot. Rassembler des informations sur les crédits de la Marine, c’était espérer pouvoir réunir des armes et des arguments contre l’adversaire. Que souhaitait Albert ? Il avait remplacé Le Noir, fidèle de Sartine, et ce dernier était toujours aux affaires, justement ministre de la Marine.
    – Je comprends mieux. Je suppose que ce petit manège d’espion ancillaire auprès de M. de Chamberlin a pris fin quand Albert fut écarté. Ce que tu me découvres implique une autre interrogation. Cet espionnage était-il compatible avec l’attachement sincère qu’il paraissait avoir pour son maître ?
    – M’est avis que M. de Chamberlin en était informé, le tolérait et même s’en servait. Du moins si j’en crois M. Patay.
    – Tu l’as revu ?
    Bourdeau allumait sa vieille pipe ; son visage disparut un instant dans le nuage des premières bouffées.
    – Certes, pendant que tu faisais ta cour à Versailles. Persuadé qu’il avait gardé par-devers lui quelques remarques intéressantes sur le valet de chambre, je lui ai mis cartes en mains. Il est honnête et a bien voulu consentir à s’ouvrir à nous de ce qu’il savait. Et tu vas pouvoir juger de l’importance de ses propos, ceux de quelqu’un qui approchait confidemment M. de Chamberlin. Leur nature est telle qu’ils ne se peuvent confier que sous le sceau du secret et alors qu’il n’en résulte plus rien pour le principal intéressé.
    – Le brave

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