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L'Hôtel Saint-Pol

L'Hôtel Saint-Pol

Titel: L'Hôtel Saint-Pol Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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corniche ; une fois là, il eût pu aisément atteindre la fenêtre ; mais le diable, c’est que cette corniche elle-même était hors d’atteinte…
    – À moins que je ne sois oiseau, dit à haute voix le chevalier, avec un rire nerveux.
    – Ou à moins qu’on ne vous hisse jusque-là, dit quelqu’un près de lui.
    Passavant sursauta. Au même instant, il eut la dague à la main ; à deux pas de lui, une silhouette colossale s’érigeait sur l’écran des ténèbres. Cela demeurait immobile.
    – Qui êtes-vous ? gronda le chevalier.
    – Je suis la Huidelonne, répondit la silhouette tranquillement.
    Passavant écarquilla les yeux, s’approcha – et rengaina sa dague : il venait de reconnaître un ami. Oui, un ami ! Le geôlier de la Huidelonne !…
    – Vous ne vous rappelez pas ? dit le colosse de sa voix rude où il essayait de mettre un peu de douceur.
    – Tout, fit Passavant, je me rappelle tout. Ces années vivront toute ma vie, heure par heure, minute par minute.
    – Alors, vous vous rappelez le jour où… c’était dans le dernier mois de captivité… j’avais descendu les deux épées démouchetées. Je dois vous dire une chose… Quelquefois, quand je venais ferrailler avec vous, je me disais : « Il est maintenant, aussi fort que moi. Il pourrait me tuer, et s’en aller… » Je me disais cela, mais je vais vous étonner… eh bien, cela doublait mon envie. Quand j’arrivais à croire que vous pouviez me tuer, je tremblais de plaisir à l’idée d’entendre le tic-tac des fers… comprenez-vous ?
    Passavant eut un geste vague. Peut-être ne comprenait-il pas très bien. Il dit :
    – Continuez, je vous prie.
    – Bon. Eh bien, ce jour-là, donc, vous m’avez poussé dans un angle du cachot ; plus moyen de reculer, j’étais à vous ! j’ai vu la pointe de votre épée contre ma gorge, et je me suis dit : « Cette fois, il va me tuer. »
    – Ah ! fit Passavant.
    – Oui. J’ai vu cela dans vos yeux.
    – Vous avez mal vu, trembla la voix de Passavant.
    – J’ai vu cela, vous dis-je !… Et puis, lentement, doucement, vous avez baissé la pointe de votre épée, vous avez laissé le fer sur les dalles, vous vous êtes retiré dans l’angle opposé, et vous vous êtes mis à pleurer.
    Passavant essuya d’un revers de main quelques gouttes de sueur qui pointaient à son front. Le geôlier de la Huidelonne reprit :
    – Alors j’ai ramassé les deux fers, sans rien dire ; je suis sorti, et je vous ai enfermé ; mais plus d’une heure je vous ai écouté pleurer derrière la porte, et j’aurais donné une goutte de mon sang pour racheter chacune de vos larmes. Or, quand « elle » vous a délivré, ce fut à mon tour de pleurer…
    – Elle ? murmura-t-il.
    – Celle que vous vous voulez voir ! dit le geôlier. Savez-vous que depuis le jour où elle vous a délivré, il ne se passe pas de matin qu’elle ne vienne là-bas, dans ce repaire de la mort où je vis comme un loup, et où elle entre, comme un rayon d’aurore. On dit qu’elle est l’ange de l’Hôtel Saint-Pol. Elle est devenue aussi l’ange de la Huidelonne…
    – Et que vient-elle faire ? balbutia Passavant.
    – Parler de vous…
    Le chevalier se sentit pâlir. Une sorte d’angoisse l’étreignit à la gorge, mais ce fût si doux qu’il eût voulu en mourir. Le geôlier continua :
    – Elle a tout voulu savoir, et comment vous avez été jeté dans le cachot, comment vous viviez, ce que vous faisiez, disiez et pensiez. Voilà. Je parle… Elle écoute, les yeux dans mes yeux. Hier, elle m’a laissé cette bourse…
    Le geôlier tira en effet de son escarcelle de cuir une bourse en soie qu’il garda un instant dans sa main, puis il la remit à sa place.
    – Geôlier, dit Passavant d’une voix rauque, je vous achète cette bourse pour le prix que vous voudrez.
    – Non, dit tranquillement l’homme de la Huidelonne. N’en parlons plus. Mais je dois aussi vous dire que tout à l’heure, je me trouvais sur le mur, près de la sentinelle. L’archer ne me voyait pas. Mais moi je vous ai vu. J’ai compris votre manœuvre du jeu de cartes. Si le soldat n’était pas descendu, je vous eusse ouvert la porte de fer, moi… Et vous êtes entré. Je vous ai vu arrêté sous ces fenêtres… ses fenêtres, et je sais ce que vous voulez.
    Passavant étendit le bras dans la nuit, et dit :
    – Je donnerais cinq ans de ma vie pour pouvoir me hisser jusqu’à

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