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L'Hôtel Saint-Pol

L'Hôtel Saint-Pol

Titel: L'Hôtel Saint-Pol Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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cette corniche.
    – Bon ! dit le geôlier. Tenez-vous bien. Raidissez-vous.
    Le colosse, en même temps, se baissa, saisit le jeune homme par les deux chevilles, et, sans effort apparent, d’un mouvement uniforme, le souleva, l’enleva, le porta à bras tendus ; un spectateur qui se fût trouvé là pour admirer ce tour de force eût sans doute donné une part de cette admiration au chevalier – assez maître de ses nerfs pour faciliter la besogne en se raidissant, « en faisant la planche » selon le terme admis chez les gymnastes.
    Passavant atteignit la corniche, et s’y tint debout.
    Dans cette position, ses épaules arrivaient au rebord de la fenêtre, c’est-à-dire qu’il pouvait très bien voir ce qui se passait à l’intérieur.
    À l’instant même, son regard s’agrandit, s’emplit d’épouvante.
    Passavant voyait distinctement. Et ce qu’il voyait lui semblait affreux.
    Gringonneur ne s’était pas trompé.
    Isabeau de Bavière était là… il la reconnut au premier coup d’œil… et près d’elle, les quatre molosses de Bourgogne, Ocquetonville, Scas, Guines, Courteheuse !
    Il voyait Odette appuyée d’une main à la table, pâle et résolue…
    Il n’entendait pas ce qui se disait, mais il comprenait que la jeune fille se débattait contre Isabeau. Soudain il y eut un violent geste de la reine. Il y eut un cri qu’il entendit, et ces paroles :
    – Prenez-la ! Prenez-la !
    Odette se jeta vers la fenêtre.
    Passavant, d’un effort de tout son être, poussa, les verres sautèrent, la fenêtre s’ouvrit ; le jeune homme, dans la même seconde, sauta à l’intérieur, et à ce moment même, reprit ce sang-froid excessif qu’on retrouve dans les minutes où il est question de vie ou de mort.
    – Bonsoir, messieurs, dit-il de sa voix narquoise, j’ai trouvé les portes fermées, alors j’entre par la fenêtre. Veuillez m’excuser, madame…
    Ces derniers mots s’adressaient à Isabeau.
    Odette se tenait debout dans l’embrasure de la fenêtre ; son regard loyal se fixait sur le chevalier avec une expression d’infinie reconnaissance.
    Isabeau, figée, contemplait le chevalier.
    Ce fut étrange : son premier mouvement fut de la joie.
    Jean sans Peur avait menti ou s’était trompé : Passavant vivait. Avec la prodigieuse rapidité de son imagination, déjà, elle échafaudait des plans où le chevalier jouait le grand rôle qu’elle réservait à l’homme attendu, l’homme capable de la comprendre, de l’aimer comme elle voulait être aimée. L’attitude d’Odette déchaîna la haine dans son cœur. Elle rugit :
    – Ils s’aiment !…
    Haletante, l’œil en feu, hérissée comme sa tigresse dans les moments de fureur, elle se tourna vers les quatre spadassins et hurla :
    – Eh bien, prenez-les tous deux !
    Passavant tira sa longue rapière et prononça doucement :
    – Ne craignez rien, mademoiselle, aucun de ces sacripants ne vous touchera seulement du bout du doigt.
    – Je n’ai plus peur, dit Odette.
    – Prenez-les ! Mais prenez-les donc ! cria Isabeau. Lâches ! que faites-vous ?…
    – Le mort ! râla Guines.
    – C’est sa voix que nous avons entendue dans la nuit du meurtre ! grelotta Scas.
    Ocquetonville et Courteheuse ne dirent rien. L’épouvante, chez ces deux-là, était au paroxysme. Isabeau, de ses yeux dilatés par la stupeur, les considérait. Il y eut quelques secondes de silence terrible, puis une sorte de gémissement. Et tout à coup, un bruit de pas précipités qui s’éloignaient : c’était Ocquetonville qui s’élançait, comme fou, bondissait à travers les appartements.
    Presque aussitôt il fut rejoint par les trois autres. Dix minutes plus tard, ils couraient par les rues de Paris, haletants, l’épée à la main, jetant parfois un regard par-dessus l’épaule.
    Jean sans Peur les attendait à l’hôtel de Bourgogne.
    Il les vit entrer dans la salle des armes, échevelés, couverts de sueur, les vêtements en désordre.
    – Où est-elle ? dit-il, les dents serrées.
    – Passavant ! cria Courteheuse.
    – Le mort ! gronda Ocquetonville.
    – Où est-elle ? hurla Jean, sans Peur.
    – Monseigneur, dit Guines, la Seine n’a pas gardé le cadavre !
    – Malédiction ! rugit le duc de Bourgogne.
    Il fallut une heure d’interrogations, de jurons, de menaces, de prières. Peu à peu, cependant, la terreur des quatre tomba. La scène fut retracée dans son entier.
    Lorsque Jean sans

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