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L'Hôtel Saint-Pol

L'Hôtel Saint-Pol

Titel: L'Hôtel Saint-Pol Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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sûreté…
    Mollement, la tête de Charles VI se renversa sur le dossier du fauteuil… et il s’endormit, la main dans la main de l’ange penché sur lui.
    Longtemps, Odette demeura ainsi. Quand elle fut sûre du sommeil du roi, doucement, elle dégagea sa main. Alors elle se retourna, vit tous ces visages effarés, parut étonnée de cette nombreuse et magnifique réunion d’inconnus, et apercevant parmi eux le vieux Champdivers, plus stupéfait, plus admiratif, plus ravi à lui seul que tous les autres ensemble, courut à lui et lui dit :
    – Ah ! comme ce malheureux sire a grand besoin de pitié !…
    Alors il n’y eut qu’un cri parmi les seigneurs présents :
    – Il faut que cette jeune fille vienne habiter l’Hôtel Saint-Pol. C’est elle qui guérira le roi !
    – C’est vrai, dit à contre-cœur le duc de Berry. Il faut que le roi guérisse.
    Champdivers pâlit. Il s’agissait en somme de lui arracher l’âme. Odette partie, il ne lui restait qu’à mourir seul, triste, désespéré, près de ce foyer désert où elle avait apporté tant de joie.
    – Jeune fille, répondez, reprit le duc de Berry. Comment cela est-il arrivé ?
    – Je ne sais, monseigneur, dit paisiblement Odette. Le roi est entré. J’étais là. J’ai eu peur d’abord de ses cris et de son visage. Puis, j’ai eu compassion, et me suis approchée de lui pour tâcher à le consoler ; il m’a regardée, m’a pris la main, et bientôt ses cris ont cessé.
    Le duc de Berry hocha la tête et jeta un coup d’œil aux assistants. Cela voulait dire : Avouez que ceci est bien incroyable sans diablerie… S’il n’y eût là que des partisans de Berry, le sort d’Odette eût été vite réglé. Mais la majorité des seigneurs cria : Elle est inspirée par quelque ange. Il faut qu’elle sauve le roi !
    – C’est aussi mon avis, dit Berry, qui se tourna vers Champdivers : Est-ce que cette jeune fille, en d’autres circonstances pareilles, a montré le même merveilleux pouvoir ?
    – Jamais, monseigneur, dit le vieux soldat.
    – Est-elle bonne chrétienne ? Va-t-elle à la messe ? Fait-elle ses Pâques ?
    – Demandez cela à l’abbé du Val Gérard ! répondit brusquement le soudard. Sous mon toit, il n’y a pas d’hérétiques. J’ai servi sous messire Bertrand et sous Transtamare. Je suis un vieux chevalier. Je m’appelle Honoré de Champdivers. J’ai versé mon sang pour le feu roi Charles le Cinquième. Plus d’un Anglais porte l’entaille de mon estramaçon. Plus d’un aussi ne pourra plus jamais se vanter de m’avoir rencontré. C’est pour vous dire que sous ce toit, comme l’a dit une dame illustre au témoignage de qui j’en appellerai s’il est besoin, habitent bravoure, honneur et loyauté.
    Ce digne couplet fut prononcé d’une voix frémissante. Honoré de Champdivers se redressa de toute sa hauteur et plus d’un courtisan admira sa verdeur et sa force.
    – On ne vous soupçonne pas ! dit le duc de Berry. – Allons. Cette jeune file viendra loger à l’Hôtel Saint-Pol. Fasse le ciel qu’elle rende l’esprit à notre sire, car Paris et le royaume ont besoin de leur roi.
    Autour du roi, on cria Noël. Mais Champdivers se sentit mourir.
    – Est-ce que tu vas m’abandonner ? murmura-t-il tout tremblant.
    – Jamais !… Seigneur duc, ajouta Odette, puisque vous pensez que ma présence à l’Hôtel Saint-Pol est nécessaire à notre sire le roi, c’est mon devoir de chrétienne et de sujette de vous suivre. Mais je vous assure que je ne quitterai pas le clos où je suis née à moins d’être accompagnée de messire de Champdivers, mon grand-père, et de dame Margentine, ma bonne nourrice.
    – Par la Croix-Dieu ! songea Champdivers, elle parle à l’oncle du roi avec aussi peu de façons que j’eusse parlé à un Anglais. Où prend-elle ce courage et cette décision ?
    Il tremblait. Il voyait le duc hésiter. Mais sans doute Berry ne trouva pas d’objections, ou s’il en trouva, il les garda pour lui. Sur cette mer orageuse de la politique telle qu’elle se faisait, à l’aide du poignard et du poison, il n’était pas l’audacieux nautonier tenant tête au vent, mais nul mieux que lui ne savait louvoyer. Il se tourna donc vers l’un des seigneurs qu’il choisit parmi les plus fidèles de Charles VI.
    – Savoisy, dit-il, un temps de galop jusqu’à l’Hôtel Saint-Pol et, dans le logis du roi, faites préparer des appartements pour la

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